Dylan O’Brien combat le terrorisme de manière contestable dans "American Assassin", où l’Amérique se place encore en grande donneuse de leçons.
Passé par la télévision (Six Feet Under, Dexter, Homeland), puis remarqué au cinéma avec Secret d’état, le réalisateur Michael Cuesta revient avec American Assassin. Adapté du roman de Vince Flynn, on y suit Mitch Rapp, un jeune homme dévasté après la mort de sa petite amie dans un attentat. Décidé à se venger, il fait croire à sa radicalisation pour approcher les terroristes à l’origine de l’attaque. La CIA voit alors en lui un sérieux potentiel et décide de l’engager dans la lutte contre le terrorisme.
Emmené par Dylan O’Brien, plutôt crédible dans ce rôle, American Assassin partait d’une belle promesse. Seulement passé sa première scène – une séquence terrifiante de fusillade sur une plage – le film se prend les pieds dans le tapis. Certes, on y trouve un Michael Keaton surexcité et en roue libre. Ainsi que moult stéréotypes et autres facilités scénaristiques, dans la construction même des personnages. Mais le plus dérangeant n'est pas là. Le véritable problème d’American Assassin provient, en premier lieu, de son récit à la morale douteuse qui se dessine au fur et à mesure. D'ailleurs, on pourrait même estimer que ce résultat n'est pas tellement de la faute de Michael Cuesta, qui réalise un film d’action classique peu inspiré mais sans réelles fausses notes.
Un discours américain moralement contestable
En effet, American Assassin n’aurait pas été si choquant s’il se contentait d’être un film de vengeance. Au hasard, on pourrait citer en exemple le cinéma coréen, avec la trilogie de Park Chan-wook (Sympathy for Mister Vengeance, Old Boy, Lady Vengeance), ou encore Kim Jee-woon avec A Bittersweet Life et J'ai rencontré le diable. Des films dans lesquels la vengeance se justifie par l’ennemi représenté (un homme ou un groupe responsable d’actes monstrueux), et les conséquences terribles sur le héros.
Seulement avec American Assassin, il y a d'abord un contexte politique. Qu’un homme poursuive les assassins de sa femme, qu’ils soient djihadistes ou autres, qu’importe. Mais tout bascule dès lors que le film lorgne du côté du film d’espionnage avec la « grande Amérique » en donneuse de leçons. Lors de sa fausse radicalisation, Mitch regarde une vidéo de propagande djihadiste, se résumant à « ils ont attaqué et tué nos familles, nous allons nous venger en faisant de même ». Tout au long du film, au lieu de se remettre en cause, l’Amérique (par le biais de la CIA et des machines à tuer qu’ils forment) ne fait alors que poursuivre la même direction sous couvert de patriotisme (là où les autres sont définis comme extrémistes). En l’absence de morale, difficile alors de faire la part des choses et de ne pas voir le film, à son tour, comme un outil de propagande.
Un ennemi qui aurait pu changer la donne
Cela prend beaucoup plus de sens dès lors que le véritable ennemi se dévoile. Sans grande surprise, on comprend qu’avant le recrutement de Mitch, une autre recrue avait mal tournée. American Assassin pouvait alors se diriger vers la remise en question d’une société responsable de la création de ses propres monstres. Une remise en cause à la manière de Jason Bourne, qui se retournait contre l’agence ayant fait de lui un assassin. Ici, il n’en sera rien. Mitch se montrant conforme aux attentes de la CIA, pendant que son prédécesseur et ce qu’il dénonce resteront dans l’ombre. Le pire viendra alors d’une dernière scène, présentant l’Amérique en décideur de ce qui est juste ou non, de qui doit gouverner ou non un pays (ici l’Iran), et donc de qui doit mourir ou non.
Au-delà de son fond particulièrement contestable, American Assassin se montre, au mieux, correct sur sa forme. On évoquait l’absence de fautes graves dans la réalisation de Michael Cuesta, l’ensemble reste malgré tout peu surprenant. Entre ses scènes d’actions sans saveur – à mille lieux du style singulier de Paul Greengrass – et ses retournements de situation prévisibles, American Assassin ne trouve jamais la bonne formule qui aurait permis de contenter certains.
American Assassin de Michael Cuesta, en salle le 20 septembre 2017. Ci-dessus la bande-annonce.