CRITIQUE / AVIS FILM - Avec "Couleurs de l'incendie", Clovis Cornillac adapte la suite d'"Au revoir là-haut" écrite par Pierre Lemaitre. Si le film risque de souffrir de la comparaison avec celui d'Albert Dupontel, il s'impose comme une proposition ambitieuse portée par un prestigieux casting.
Couleurs de l'incendie : une vengeance pendant l'entre-deux-guerres
Pour son quatrième long-métrage en tant que réalisateur, Clovis Cornillac collabore avec l'écrivain Pierre Lemaitre - qui officie ici en tant que scénariste - pour l'adaptation de son roman Couleurs de l'incendie. Suite d'Au revoir là-haut, le long-métrage débute en 1929, à Paris. Pendant l'enterrement de son père Marcel, Madeleine Péricourt (Léa Drucker) assiste avec impuissance à la chute de son fils Paul (Octave Bossuet), qui le laisse paralysé.
Bouleversée par cet événement, Madeleine s'en remet au banquier Gustave Joubert (Benoît Poelvoorde) pour l'aider à gérer l'empire financier dont elle a hérité. Mais lorsqu'elle refuse les avances de ce dernier, il se vexe et s'associe avec Charles Péricourt (Olivier Gourmet), l'oncle de Madeleine, pour lui dérober sa fortune.
Quelques années plus tard, alors qu'elle mène une vie modeste avec Paul (Nils Othenin-Girard), elle décide de se venger. Pour cela, elle demande de l'aide à son ancien chauffeur Dupré (Clovis Cornillac) et à son ancienne dame de compagnie Léonce Picard (Alice Isaaz), désormais mariée à Gustave. En parallèle, le parti nazi poursuit son ascension en Allemagne et un nouveau conflit menace l'Europe.
Une mise en scène ambitieuse
La première séquence de Couleurs de l'incendie présente les personnages majeurs de l'intrigue à travers un plan-séquence impressionnant qui navigue entre la cour et l'intérieur d'un hôtel particulier. Si le procédé est souvent utilisé de manière pompeuse, elle permet ici de dévoiler d'emblée où se placeront les personnages dans l'intrigue. Il y a évidemment Madeleine au centre, concernée par les événements et soucieuse de rendre à son père l'hommage qu'il mérite. Son fils Paul est quant à lui déjà lucide sur la nature de certains proches de sa mère, ce qui explique son geste tragique.
Les messes basses de Gustave Joubert en disent long sur sa nature versatile, tandis que les remarques de Charles Péricourt révèlent sa grossièreté. Enfin, le chauffeur Dupré fait immédiatement preuve de bienveillance et s'impose comme un homme d'action. Si elle perd en intensité par la suite, la mise en scène est constamment au service de l'histoire. Couleurs de l'incendie parvient à naviguer entre différents genres, oscillant entre drame familial et vengeance jubilatoire, en passant par de l'espionnage et jouant également sur son contexte historique.
Un récit prenant
Si le long-métrage ne fourmille pas autant d'idées visuelles qu'Au revoir là-haut, il réussit lui aussi ses ruptures de ton, n'hésitant pas à ridiculiser avec humour les personnages incarnés par Benoît Poelvoorde et Olivier Gourmet malgré la lourdeur de son sujet. Certaines situations tombent cependant à l'eau, à l'image de chaque apparition des filles sottes de Charles Péricourt, qui cherchent absolument à se marier afin d'aider leur père à sortir de la débâcle financière.
Néanmoins, la quête vengeresse de Madeleine se suit toujours avec plaisir, notamment grâce à l'interprétation de l'excellente Léa Drucker. S'il s'écarte parfois de son intrigue principale pour se concentrer sur des digressions inabouties comme celles autour du personnage de Fanny Ardant (même s'il lui réserve une sortie particulièrement touchante), Clovis Cornillac semble véritablement passionné par le parcours de cette femme trahie et par l'escroquerie qu'elle met en place.
Les participants à l'arnaque, qu'il s'agisse d'Alice Isaaz ou Alban Lenoir, ont tous droit à leurs moments forts qui participent au spectacle. Couleurs de l'incendie assume d'ailleurs totalement son statut de grand divertissement populaire, bénéficiant d'une reconstitution et de costumes impeccables, de comédiens impliqués et d'un souffle romanesque qui fait oublier les moments de creux.
Couleurs de l'incendie de Clovis Cornillac, en salles le 9 novembre 2022. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes annonces.