[Critique] Plonger de Mélanie Laurent

[Critique] Plonger de Mélanie Laurent

La qualité d’une œuvre se mesure souvent à ce qu’il en reste après être sorti de la salle obscure. Après plusieurs jours, "Plonger" demeure intrigant, tant par son contenu que par sa forme.

Le nouveau film de Mélanie Laurent, Plonger, porte bien son nom. Cette proposition s’avère effectivement une plongée, une plongée dans son univers d’artiste. Il faut bien l’admettre, le spectateur n’en sort pas tout à fait indemne, mais il ressent beaucoup de choses, et c’est bien la force de ce film.

La réalisatrice, Mélanie Laurent, dit du roman d’Ono-dit-Biot qu’elle en conserve des moments. Elle réussit ce pari à l’écran. Plonger est un drame qui relate une d’histoire d’amour total entre Paz, jolie photographe espagnole et César, ancien reporteur de guerre.

Une mise en scène d'une grande justesse

Il y a du Terrence Malick dans le cinéma de Mélanie Laurent. Tout comme lui, elle se donne le défi d’exprimer l’indicible en exploitant tout ce que peut offrir la matière cinématographique pour faire sens. Lors du début du film, la réalisatrice tire parfaitement profil du montage pour faire vivre l’idylle de la rencontre amoureuse. Sans continuité spatiale et temporelle, ce montage ne restitue que des instants, quelques minutes dans une voiture où résonne le son de la voix de César pour séduire Paz, des discussions passionnées en divers lieux, des plaisirs charnels dans une chambre ou ailleurs.

critique Plonger de Mélanie Laurent

Par ce procédé, la cinéaste évoque infailliblement l’aspect éphémère de l’amour qui passe presque immédiatement de moments vécus à souvenirs gravés. Ou encore en utilisant la méthode du plan-séquence pour représenter la sensation d’enfermement de Paz dans son appartement. Et enfin, pour éprouver les sentiments d’un artiste, dans une scène magnifique où le son d’une interview de Jacques Brel recouvre les pas de Paz.

Un scénario pas conventionnel

Hitchcock disait :

Si vous voulez montrer deux hommes qui luttent ensemble, vous n’obtiendrez rien de bon en photographiant simplement cette lutte. La réalité photographiée devient la plupart du temps irréelle. La seule solution est d’entrer dans la bagarre pour la faire ressentir au public et à ce moment-là vous obtenez la vraie réalité.

Et bien dans son œuvre Mélanie Laurent plonge dans la lutte de ses personnages.

Certes, le traitement de l’histoire est déstabilisant, ce n’est pas le type de film qui prend docilement le spectateur par la main pour lui faire suivre la trajectoire d’un personnage. Ce film se découpe plutôt en deux tableaux. Le premier suit Paz et fait partager ce qui l’habite et l’anime. Et au moment où le public s’attache le plus à elle, elle disparaît, créant un sentiment de frustration insupportable. C’est à ce moment-là que commence le deuxième tableau qui suit cette fois César, partie sur les traces de Paz.

critique Plonger de Mélanie Laurent

Mais cette frustration est partagée entre César et le spectateur. Les deux vivent à cet instant du film le même sentiment d’absence et d’incompréhension. Une fois encore, Mélanie Laurent donne à son spectateur le ressenti d’une séparation et d’un manque.

Un casting très réussi

La réussite de la mise en scène est aussi à partager avec la réussite du casting. Maria Valverde incarne parfaitement la beauté et le charme de la belle Espagnole. Celle d’une jeune femme à l’accent craquant, à la beauté un brin sauvage, aux courbes sensuelles et à l’attitude insouciante, mais également qui cache une vraie fragilité et une sensibilité. Et Gilles Lellouche, lui, renvoie l’image d’un homme fort et solide, mais qui comme tout être humain peut ressentir des choses et par moment s’effondrer. Il apparaît bouleversant.

Donc oui, oui la qualité d’un film se mesure à ce qu’il en reste après être sorti de la salle obscure. Nul doute que nombre de spectateurs sortiront de ce film déstabilisés, ne sachant pas trop quoi penser, ayant adoré des moments et étant frustrés par d’autres. Mais au fil du temps, avec du recul à mesure que des scènes reviennent, on se dira que c’était un très bon film, une vraie expérience, une plongée.

 

Plonger de Mélanie Laurent, en salle le 29 novembre 2017. Ci-dessous la bande-annonce.

Conclusion

Note de la rédaction

"Plonger" est avant tout une oeuvre singulière qui mérite d'être vue pour ce qu'elle provoque.

Bilan très positif

Note spectateur : Sois le premier