Je ne suis pas un héros : Vincent Dedienne touchant en délicat avocat

La gentillesse n’est pas toujours un défaut

Qu’il est réjouissant de voir à l’écran un héros se libérer de ses chaînes et de ses carcans ! Et encore plus lorsque le sujet abordé - la maladie - l'est avec humour et délicatesse. Dans Je ne suis pas un héros , Rudy Milstein et son coscénariste Théo Courtial offrent un très beau rôle à Vincent Dedienne, qui interprète Louis, avocat junior dans un cabinet important.

Il n’est qu’un avocat parmi tant d’autres, avec la fâcheuse manie inhibée de ceux qui traversent la vie sans l’imprimer. C’est un vrai gentil maladroit, gaffeur et hésitant, qui tend des mains que personne ne saisit. Même la lumière automatique des toilettes ne détecte pas sa présence.

Louis n’essaye pas de s’imposer, car il n’a tout bonnement jamais appris. Le spectateur empathique comprend mieux sa position en rencontrant les parents avocats de Louis. Coincé en sandwich entre les deux trop occupés à gérer leurs propres ambitions et leur conflit incessant. Des ambitions déçues mêlées d’une grande frustration pour Isabelle (Isabelle Nanty) et assumées d’un trop plein de relations pour Thierry (Sam Karmann). Ils ont fait de Louis un être transparent, se tenant gentiment à l'écart.

Car Je ne suis pas un héros raconte avec brio la façon dont un homme va sortir de l’ombre, prendre sa place au monde et faire ses choix. Comment il va s’affirmer dans la société, dans son entreprise, dans ses propres valeurs et surtout dans sa vie personnelle. Le réalisateur pousse évidemment sa démonstration le plus loin possible, mais avec un humour si subtil qu’il rend Louis, et tous ceux pour qui il va prendre fait et cause, encore plus attachants.

Un homme inhibé face à trois femmes à la forte personnalité

À la faveur d’un diagnostic erroné, Louis se croit donc un temps atteint d’un cancer. Avec surprise, il assiste au changement de regard et de comportement de son entourage. S'il recueille parfois de la pitié, certaines réactions ne sont pas pour lui déplaire, comme celle d’Elsa (Clémence Poésy), qui commence à le voir et à reconnaître ses compétences. Profitant de l’opportunité de la situation, elle lui confie la négociation d'indemnités pour un client important, accusé d'être à l’origine de cancers.

Le cabinet veut éviter le procès demandé par les malades, dont Hélène (Géraldine Nakache) est le porte-parole cash au langage très fleuri. Louis fait aussi connaissance avec l'émouvant Julien (Rabat Naït Oufella), dont il partage le rêve. Si Louis prend de plus en plus de poids dans le cabinet, a-t-il pour autant trouvé sa place ? L’annonce faite aux parents intervient presque un peu trop tard dans Je ne suis pas un héros, privant le héros d’autres moments de rééquilibrage avec eux.

La bonne trouvaille de Je ne suis pas un héros est indéniablement la présence du voisin de Louis, Bruno (interprété par Rudy Milstein lui-même). Ce personnage brut de décoffrage fait beaucoup rire en disant tout ce qu’il pense, sans filtre émotionnel aucun. Tel l’alter ego du spectateur, il analyse et voit Louis s’enferrer peu à peu dans un mensonge duquel il ne semble pas pouvoir s’échapper.

Surtout lorsqu'il s'agit pour Louis de croiser l’amour. Car le film interroge évidemment sur l’impact de la vérité, comme en résonance avec l’affaire dont s’occupe Louis. Quel est ainsi le prix à payer pour assumer de dire la vérité? Faut-il prendre le risque de renoncer à tout ce que le mensonge a permis et de blesser les gens qu’on aime? Le film parvient très bien à saisir le conflit intérieur de valeurs qui traverse Louis, dont le questionnement et les doutes font sens.

Grâce aux dialogues qui font mouche et au comique subtil des situations sur le fil, Je ne suis pas un héros se révèle donc un film enthousiasmant qui fait habilement réfléchir à la maladie, l'éducation et à la justice. 

Je ne suis pas un héros de Rudy Milstein, en salles le 22 novembre 2023. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.