CRITIQUE / AVIS FILM - Déjà impressionnant dans "As bestas", Denis Ménochet continue d'impressionner dans "Les Survivants", survival tendu dans lequel il tente de sauver une migrante et lui-même d'une bande de fachos.
La vulnérabilité de Denis Ménochet
Denis Ménochet est un acteur qui en impose. Mais malgré son physique de déménageur, Rodrigo Sorogoyen a eu la bonne idée avec As bestas d'en faire un homme incapable de réagir fasse à la violence et les menaces de ses voisins, deux paysans gringalets d'un petit village de campagne. Un contraste qu'on retrouve dans Les Survivants, autre thriller tendu signé Guillaume Renusson.
Cette fois, le décor est différent. La campagne galicienne laisse place au froid des Alpes italiennes. Une frontière que des réfugiés tentent de traverser pour rejoindre la France. Le danger pour eux sera alors autant la nature que la cruauté des hommes. Car certains se prennent pour des cowboys et partent à la chasse au migrant, estimant qu'ils n'ont "rien à faire dans leur pays".
C'est ce que se disent les trois jeunes fachos que croise Samuel (Denis Ménochet), alors qu'il souhaite s'isoler dans son chalet après un accident qui a couté la vie de sa femme et lui a laissé des séquelles à la jambe. Comme les pécore d'As bestas, ces jeunes ne devraient, a priori, pas faire le poids face à Denis Ménochet. Mais toute l'inquiétude du film réside justement dans la vulnérabilité de cet homme. Dans le fait qu'il soit aux antipodes des action men souvent proposés par le cinéma américain. Guillaume Renusson privilégiant un survival réaliste.
Les Survivants, le thriller avant le social
Aux côtés de Denis Ménochet, Zar Amir Ebrahimi (révélation de Les Nuits de Mashhad), qui interprète une réfugiée afghane que Samuel accepte d'aider, et la raison pour laquelle il se retrouvera pris en chasse, excelle tout autant. Un duo parfaitement complémentaire qui donne au film toute son émotion. On découvre avec eux deux êtres blessés, marqués par des tragédies (ils sont des survivants de leur passé) et qui devront se battre pour survivre. Et malgré les épreuves douloureuses, leur amitié qu'ils nouent au fil des minutes offrira un espoir nécessaire à leur reconstruction.
Évidemment, avec Les Survivants, Guillaume Renusson parle du traitement des migrants et dénonce la xénophobie. Un sujet qu'il incorpore avant tout dans un thriller, plutôt que de proposer un énième drame social. Un choix toujours plus pertinent, comme l'a prouvé le récent R.M.N. de Cristian Mungiu. L'originalité vient également de ce décor de montagne enneigée, rarement utilisé pour un tel sujet. Un lieu qui permet au réalisateur de construire un récit haletant dans une ambiance froide et étouffante sans jamais trop en faire.
Guillaume Renusson se permet tout de même deux séquences virtuoses. Une introduction effrayante, en plan-séquence, qui voit la réfugiée fuir une descente de police. Et un final brutal, durant lequel la caméra reste cette fois aux côtés de Samuel. Un passage d'une grande maîtrise qui rappelle notamment ce que fait de mieux le jeu vidéo (on se croirait presque dans The Last of Us) ou encore la mise en scène immersive de László Nemes, caméra à l'épaule et temps réel. Même s'il n'est pas forcément aussi mémorable que ces œuvres citées, Les Survivants reste un survival d'une efficace redoutable sans défaut notable.
Les Survivants de Guillaume Renusson, en salles le 4 janvier 2023. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.