CRITIQUE / AVIS FILM - Kim Jee-woon revient à l'humour avec "Ça tourne à Séoul ! Cobweb", comédie noire qui se questionne sur la création en présentant le tournage chaotique d'un thriller horrifique.
Kim Jee-woon soigne son retour
Kim Jee-woon est avec Park Chan-wook et Bong Joon-ho l'un des réalisateurs coréens les plus marquants des années 2000/2010. Beaucoup l'ont découvert avec le violent J'ai rencontré le Diable (2010). Mais on lui doit avance cela les très bons Deux Sœurs (2003), A Bittersweet Life (2005) ou encore Le Bon, la Brute et le Cinglé (2008).
Capable d'œuvrer dans des genres différents, le cinéaste semblait tout de même loin de sa superbe depuis une bonne dizaine d'années. The Age of Shadows (2016) et Illang : La Brigade des loups (2018) étant loin d'être au niveau auquel on attend Kim Jee-woon. Sans parler de son expérience américaine avec l'inégal Le Dernier Rempart (2013). Mais pour son dixième long-métrage, Ça tourne à Séoul ! Cobweb, le réalisateur parvient à nouveau à nous ravir.
Son film, il le situe en 1970, pendant la dictature. Une période trouble de l'histoire de la Corée du Sud sur laquelle Kim Jee-woon ne s'attarde pas, si ce n'est pour rappeler certaines règles qu'il fallait respecter dans le milieu du cinéma. Car il est ici question du tournage d'un film par un réalisateur qui espère prouver enfin ses qualités de metteur en scène, et ne plus passer pour un fraudeur dont l'unique succès pourrait être dû à quelqu'un d'autre.
Song Kang-ho en Ed Wood dans Ça tourne à Séoul ! Cobweb
On sent rapidement avec Ça tourne à Séoul ! Cobweb l'envie de Kim Jee-woon de se faire plaisir. Lui qui maîtrise si bien les changements de ton, ouvre son long-métrage façon série B horrifique en noir et blanc. Une scène qui se révèle être un rêve de Kim (Song Kang-ho), qui souhaite reprendre le tournage de son film, imaginant qu'en y ajoutant les scènes de son rêve, le long-métrage se transformera en chef-d’œuvre. Il y a évidemment quelques chose d'Ed Wood chez ce réalisateur constamment conspué par la critique, mais qui continue d'y croire.
Sauf qu'avec des acteurs peu enclins à l'aider, une équipe de production loin d'être la plus efficace et la menace de la censure, ce ne sera pas la fête sur le plateau, mais un beau bordel d'une vraie drôlerie. C'est avant tout par les situations de perte de contrôle que Kim Jee-woon amène de la comédie, tout en tirant de son "héros" quelque chose de touchant. Car Kim (le personnage) a tout contre lui, mais par sa volonté, l'optimisme demeure, même après un incendie non maîtrisé.
Une comédie plus profonde qu'elle n'y paraît
Pour interpréter Kim, Song Kang-ho est comme à son habitude excellent. Mais les interprètes autour de lui ne sont pas en reste. À l'image de Jeon Yeo-been en assistante réalisatrice plus dévouée que jamais, et même un peu trop.
Tout en naviguant parfois vers des thématiques sombres, au sens large (le portrait de l'industrie cinématographique durant la dictature) et plus intime (les questionnements d'un réalisateur et donc de Kim Jee-woon sur sa propre créativité), Ça tourne à Séoul ! Cobweb demeure un film réjouissant dans lequel son auteur fait parler sa virtuosité caméra en main. Il propose là une comédie noire et rythmée qui, sans révolutionner le genre, offre suffisamment de surprise et de rire pour convaincre.
Ça tourne à Séoul ! Cobweb de Kim Jee-woon, en salles le 8 novembre 2023. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.