Arctic : une histoire de trous

Arctic : une histoire de trous

CRITIQUE FILM - Après avoir été présenté en séance de minuit au Festival de Cannes, « Arctic » de Joe Penna sort enfin dans les salles. Un survival pur et dur où Mads Mikkelsen incarne un scientifique paumé au beau milieu de l’Arctique et qui va tenter de trouver de l’aide.

Pas besoin d'être un génie pour voir que ce Arctic, premier long-métrage de Joe Penna, est en fait une histoire de trous. Trous perdus du bout du monde, dans lequel on est coincé. Trous dans la glace pour récupérer du poisson frais, seul moyen de se nourrir. Trous dans la neige pour écrire un immense « S.O.S » à destination, sait-on jamais, d’hélicoptères qui passeraient par là. Trous dans la peau, des plaies qui vont avoir du mal à cicatriser dans de telles conditions. Trous dans la caverne par lequel un ours immense rentre sa gueule impressionnante, probablement affamé. Mais aussi trous dans le sol, de vrais pièges à con, comme des punitions divines qui rappellent à Overgard (Mads Mikkelsen), rescapé d’un crash d’avion, son destin : celui de sauver quelqu’un avant de (et pour) se sauver lui-même.

C’est tout le paradoxe de la trame, épurée, de Arctic. Overgard, un scientifique vigoureux qui a le sens de la débrouille, est coincé au fin fond de l’Arctique. Réfugié dans la carcasse d’un avion, qu’il a aménagé, il n’attend qu’une seule chose : qu’on vienne le sauver. On ne sait pas trop depuis combien de temps il est planté là. Rien n’est dit sur son passé ou sur les raisons de son accident. Mais cela importe peu. Car le but d’Overgard, et c’est une particularité notable pour un pur film de survie, sera, non pas de se sauver lui-même, mais de sauver une jeune femme rescapée, elle aussi, d’un accident d’hélicoptère, qui s’est crashée sous ses yeux, alors qu’il pensait lui-même être enfin sauvé. Pour tout ça, Arctic a de l'intérêt et inaugure de belles choses pour la suite de la carrière de Joe Penna, qui propose un premier long assez solide.

Critique Arctic : une histoire de trous

Briser la glace

Mais la jeune fille, dans un état critique, ne peut pas se déplacer par elle-même. Grosse blague : voilà Overgard qui, après avoir récupéré une carte où est indiquée la localisation de la station scientifique – quand même à 5 jours de marche), se retrouve sauveteur malgré lui, traînant le corps de la jeune fille sur sa très lourde luge. Le but est, en gros, non plus de survivre mais de maintenir en vie autrui. Arctic, en soit, n’est jamais vraiment inintéressant, mais peine, malgré un intéressant inversement des rôles et des trajectoires attendues, à sortir du carcan très classique du survival à l’Américaine.

Un soupçon de The Revenant de Iñarritu, un poil du Territoire des Loups de Carnahan, un peu de Seul au Monde de Zemeckis et le tour est joué. De jolis paysages, un ours impressionnant et terrifiant, et un rebondissement un peu sournois en toute fin de film, pour une séance de minuit qui passe toute seule mais sans éclat. C'est tout le problème de l'épure qui ne va pas jusqu'au bout de sa propre simplicité. Arctic est certes un film de survie minimaliste, mais s'appareille, malgré son mutisme, d'une somme de clichés attendus et répétés depuis des décennies au sein du genre du survival. Il faudrait, un jour, avoir l'idée de briser ce mur de verre qui enferme le cinéma de genre dans ses certitudes, efficace mais jamais surprenant.

 

Arctic de Joe Penna, présenté hors compétition au Festival de Cannes, en salle le 6 février 2019. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.

Conclusion

Note de la rédaction

Pour un premier film, « Arctic » est un survival prometteur malgré son académisme évident. Au sein d'un carcan assez scolaire, Joe Penna parvient, néanmoins, à proposer quelques idées intéressantes.

Note spectateur : 5 (1 notes)