CRITIQUE / AVIS FILM - Jodie Turner-Smith et Colin Farrell tentent désespérément de faire revenir leur androïde à la vie dans "After Yang". Un film de science-fiction intéressant par de nombreux aspects, mais dont le côté répétitif et l'esthétique léchée empêchent le spectateur de se laisser happer.
After Yang : une proposition alléchante
Deuxième long-métrage de Kogonada (Columbus), After Yang s'ouvre sur une séquence décalée et prometteuse. Dans leur salon, plusieurs familles se lancent dans un concours de danse virtuel. Parmi les participants se trouvent Kyra (Jodie Turner-Smith), Jake (Colin Farrell), leur fille Mika (Malea Emma Tjandrawidjaja) et leur androïde domestique Yang (Justin H. Min). Peu de temps après, ce dernier s'éteint et ne redémarre plus.
Dès le lendemain, Jake met tout en oeuvre pour le réparer, ne voulant pas priver Mika de son "grand frère". Alors qu'il cherche une solution, il découvre que Yang a eu plusieurs vies avant d'arriver dans leur foyer.
Rythmé et coloré, le début du film introduit l'idée que les androïdes sont parfaitement intégrés au quotidien dans un futur proche. Un concept prometteur, qui donne immédiatement envie de voir davantage ce futur proche.
Des décors limités
Malheureusement, Kogonada n'en donne qu'un aperçu trop bref. Hormis un plan large sur la ville et quelques scènes dans des voitures, qui sont devenues des habitacles totalement automatisés et capables d'accueillir de la végétation, le cinéaste reste focalisé sur la jolie propriété familiale, sur ses baies vitrées verdoyantes et sur son mobilier feng shui. Il crée ainsi un rapport intime entre le spectateur et les personnages mais ne parvient pas à faire ressentir l'évolution du monde, comme réussissait à le faire Spike Jonze dans le superbe Her.
L'idée d'un avenir immaculé, propre et où le calme règne paraît difficilement concevable à l'heure actuelle et After Yang peut donc donner le sentiment d'assister à une oeuvre belle mais vaine d'un réalisateur un brin poseur. Néanmoins, le long-métrage recèle de séquences intéressantes, notamment lorsqu'il se penche sur le passé de l'androïde et surtout sur ses sentiments.
Des thématiques passionnantes
A.I. Intelligence Artificielle, Blade Runner, Her et Ex Machina ont déjà étudié la capacité des androïdes et des intelligences artificielles à développer des émotions et à aimer. After Yang souffre malheureusement de la comparaison avec ses prédécesseurs puisqu'il ne transcende jamais ses thématiques et n'apporte pas quelque chose de véritablement neuf à la science-fiction.
Ce qui ne l'empêche pas de proposer des scènes touchantes que Kogonada dévoile au bon moment, comme les souvenirs archivés de Yang, qui démontrent qu'il a évolué comme un être humain. La notion d'humanité est d'ailleurs remise en question tant la frontière est ici extrêmement mince entre les robots et les hommes. Leur attitude est la même, au même titre que leur difficulté à communiquer, comme le résument les courts échanges murmurés entre Jodie Turner-Smith et Colin Farrell.
Face à ses partenaires en retrait, le comédien brille à nouveau dans le rôle de ce père qui fait tout pour préserver sa fille et n'arrive pas à faire son deuil. Il est clairement l'un des principaux atouts d'After Yang, qui se repose énormément sur sa présence. Quelques années plus tôt, Colin Farrell livrait déjà une performance bouleversante dans The Lobster, long-métrage qui faisait preuve de nettement plus de créativité dans sa manière d'aborder le futur, à côté duquel le film de Kogonada fait hélas pâle figure.
After Yang de Kogonada, en salles le 6 juillet 2022. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.