CRITIQUE / AVIS FILM - Avec "City of Darkness" Soi Cheang ("Limbo", "Mad Fate") propose un pur film d'action hongkongais marqué par la présence de la légende Sammo Hung.
City of Darkness : entre modernité et nostalgie
Connu en Chine pour avoir dirigé la trilogie The Monkey King (2014-2018), le réalisateur hongkongais Soi Cheang avait mis une claque dernièrement avec Limbo (2023), un sublime polar en noir et blanc, entre Seven et Memories of Murder. Depuis ce film (sorti à Hong Kong en 2021), le cinéaste ne s'est pas tourné les pouces. Il a réalisé Mad Fate, sorti chez nous le 17 juillet (voir notre critique), et Twilight of the Warriors: Walled In, présenté en séance de minuit au Festival de Cannes 2024 sous le titre City of Darkness. Une séance qui en a mis plein les yeux, tant le film est un pur plaisir d'action, entre modernité et hommage au cinéma hongkongais des années 1980.
Un hommage qu'on ressent dès le casting, puisque Soi Cheang a réuni pour l'occasion une légende des films d'art martiaux et des visages connus du cinéma hongkongais en général. C'est ainsi qu'on retrouve l'emblématique Sammo Hung, qu'il ne faudrait évidemment pas réduire à la série Le Flic de Shanghaï tant sa carrière en impose. À ses côtés se trouvent Richie Jen (Jackie Chan à Hong Kong, Breaking News) et le charismatique Louis Koo (La Légende de Zu, Election). Dans City of Darkness, tous les trois représentent une ancienne génération de criminels. Des boss vieillissants, mais toujours influents, qui ont connu une guerre de gangs sanglante par le passé.
Désormais, dans les années 1980, la paix règne puisque chaque gang reste sur son territoire. Jusqu'au jour où Chan Lok-kwun (Raymond Lam), un migrant clandestin, se réfugie dans la Citadelle de Kowloon, après avoir échappé aux Triades de Mr. Big (Sammo Hung). C'est là qu'il fait la rencontre de Tornade (Louis Koo), le chef des lieux, qui accepte de le prendre sous son aile.
Une citadelle délabrée comme décor d'un pur film d'action
Après avoir filmé Hong Kong comme une ville-poubelle dans Limbo, Soi Cheang présente à nouveau un décor bien particulier avec la citadelle de Kowloon. Un véritable lieu qui fut détruit en 1993. C'est ainsi une ville délabrée en plein Hong Kong qu'on découvre. Mais le réalisateur parvient à en tirer une certaine beauté par cette architecture étonnante.
De plus, il y a du bon dans cet endroit, grâce aux valeurs de Tornade, qui dirige les lieux. Par cette figure héroïque, le cinéaste ne montre pas un simple criminel, mais un homme d'honneur qui tente d'agir au mieux. Et il en va de même pour les trois jeunes qui vont se lier d'amitié avec Lok-kwun. Un quatuor se forme alors pour incarner la nouvelle génération qui subira les conséquences d'un ancien conflit. Ou comment le passé vient toujours troubler le présent...
Il y aurait bien des choses à dire sur City of Darkness et ses thématiques, ou encore son choix d'évoquer une part de l'Histoire d'Hong Kong de cette manière - à une période si compliquée, à cause d'un régime chinois toujours plus violent et dominateur. Il n'est aussi certainement pas anodin que Soi Cheang ait proposé une œuvre aussi nostalgique, où l'accent est mis sur l'amitié et la solidarité. Mais au-delà de son sous-texte, le film demeure avant tout un pur film d'action, violent et dynamique.
Rappelant dans un premier temps The Raid (2011), City of Darkness tend au fur et à mesure vers le wu xia en réutilisant son folklore et les capacités exceptionnelles des combattants. Un brin de "magie" qui se mêle parfaitement au style brut de Soi Cheang. L'action atteint alors son paroxysme dans son dernier acte presque épuisant, mais en même temps si jouissif.
City of Darkness de Soi Cheang, en salles le 14 août 2024. Le film était présenté en Séance de Minuit au Festival Cannes 2024. Ci-dessus la bande-annonce.