CRITIQUE / AVIS FILM : Normalement « Bloodshot » aurait dû sortir dans les salles de cinéma. Mais à cause de l'épidémie de coronavirus, le long-métrage est finalement disponible directement en VOD dès le 27 mars.
Réalisé par Dave Wilson, le long-métrage est une adaptation de la série de comics éponyme de chez Valiant Edition. Bloodshot raconte le destin de Ray Garrison, un soldat de l'armée américaine tué en service. Sa dépouille est récupérée par une entreprise qui le transforme en sur-humain. Le voilà devenu une arme de destruction massive. Ce héros pas comme les autres est créé en 1992 par Kevin Van Hook, Don Perlin et Bob Layton.
Le classicisme navrant du genre
C'est assez simple à résumer : Bloodshot est un film de super-héros qui a 20 ans de retard. Une œuvre anachronique qui semble sortie d'un autre temps, qui propose des approches totalement obsolètes. C'est un long-métrage extrêmement classique dans ses thématiques comme dans son traitement. Dave Wilson est largement à côté de la plaque. Il propose un film de super-héros terriblement insipide. Une origin-story navrante qui ne parvient pas à sortir des carcans habituels du genre. D'où cette désagréable sensation d'être revenu au début des années 2000.
Parce que structurellement, le scénario ne va pas chercher bien loin. Le héros se réveille avec des pouvoirs, apprend à s'en servir et oh mon dieu quel retournement de situation, il est en fait manipulé. Bref, vous avez compris le genre, le spectateur est balancé dans un récit véritablement attendu et téléphoné. Le long-métrage ne parvient à partager aucun suspense, ni véritable tension. Et on finit par s'ennuyer ferme face à cette histoire qui manque cruellement d'originalité.
Visuellement c'est pas beaucoup mieux. Dave Wilson tente de dynamiser ses séquences d'action avec des ralentis placés au hasard dans les chorégraphies. En ressort un pastiche hideux de l'utilisation du slow motion dans 300. Le cinéaste tente ainsi de stimuler ses scènes d'action mais se contente finalement de les ruiner, comme si un gosse avait joué aléatoirement avec le bouton ralenti. Et malheureusement Vin Diesel ne sauve pas grand chose du film. Il apparaît très fade, ne partageant que deux émotions pendant toute la durée du métrage, regard noir et sourire de beau gosse en coin. On sait que l'acteur n'a pas énormément de cordes à son arc mais bordel Vin fait un effort !
Par contre il a l'air quand même heureux quand il porte son marcel blanc de Fast and Furious, et quand il conduit sa caravane vers le soleil couchant. Bloodshot, c'est donc ce genre de ramassis de clichés. Heureusement, quelques rares séquences d'action sortent les spectateurs de leur coma. Par exemple, Dave Wilson propose une belle esthétique lors du premier affrontement. Une séquence sublimée par ses fumées rouges, sa farine répandue au sol et quelques moments visuellement solides. Pareil avec la confrontation finale dans la cage d'ascenseur assez réussie. Mais à part ça... Il n'y a pas grand chose à se mettre sous la dent.
Une thématique éculée
En plus, Bloodshot essaye de paraître plus intelligent qu'il ne l'est réellement. Les thématiques abordées tentent de pointer du doigt une instrumentalisation de l'armée. C'est un récit d'émancipation militaire de ce soldat qui se rebelle contre ses dirigeants, conte l'ordre établi de puissants égoïstes qui se servent de leurs militaires comme de pantins désarticulés. Le long-métrage veut mettre en exergue une administration qui manque de transparence, et qui utilise l'armée de manière non patriotique, non éthique, et non morale. Mais bon, sans se leurrer, cela reste assez sommaire. Et Vin Diesel se rapproche plus de la caractérisation de Sylvester Stallone dans Rambo 3 que de sa figure éminemment politique du premier film.
Enfin, le long-métrage tente également une approche d'anticipation, en empruntant autant à Black Mirror qu'au récent Upgrade. Avec sa vision des nouvelles technologies, Bloodshot veut attirer l'attention sur les dangers de l'avancée technique, en abordant une fois de plus le sujet de l'homme robot. Pour ça il tente aussi, par instant, d'offrir une identité visuelle qui s'inspire du récent, et excellent Alita : Battle Angel. Notamment via les améliorations mécaniques des personnages. Sans surprise il n'arrive pas à la cheville du film de Robert Rodriguez.
Sorte de Robocop moderne, contrôlé par ses maîtres, qui cherche à obtenir son indépendance. Une extrapolation prophétique qui, encore une fois, est déjà obsolète, par son manque de pertinence dans l'écriture, et sa rare stupidité. Puis un peu d'espoir dans la conclusion, qui, pendant un instant, propose un choix scénaristique radical, avant de rétro-pédaler pour laisser la place à une éventuelle suite. Finalement Bloodshot peut facilement rejoindre les vilains petits canards Ghost Rider et Venom, dans la case des films de super-héros modernes de la honte. Bref, Bloodshot est un long-métrage assez navrant, qui méritait finalement peut-être sa sortie en VOD...
Bloodshot de Dave Wilson, en VOD dès le 27 mars. Ci-dessus, la bande-annonce. Découvrez ici toutes nos bande-annonces.