Heart of a Dog : à ces absents pour toujours

Heart of a Dog : à ces absents pour toujours

Pour son unique film, l'artiste Laurie Anderson franchit toutes les frontières du cinéma traditionnel et apporte à cet ovni, "Heart of a Dog", son lot d'étrangetés et de moments insaisissables, maintenus dans le temps. Trop personnel, peut-être, unique sûrement.

À l'image de notre Jean-Luc Godard post-années 2000, l'artiste et musicienne américaine Laurie Anderson ne sera jamais là où on l'attend. Veuve de Lou Reed (à qui elle dédie le film dont il est question ici), la cinéaste (à ses heures perdues) a monté des heures d'images, enregistrées parfois avec préméditation, souvent sur le vif, mais aussi de nombreuses photos d'antan. Le tout mélangé, cela donne Heart of a Dog, film expérimental à la réalisation, l'écriture et à la production à l'image de son auteure. Hors du temps.

Puisque si depuis les années 80, Anderson est qualifiée d'avant-gardiste, c'est pour sa capacité à avancer au delà de toutes modes, dans sa propre réalité. Manifestement, Heart of a Dog ne fait pas l'exception à cette règle d'or. Le film débute sur la mort importante du terrier d'Anderson, nommée Lolabelle. Cette disparition encadre le long métrage comme le thème d'une exposition : l'artiste se permet donc de s'en éloigner, de temps en temps, pour divaguer ailleurs, sur des thèmes plus généraux. Le climat de surveillance, le 11 septembre, le terrorisme, la religion bouddhiste, son enfance... tant d'éléments qui parsèment ce home-movie sans équivoque. Le spectateur, naturellement, se perd un peu.

Les limites du récit 

Heart of a Dog, en plus d'être un troublant documentaire, résiste à toute forme de traditionalisme. Le montage, dense et épars, enchaîne des scènes qui n'ont souvent pas de rapport entre elles. Si ce n'est cette voix, hypnotique, reine du film ; celle de Laurie Anderson. Seule entité "physiquement palpable" du film, elle raconte, décrit, souffle les moindres détails qui pourraient nous aider à comprendre ce qu'il se passe à l'écran. Et tout ceci est fort bien réussi, puisqu'il est donc possible de s'y investir.

Bien que déroutant, Heart of a Dog captive donc de son audace, de son incroyable originalité. Comme au début, le film se termine sur un ultime hommage à Lolabelle. Un message d'amour pour la pensée animale - filigrane de la pensée humaine - est ainsi délivré, et l'onirisme prend une dernière fois le dessus. Sur un plan enneigé, Laurie Anderson ferme ce journal intime d'1h15 sans vraiment y apporter une fin. Mais y'a t-il eu un début ? On ne sait pas. Décrochant assurément le titre du film le plus étrange de cette année, Heart of a Dog est assurément une expérience à vivre au cinéma, qui rend hommage à ces disparus, au temps perdu, aux souvenirs. Et en plus, c'est la voix, enchanteresse, magnétique, du regretté Lou Reed, qui le clôt.

Heart of a Dog de Laurie Anderson, en salles le 27 mars. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.

Conclusion

Note de la rédaction

"Heart of a Dog", en plus d'être un troublant documentaire, résiste au traditionalisme qui encadre souvent le septième art. Une œuvre à part.

Note spectateur : Sois le premier