Funan : une lutte familiale sous les Khmers rouges

Funan : une lutte familiale sous les Khmers rouges

CRITIQUE FILM - En 1975, le Cambodge arrive à la fin d'une guerre civile de huit ans, prise dans le bourbier de l'interminable Guerre du Vietnam. Suite à cette spirale de violence, un des régimes les plus meurtriers de l'époque contemporaine, les Khmers rouges, prennent le pouvoir. C'est dans ce contexte que se déroule Funan.

La vie paisible de Chou et Khuon se voit bouleversée par l'arrivée au pouvoir des Khmers rouges. Leur quotidien rejoint celui de nombreux Cambogdiens : fuir les villes, vidées de force, sur de longues routes de campagnes. Une marche forcée qui vire au drame, les parents étant séparés de leur fils lors d'un mouvement de foule. Ce dernier va se retrouver seul avec sa grand-mère, dans un camp de "rééducation" éloigné de celui de ses parents.

L'histoire que nous narre Denis Ho, dont Funan est le premier long-métrage, est un récit imprègne d'un passé familial douloureux. Tout en étant romancé, il s'influence ainsi fortement d'une partie de la vie de sa mère (et, on suppose, d'un éventuel grand-frère). En résulte un film aux personnages extrêmement attachants, dont on partage avec empathie le malheur.

L'histoire nous est racontée grâce à une esthétique simple mais efficace. Fausse 2D, Denis Ho et son équipe n'hésitent pas à sublimer les paysages cambodgiens avec des plans qui ressemblent parfois à des peintures. On regrette que l'animation soit parfois un peu saccadée, mais l'effet se fait oublier assez vite (un peu comme pour le récent et très bon Spider-man : New Generation, qui était beaucoup plus compliqué techniquement).

Au niveau du casting vocal, on retrouve avec étonnement deux acteurs loin d'être inconnus : Bérénice Bejo et Louis Garrel. Bien que le timbre de leurs voix soit reconnaissable, ils s'effacent assez vite derrière les personnages, et participent à les rendre tangibles. Non seulement ils font parfaitement corps avec les deux parents, mais en plus ils permettent de les rendre d'autant plus attachants.

Les camps de travaux

La majeure partie du film se déroule dans un camp de travaux, lieu commun à de nombreux films. De Furyo au Pont de la rivière Kwai en passant par Rambo IV, la guerre en Asie passe souvent par ces lieux peu hospitaliers. Funan y installe ainsi ses personnages pendant toute la partie centrale du long-métrage, nous enfermant avec eux dans un lieu paradoxalement ouvert, mais sans échappatoires ... Des enfants enrôlés aux séances de torture, l'horreur de la guerre nous est montrée dans sa monstrueuse diversité. Cependant, le film reste assez pudique face à cette horreur.

Critique Funan : une lutte familiale sous les Khmers rouges

Lui reprocher d'être timoré dans sa représentation de la violence ne serait cependant pas totalement honnête, puisqu'on imagine à quel point produire un film du genre doit être un parcours semé d'embûches. Il doit pouvoir s'adresser à un public large, et donc prendre en compte un public jeune. Ce faisant, Funan participe à mettre en lumière l'horreur subie par les cambodgiens pendant de nombreuses années.

Des événements très peu représentés sur grand écran, tout comme le Cambodge lui-même. A peine quelques documentaires et quelques longs-métrages se sont intéréssés au sujets, tels La Déchirure de Roland Joffé, ou Le Temps des aveux de Régis WargnierDenis Ho, avec Funan, participe ainsi à un effort de mémoire, qu'on ne peut que trouver salutaire.

 

Funan de Denis Do, en salle le 6 mars 2019. Ci-dessus, la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.

Conclusion

Note de la rédaction

"Funan" est donc un récit touchant, parfois fragile, et éminemment personnel, parcouru d'images marquantes.

Note spectateur : Sois le premier