CRITIQUE/AVIS FILM - Le film "Chicken Run : La Menace nuggets" offre une jolie suite, amusante et appliquée, au monument de l'animation "Chicken Run", sorti en 2000. Visuellement imparable et sincère dans sa démarche, on pourra cependant regretter son survol des références qu'il revendique.
La suite de Chicken Run est là
On ne l'attendait plus, 23 ans après la sortie de Chicken Run, immense succès du succès d'animation en stop-motion réalisé par les studios Aardman Animations. Mais elle est bien là, disponible sur Netflix depuis le 15 décembre, cette suite des aventures de Ginger et Rocky et, puisque le temps s'est écoulé, de leur toute jeune fille aussi : Molly. Après la grande évasion de Chicken Run, qui s'inspirait avec génie du film avec Steve McQueen de 1963, les auteurs de Chicken Run : La Menace Nuggets ont choisi de s'inscrire dans la continuité et donc de renverser l'enjeu. Cette fois-ci, plus question de s'échapper d'un poulailler, mais d'en un infiltrer un, ultra-moderne et au format industriel.
Alors que les poules vivent heureuses et cachées, loin des humains, sur une île transformée en petit paradis, une usine de nuggets high-tech s'installe non loin. Molly, qui ne connaît du monde que sa petite île protégée, va malheureusement s'y aventurer. Ginger et Rocky et leurs amis vont alors monter une mission d'infiltration pour la sauver, et en profiter pour mettre un terme à la menace de cette nouvelle usine, à la tête de laquelle se trouve la terrible et revancharde Mrs. Tweedy...
De la pâte à modeler et du coeur à revendre
Chicken Run : La Menace Nuggets séduit d'emblée par son extraordinaire savoir-faire du modelage et du stop-motion. Il n'y a en effet que ces poules pour avoir ce style à la fois rond et énergique, confortable et amusant, inimitable. La clé de cette animation très réussie ? Le coeur apporté, la sincérité d'une création et du développement de son univers. La sympathie des protagonistes semble être celle de leurs créateurs, tous ensemble bien décidés à s'amuser avec l'infini sérieux des enfants venus le moment de jouer.
Bien inspirés, le créateur et producteur historique Peter Lord et le réalisateur Sam Fell ont ajouté la juste mesure de CGI pour enrichir et détailler les multiples décors et les différents lieux dans lesquels se déroule cette suite, ni plus ni moins que ce qu'il fallait pour moderniser cette création sans la dénaturer. C'est donc saisis d'une douce sensation de familiarité et séduits par sa sincérité et son bel effort visuel qu'on entre dans Chicken Run : La Menace Nuggets.
Des références survolées
La découverte de l'île où Ginger, Rocky, et tout l'ancien poulailler se sont installés est ravissante. Pendant cette - longue - ouverture, tout est permis sur le plan narratif, et Chicken Run : La Menace nuggets pourrait alors décoller dans n'importe quelle direction. Mais une fois Molly échappée de l'île et retenue dans l'usine, aménagée comme un parc d'attractions et où les poules sont lobotomisées, on comprend vite que les auteurs s'inclinent vers le genre de la comédie d'action. Ainsi, on y reconnaît des inspirations tirées des sagas James Bond et de Mission: Impossible. Véritable repaire de "vilains" façon James Bond, l'usine va être infiltrée par Ginger et Rocky et leurs plus fidèles amis dans le style Mission: Impossible, avec la constitution d'une équipe, l'élaboration d'un plan, son exécution, etc.
Point fort : l'inventivité des solutions pour permettre à ses poules de rivaliser et vaincre les humains, à grands renforts d'accessoires malins et d'un équilibre subtil entre agilité, chance et humour pour y parvenir. Chaque séquence d'action a au moins une idée géniale, et on ne s'ennuie pas dans cette grande aventure d'infiltration - extraction. Mais, point faible : s'il y a du coeur à ré-animer ces adorables personnages, il y en a moins dans les références utilisées. Ni hommages ni subversions, les références aux grands titres du cinéma qu'aligne Chicken Run : La Menace nuggets apparaissent finalement comme des produits d'appel un peu vides et survolés. Une preuve se trouve déjà dans le titre : La Menace nuggets pour "La Menace fantôme", un clin d'oeil à un célèbre univers pourtant absent du film.
La magie est là, mais sans "grande illusion"
Chicken Run : La Menace nuggets réussit son pari, celui de donner une suite satisfaisante au grand film de 2000, et de retrouver un peu de sa magie. Mais cette suite est moins rebelle et moins sombre, plus sage et plus lumineuse, plus "facile" dans le sens où elle choisit de se disperser là où dans Chicken Run l'histoire se concentrait intensément sur un lieu, un enjeu, une référence. Et proposait autant d'humour que de frayeur, quand Chicken Run : La Menace nuggets appuie bien plus sur son humour.
Néanmoins, si ce nouveau film n'atteint pas les sommets de Chicken Run, on y retrouve un peu de son génie et suffisamment de sa magie pour passer un très bon moment devant un divertissement familial de haut niveau.
Chicken Run : La Menace nuggets de Sam Fell, sur Netflix le 15 décembre 2023.