CRITIQUE / AVIS FILM - Avec "Late Night", la cinéaste Nisha Ganatra signe (enfin) un premier film d'envergure et réunit un casting irrésistible pour cette comédie qui l'est tout autant. Sans surprise, Emma Thompson crève l'écran.
L'époque du Diable s'habille en Prada vous manque ? Pas de panique, en cette fin d'été 2019, la sortie de Late Night est là pour convoquer ce moment incomparable du cinéma américain... Plus particulièrement la comédie, ce genre si particulier et si cher aux States, souvent mis en scène sous les buildings new-yorkais, en plein soleil, établi en un panel de personnages hauts en couleurs, qui sortent de l'ordinaire et qui ont de la jugeote.
La réalisatrice canadienne Nisha Ganatra (à qui on doit essentiellement des épisodes de séries, de Mr. Robot à Brooklyn Nine-Nine en passant par Shameless) propose avec Late Night un gros coup de projecteur sur un des épicentres du showbusiness américain : le "Late Show". Ce milieu qui peut être baigné dans un machisme ambiant, mais qui peut tout autant être régi par un ensemble de figures féminines imposantes. C'est bien évidemment le cas de ce long-métrage, porté par un duo tout simplement renversant. Il y a d'abord l'immense Emma Thompson, qui un peu à l'image de son rôle dans la série choc Years & Years, incarne une personnalité forte : Katherine Newbury, présentatrice robuste mais déboussolée par la concurrence télévisuelle. Puis, il y a Mindy Kaling (Un raccourci dans le temps, Ocean's 8...) qui campe le rôle de la jeune Molly, fraîchement embauchée en tant qu'auteure pour l'émission de Newbury. Deux femmes que tout semble opposer (aussi bien leur génération que leur culture) mais dont l'assemblage pourrait, contre tout attente, engendrer une toute nouvelle ébullition... et sauver le show.
De l'ombre à la lumière
En plus d'être foncièrement drôle, Late Night ne tombe pas dans la facilité et ne s'éternise pas à dépeindre l'ensemble de clichés pouvant entourer la relation avec les deux protagonistes dont l'origine ethnique diffère. Katherine Newbury est blanche, tyrannique et proche du niveau zéro en terme de sensibilité, tandis que Molly est indienne, petite et l'unique femme auteure du service.... Et alors ? Une fois ces deux portraits établis, le film évolue et dans le bon sens. Ganatra, qui voulait à la fois donner de la lumière au métier d'auteur - trop peu représenté - incite également à la collaboration, à l'entraide. Notamment entre deux femmes. "Nous pouvons être nos pires ennemies, ou nous pouvons être des championnes" avait déclaré la cinéaste à ce propos.
Pour le coup, si Late Night présente aussi un casting masculin de haute volée (en haut de la liste, John Lithgow et Hugh Dancy), il est largement éclatant de féminité - et c'est tant mieux. Pour une fois, ce sont des femmes qui évoluent dans leur propre environnement, encouragées par leurs propres rêves et dont les défauts et les qualités ne sont pas sans cesse remis en question par la masculinité. En partant de toutes ces bonnes intentions, Late Night déroule son histoire comme une comédie familiale qui s'apprécie cependant plus que la moyenne, enchaînant les moments de bravoure et l'émotion, sur le plateau comme en coulisses - certes, réalisés avec un certain académisme - mais là n'est pas forcément l'attente que l'on doit avoir de ce cinéma. Une comédie feel good comme on n'en fait plus, qui vaut largement le détour et l'investissement.
Late Night de Nisha Ganatra, en salle le 21 août 2019. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.