Elyas : Roschdy Zem survit dans un thriller d'action aussi brutal que raté

Elyas : Roschdy Zem survit dans un thriller d'action aussi brutal que raté

CRITIQUE / AVIS FILM : Malgré l'implication de Roschdy Zem en ex-militaire protecteur aussi dangereux que brutal, "Elyas" de Florent Emilio-Siri se noie dans le trop-plein de références hollywoodiennes qu'il invoque. Et aucune baston, même la plus réjouissante possible, ne peut faire tenir un film qui n'a aucune colonne vertébrale....

Le retour de Florent Emilio-Siri

Le scénariste et réalisateur Florent Emilio-Siri a un talent indéniable, qu'il a prouvé tôt et de manière éclatante avec Nid de guêpes en 2001. Un thriller d'action étouffant et spectaculaire, comparé à raison à Assaut de John Carpenter et nourri d'inspirations américaines, que le réalisateur charge aussi d'une matière politique et sociale en continuité avec son premier film Une minute de silence. Après quatre autres films, Otage, L'Ennemi intime, ClocloPension complète, et la série Netflix Marseille, on ne l'avait ainsi plus vu à l'oeuvre depuis 2016.

Une parenthèse maintenant refermée, puisque Florent Emilio-Siri est de retour avec Elyas, un thriller d'action ultra-bourrin. Et dans lequel malheureusement seul Roschdy Zem apparaît au niveau attendu d'un long-métrage de ce genre, et de ce réalisateur.

Elyas (Roschdy Zem) - Elyas
Elyas (Roschdy Zem) - Elyas ©Studiocanal

Roschdy Zem surnage

Allons-y franchement : Elyas est raté. Et ce n'est paradoxalement pas faute d'avoir essayé. Florent Emilio-Siri raconte l'histoire d'Elyas, un ancien membre des forces spéciales et "chuteur opérationnel" (ça aura son importance) qui souffre d'un terrible stress post-traumatique. Vivant dans un foyer, travaillant vaguement comme garde du corps ça et là, il est contacté par un ami et ancien frère d'armes pour protéger la femme et la fille d'un prince émirati durant leur séjour en France. Problème, une fois arrivé dans le château où cette famille loge, l'équipe de sécurité qu'il rejoint semble avoir un bien sombre plan... Quand un commando attaque les lieux, Elyas va tout faire pour protéger Amina (Laëtitia Eïdo) et Nour (Jeanne Michel), sa fille âgé de 13 ans.

La première partie du film rappelle Nid de guêpes, avec ce lieu et ses occupants assaillis, et un Elyas qui ressemble au Creasy de Man on Fire de Tony Scott. Une référence largement assumée, avec plutôt que la souffrance de l'alcoolisme et celle des remords d'une vie violente, une paranoïa dangereuse et une grande détresse psychique. Roschdy Zem, impérial dans son personnage taciturne et sur le fil de la démence, se montre très vite létal, hyper efficace dans la tuerie façon John Wick. Physiquement, comme dans les quelques dialogues qu'il n'arrive pas à fuir, l'acteur montre que ce type de performances et de rôles, dont il s'est pourtant éloigné, lui va toujours comme un gant.

Trop de films et de thèmes

Ainsi, la première partie du film est plutôt réussie, diffusant jusqu'à l'assaut du commando un flou séduisant. Narré depuis son point de vue, le film retarde la réponse à la question de savoir si Elyas est extra-lucide ou si sa paranoïa l'a rendu fou à lier. Mais lorsqu'il est finalement établi qu'Elyas, malgré sa lourde instabilité, dit et agit vrai, le film, tout en tentant de rester dans la ligne Man on Fire, devient autre chose. En effet, les péripéties vont s'empiler frénétiquement, comme les références auxquelles Florent Emilio-Siri souhaite se raccrocher. Il y a donc du John Wick, du Léon, du Tyler Rake aussi, au moment où le film de home invasion devient un film de sauvetage et d'extraction, déplacé dans un pays étranger pour qu'Elyas s'offre une "chute opérationnelle", qui n'est pas du tout spectaculaire malgré son intention.

Elyas (Roschdy Zem) - Elyas
Elyas (Roschdy Zem) - Elyas ©Studiocanal

Avec toutes ces inspirations s'ouvre une grande foire aux thèmes qui casse la tête. Affaire d'État, trahison familiale, amitié et loyauté, sacrifice et rédemption, deepfakes, crise migratoire... C'est trop, beaucoup trop pour un personnage qui aurait pu s'occuper de tout ça sur plusieurs films, au lieu de tout condenser et survoler en 1h39.

Un nouveau film si vieux

La promesse était intéressante. Et peut-être qu'il y a dix ans, avant le standard pot-pourri (pourri) imposé par le streaming pour fédérer le plus grand nombre de spectateurs, Elyas aurait été différent, plus frugal dans son approche, plus "à l'os" et moins superficiel. Florent Emilio-Siri, qui travaille ici avec son équipe historique, Olivier Gajan au montage et Giovanni Fiore Coltellacci à la photographie, Mimi Lempicka aux costumes et Alexandre Desplat à la musique - ne manque que Benoît Magimel-, pensait sans doute faire quelque chose de neuf et original. Hélas, c'est plutôt un mélange déséquilibré de vieilles recettes essorées et de personnages stéréotypés au possible, sorte de réminiscence des productions de ce genre d'EuropaCorp.

Les coups de feu et de poing, la rage mystérieuse d'Elyas - dont on découvre classiquement et sans surprise la cause par le récit de son ami dans la troisième partie du film -, empêchent de s'ennuyer complètement et de s'endormir. Mais tout est si cousu de fil blanc qu'on ne s'étonne jamais de rien, condamné à attendre qu'Elyas ait fini de faire ce qu'il a à faire. Ah si, on se fait surprendre par un point : Dimitri Storoge, qu'on a trop l'habitude de voir se révéler être le méchant dans de mauvais films, ne l'est pas dans Elyas. Qui lui reste néanmoins mauvais.

Elyas de Florent Emilio-Siri, en salles le 3 juillet 2024. Ci-dessus la bande-annonce.

Conclusion

Note de la rédaction

Roschdy Zem fait le job en ex-militaire traumatisé et paranoïaque dans "Elyas", thriller d'action violent et brutal de Florent Emilio-Siri et cocktail vite écoeurant qui mélange du "Man on Fire", du "John Wick" et même du "Tyler Rake". La poignée de séquences d'action réjouissantes ne sauve malheureusement pas le film des pièges mortelles de son écriture caricaturale et incohérente. À éviter.

Note spectateur : 4 (1 notes)