Moins d’un mois après la sortie de "Thor : Ragnarok", les super-héros de DC répondent à Marvel avec "Justice League", pour un résultat tout aussi peu convaincant.
On n'avait pas mal d’attente concernant Justice League, le film qui allait réunir Batman, Wonder Woman, Flash, Aquaman et Cyborg. Et ce, même si les images promotionnelles n’étaient pas très rassurantes quant à l’aspect visuel du film. Connaissant le père Zack Snyder, on savait à quoi s’attendre. Mais finalement, si le film est une véritable déception, ce n’est pas tellement à cause du style du cinéaste, qui semble être plus effacé qu’autre chose de cette équipe.
Zack Whedon
Sur le papier, Justice League est un film de Zack Snyder. Et a priori, ce n’est pas parce que le cinéaste a dû quitter la production avant sa fin, suite à un drame familial, et que Joss Whedon (Avengers) a été appelé en catastrophe, que le résultat final devrait laisser penser le contraire. Pourtant, Justice League offre une sensation bien étrange, pour quiconque connaîtrait un peu le travail de Snyder. En effet, qu’on l’apprécie ou non (et dieu sait si l’auteur de ces lignes n’est pas son plus grand fan), il faut accorder à Zack Snyder une patte singulière et reconnaissable.
Devant ce film, cette patte semble malheureusement s’être évaporée. Ressemblant davantage à une pale copie peu inspirée du style du cinéaste - comme ces images insipides et fastidieuses qui ouvrent le film avec en fond une très mauvaise reprise pop d'Everybody knows de Leonard Cohen. Certes, les idées sont là, mais l’image ne parvient jamais à retranscrire les sensations attendues. Car il ne suffit pas de filmer une situation, sur le papier dantesque, mais bien d’en tirer quelque chose de grandiose et de rythmé. Ce qu’a toujours su faire, jusqu'ici, Zack Snyder, loin d’être le réalisateur le plus subtil. On s’étonne ainsi, par exemple, de ne pas retrouver certains gimmick, tels que ses ralentis hyper stylisés facilement reconnaissables.
Une laideur visuelle
La présence de Whedon aurait-elle alors eu autant d’influence ? Difficile à dire. Reste que devant le montage laborieux proposé, on ne voit pas sur qui d’autre remettre la faute. En effet, Justice League voit ses séquences s’enchaîner sans réelles cohérences. Certaines scènes parvenant même à multiplier les faux raccords dans le décor (coucou le champ/contre champ sur la plage entre Bruce et Aquaman) comme dans les mouvements de caméra. Et ce, dès l’une des premières scènes, qui voit les Amazones combattre à coup de cures dents le méchant du film, Steppenwolf. Mixer à cela une photographie laide et une luminosité réduite au minimum, ainsi que des choix de cadre ne mettant pas vraiment en valeur les protagonistes, difficile de se sentir impressionné.
Alors qu’avec 300 ou Sucker Punch Zack Snyder parvenait à en mettre plein les yeux à coup d’images symboliques, il ne ressort de Justice League qu’un gloubi glouba foutraque. À croire parfois même qu’il tend le bâton pour se faire battre. Autant visuellement, avec donc cette débauche numérique digne d’une série B - où tout semble tourné sur fond vert -, que dans le récit proposé.
Le Avengers de chez DC
Si on voulait résumer l’histoire de Justice League en évitant tout spoiler, on dirait que Batman réunit des super-héros pour empêcher le terrible Steppenwolf de déchaîner les forces du mal. En réalité, si on s’autorisait des spoilers, il n’y aurait pas grand-chose d’autre à rajouter tant le film se révèle creux et inintéressant. Étant donné l’enchaînement de certains passages, on se demanderait bien si des pages du script n’ont pas été arrachées.
Mais même là, cela ne justifierait pas l’aspect ultra lisse du film, et son absence de profondeur. À mille lieux de Batman v Superman qui, bien que décevant dans sa version cinéma, faisait preuve d’ambition dans les thématiques abordées. Ici, on verra bien tendre des questionnements sur le statut du super-héros, et l’espoir qu’il peut offrir en tant qu’objet d’inspiration. Mais au-delà, Justice League n’est finalement qu’aussi formaté qu’un Avengers : L’Ère d'Ultron.
N’ayant pas eu le temps d’introduire ses différents personnages, le film apparaît même tiraillé. Hésitant entre une œuvre interminable qui développerait Aquaman, Flash et Cyborg, et un besoin de les expédier pour se maintenir sur le récit de base. Il en ressort alors un profond ennuie durant la première heure du film, marquée par des facilités scénaristiques impressionnantes.
Le moment de passer à autre chose ?
Si ces nouveaux super-héros peinent donc à se faire une véritable place – Flash amusera un temps seulement -, il en va de même pour les « anciens ». Car si Wonder Woman n’en est réduite qu’à être charmante en souriant devant la caméra (pour le personnage badass et féministe on repassera), Bruce Wayne n’apporte pas davantage d’émotion. Limité finalement à être un pseudo-leader blasé et bodybuildé, pour lequel on n’aura toujours pas la moindre empathie. Celle-ci est alors créée artificiellement, que ce soit par l’inutile Lois Lane, ou par une famille soviétique aux premières loges de l’attaque de Steppenwolf, sur laquelle la dernière partie insiste longuement, mais dont on se fout royalement.
Un peu à l’image de l'ensemble. Car si la dernière partie, fameuse grande bataille finale, évite la surenchère, son absence d’idées originales (un bouclier géant façon La Menace fantôme, un ralenti façon Quicksilver dans X-Men) et même d’ennemi charismatique, ne valent pas qu’on bondisse de son siège. C’est donc un nouveau raté pour DC et Warner, qui après cinq films semblent toujours incapables de tenir cet univers. Il serait peut-être temps d’essayer autre chose. La présence sur Aquaman de James Wan, réalisateur à la personnalité plus marquée que Patty Jenkins, pourrait éventuellement redonner un souffle à des héros déjà en fin de course. C’est du moins ce qu’on espère.
Justice League de Zack Snyder, en salle le 15 novembre 2017. Ci-dessus la bande-annonce.