CRITIQUE / AVIS FILM – Dans "L’Affaire Collini", un jeune avocat doit défendre l’assassin de l’homme qui l’a élevé. Le procès va mettre en lumière une page sombre de la justice allemande.
L’Affaire Collini : portrait d’un jeune avocat idéaliste
Deux scènes de l’ouverture de L’Affaire Collini donnent le ton. Dans la première, un homme monte dans une chambre d’hôtel pour en abattre un autre de sang-froid. Dans la deuxième, un boxeur lutte contre son adversaire.
L’assassin est Fabrizio Collini (Franco Nero), et sa victime est un industriel de la haute société allemande, Hans Meyer (Manfred Zapatka). Le combattant est Caspar Leinen (Elyas M’Barek), un avocat inexpérimenté qui a été éduqué par Meyer et qui va devoir défendre Collini pour sa première grosse affaire.
Dès les premières minutes, le long-métrage de Marco Kreuzpaintner met de côté toute subtilité. Le réalisateur opte dans cette introduction pour une parabole grossière de l’affrontement qui va suivre. Par la suite, L’Affaire Collini joue sur le dilemme personnel qui tiraille le défenseur, à l’image de nombreuses références du film de procès (Le Verdict, Philadelphia).
Le cheminement de Caspar occupe une place fondamentale dans la première partie du récit. Le jeune avocat idéaliste doit-il rester fidèle à l’homme qui l’a élevé et obtenir les aveux de son client ou tenter de découvrir la véritable raison qui l’a poussé à commettre un tel acte ? L’excellente interprétation d’Elyas M’Barek et le soin accordé à l’écriture de son personnage relaient rapidement au second plan une réalisation dénuée de la moindre singularité.
Le faux coupable
Caspar doit donc choisir entre servir la loi ou la justice, entre préserver ses intérêts ou son intégrité. Une fois qu'il a pris sa décision, le meurtre sur lequel il enquête peut enfin révéler ses secrets. À de rares moments dans L’Affaire Collini, Franco Nero fend l’armure de manière bouleversante. Quasiment mutique, l’acteur de Django réussit à intriguer sur le lourd passé de Collini en quelques mots.
Un passé évidemment lié à celui de Hans Meyer et sur lequel l’affiche française en dévoile un peu trop. La meilleure partie du long-métrage demeure sans conteste la dernière, où le visage marqué de Nero lors du procès appuie l’émotion provoquée par des flashback d’une cruauté sans nom.
Elle permet également de pointer du doigt la loi Dreher sans tomber dans le didactisme lourdingue, grâce à des joutes saisissantes entre Caspar et son confrère qui cherche à faire inculper Collini, incarné par Heiner Lauterbach. Promulguée en 1968 et pensée en partie par l’ancien procureur nazi Eduard Dreher, cette loi a prescrit d’innombrables crimes commis durant la Seconde Guerre mondiale.
Malgré ses qualités, L’Affaire Collini a bien du mal à dépasser sa dimension pédagogique, aussi louable soit-elle. Oubliant certains personnages intéressants en cours de route, dont ceux joués par Alexandra Maria Lara et Pia Stutzenstein, se limitant toujours à une réalisation fonctionnelle – excepté lors de l’ultime séquence où Marco Kreuzpaintner sort enfin du cadre attendu pour une touche sentimentale finale, ce film sage et propre mérite surtout le déplacement pour son sujet passionnant.
L’Affaire Collini de Marco Kreuzpaintner, en salles le 27 avril 2022. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.