True Detective saison 3 : enfin le grand retour de la série policière ?

True Detective saison 3 : enfin le grand retour de la série policière ?

CRITIQUE SÉRIE - On a pu voir les cinq premiers épisodes de cette troisième saison de "True Detective" attendue à plus d'un titre. La série renoue-t-elle avec ce qui a fait qu'on l'a tant aimée à ses débuts ? Mahershala Ali et Stephen Dorff sont-ils enfin les dignes successeurs de Matthew McConaughey et Woody Harrelson ? On vous dit ce qu'on pense de cette nouvelle saison, sans spoilers.

La série True Detective nous doit une revanche. Les efforts entrepris lors de la sublime première saison ont été annihilés par une seconde bien plus qu'en deçà de nos attentes. La discorde entre Cary Fukunaga et Nic Pizzolatto a forcé le premier à quitter le navire, laissant comme seul maître à bord le créateur du show. Pas forcément un bon plan, comme en témoignait cette nouvelle histoire qui n'arrivait pas une seconde à égaler la puissance de la première dans les enjeux narratifs ou dans le développement des thèmes.

Doux euphémisme de dire que cette troisième saison était attendue au tournant. Les amoureux du début de la série s'attendent quelque part à revenir aux sources. L'enquête de Rust Cohle et Martin Hart nous transportait dans une Louisiane ténébreuse, berceau de crimes commis à la lisière du fantastique. Sans ressasser tout ce qui n’allait pas dans la saison 2, et par exemple parler des personnages, il manquait à ce Los Angeles un quelque chose de l’ordre de la fantasmagorie pour nous happer.

Mais le format de l'anthologie a un gros avantage, il permet de tout reprendre à zéro. Faire table rase du passé, penser à ses erreurs, en repartant sur de nouvelles bases. Nic Pizzolatto a cette chance, à lui de la saisir. Les premiers échos lors de la production n’étaient pas foncièrement rassurants, ce dernier s’est encore brouillé avec le réalisateur Jeremy Saulnier durant le tournage. Des différents artistiques qui évoquent ceux avec Fukunaga. Pas de quoi inspirer la confiance.

Trois nuances de Mahershala Ali

Critique True Detective saison 3 : enfin le grand retour de la série policière ?

Pour renouer avec une ambiance similaire à celle de la première saison, cette histoire prend lieu et place dans les Ozarks - les amateurs de la série éponyme diffusée sur Netflix savent déjà que cette région a un cachet, une âme spécifique. Mahershala Ali incarne Wayne, un policier chargé d'élucider le mystère derrière la disparition de deux enfants. Il est épaulé par son compère Roland, campé par Stephen Dorff. True Detective revient à un duo d'enquêteurs mais ce n'est qu'illusoire. La série est en réalité bâtie pour suivre Wayne, seul personnage principal développé de bout en bout, et ce au travers de trois temporalités. Comme dans la première saison, on revient à une affaire ressassée sur une longue période. Il y a d'abord le moment où se déroulent les faits, puis on retrouve les personnages une dizaine d'années après lors de l'apparition de récents éléments sur l'enquête et, enfin, un troisième temps, dans les années 2010 où Wayne est interviewé par une journaliste au sujet de la disparition.

La série revient à ses mécaniques de narration initiales, montrant d'une part l'action et de l'autre des phases plus statiques. Nic Pizzolatto s'était trop éloigné dans la saison 2 de composants importants que l'on croyait être l'ADN de True Detective, pour raconter son histoire. Le personnage de Mahershala Ali n'égale pas ceux de Matthew McConaughey et Woody Harrelson mais sa construction psychologique en devient passionnante et complexe à suivre grâce à son développement en trois temps. Ainsi, toutes ses nuances sont abordées, assistées par un acteur à la prestance magnétique, qu'il soit grimé ou non. S'il fonctionne bien en autonomie, son partenaire dispose d'une profondeur moins conséquente, le poussant à jouer les seconds couteaux sans avoir grand chose à défendre. Dommage pour Stephen Dorff qui, sur les cinq épisodes vus, en est réduit à jouer les durs avec une perruque sur la tête.

Un rythme inégal

Critique True Detective saison 3 : enfin le grand retour de la série policière ?

Ce qui est incontestable, c'est que la magie True Detective se remet en action avec cette troisième saison. On retrouve des sensations, des ambiances, des situations qui nous rappellent pourquoi on a tant aimé cette série à ses débuts. Elle épouse en un sens nos attentes mais souffre de quelques accrocs qui l'empêchent d'égaler ses grandes heures. Les ingrédients sont là, oui. Mais il semblerait que cette saison force sur certains aspects, comme si elle s'obligeait à donner aux téléspectateurs ce qu'ils souhaitent après les avoir déçus. Au point de s'auto-parodier par moment, notamment sur des longues plages de dialogues, ou de monologues, pour dire avec trop de mots ce qui pourrait être fait avec largement moins. On se souvient que Matthew McConaughey s'en donnait à cœur joie dans cet exercice. Aujourd'hui, il est demandé à Mahershala Ali d'en faire de même avec une écriture moins affinée derrière.

Nic Pizzolatto, sans doute conscient des reproches adressés par le passé, force le trait dans des scènes qui étirent avec outrance le rythme des épisodes. Que la série ne sache pas se réinventer ou évoluer peut décevoir. On croit parfois simplement être devant une saison 1.5. Elle donne l'impression d'avoir été faite en réaction à l'avalanche de mauvaises critiques et veut se racheter une conduite sans prendre trop de risques. Nous avons ce que nous étions venus chercher, sans découvrir grand chose d'autre. Il serait un peu injuste de se montrer trop sévère avec cette troisième anthologie car elle rattrape le coup et récite assez bien sa leçon, poussant le vice jusqu'à reconvoquer une petite dose de satanisme. La surprise n'est pas au rendez-vous mais la déception non plus. À défaut d'égaler une première saison qui paraît indétrônable, elle en rappelle quelques senteurs fortement agréables à inhaler.

 

True Detective créée par Nic Pizzolatto, saison 3 sur OCS à partir du 14 janvier 2019 en diffusion US+24. Ci-dessus la bande-annonce.

Conclusion

Note de la rédaction

Une nouvelle saison qui rappelle quelques bonnes sensations mais n'égale en rien la première.

Note spectateur : 0.7 (1 notes)