CRITIQUE / AVIS FILM - " Les Vétos " est un feel good movie familial d’une grande authenticité, qui ouvre les yeux sur le monde méconnu des vétérinaires ruraux. À découvrir en salles le 1er janvier 2020.
Le concept du film Les Vétos n’est pas nouveau, ni même les thèmes abordés dans ce type de films qui fait appel à l’empathie du spectateur face à ces héros du quotidien. On pense notamment à Médecin de campagne, qui aborde la relève difficile des médecins dans les zones rurales désertées. Ou encore à L’école est finie à propos du refus de s’intégrer dans un environnement que l’on n’a pas choisi et de l’adversité qui émane des habitants. Il y a aussi de fortes chances que l’histoire familiale traumatisante et enfouie dans les souvenirs du héros resurgisse à un moment de l’intrigue. Sans compter sur la légitimité dont doit faire preuve le héros et les divers rejets personnels ou collectifs auxquels il est confronté, qui le démotivent.
Et puis, quand le héros comprend qu’il lui est préférable de partir, les personnages antagonistes prennent alors conscience de leur erreur et l’issue positive pointe le bout de son nez. Car on sait que tout ira bien qui finira bien, malgré les nombreuses péripéties sur le chemin. Tout comme on sait que le héros aura beaucoup appris sur lui et fait la découverte de l’humilité et de la reconnexion avec la nature, la famille ou l’enfance, parfois rencontré l’amour et finalement trouvé sa place au monde.
Les Vétos n’échappe donc pas à ces codes classiques du genre de la dramédie sociétale, dont on peut dire que la réalisatrice- scénariste Julie Manoukian n’a vraiment pas lésiné sur le nombre de ces éléments constitutifs. Mais pour son premier film, elle donne à voir la rencontre touchante de deux héros dans un milieu qui n'a pas souvent été mis à l'honneur. La première héroïne, Alexandra (Noémie Schmidt), vient donc de terminer ses brillantes études dans la fameuse école nationale de vétérinaire de Maisons-Alfort, proche de Paris, sa ville d’adoption dont elle loue les multiples potentialités.
Renouer avec ses racines pour mieux envisager le futur
Ambitieuse, la jeune femme a une très haute conscience de sa valeur et de ses qualités et son rêve de faire de la recherche en biologie moléculaire et en épidémiologie est en train de se concrétiser. Elle semble avoir tout misé sur son métier futur, comme pour compenser son enfance brisée et le décès de sa mère. Car Alexandra été obligée de quitter son village natal perdu au fin fond du Morvan et de vivre dans une famille d’accueil. Autant elle a pu passer quelques étés aux côtés de l’oncle maternel Michel (Michel Jonasz), vétérinaire, autant il ne lui serait jamais venu à l’esprit de revenir y vivre et encore moins d'y travailler.
Michel, qui souhaite partir à la retraite, fait pourtant un cadeau empoisonné à Alexandra. Il y aura beaucoup de mensonges et de non-dits entre Michel et sa nièce mais aussi entre Michel et Nico (Clovis Cornillac), son collègue associé, et deuxième héros de Les Vétos. Nico est dévoué et empathique, apprécié de tous, aimant son métier et les gens, autant que leurs bêtes qu’il soigne au point de mettre en danger sa santé et son couple avec Nath (Lilou Fogli, compagne de Clovis Cornillac à la ville). Car Les Vétos portent également un regard critique sur la désertification des campagnes et ses dommages collatéraux, tels le burn-out des vétérinaires ruraux, autant à prendre en compte que celui des médecins.
Alexandra, Nico et le personnel de la clinique vétérinaire se retrouvent donc mis devant le fait accompli et le film évoque d’ailleurs très bien le pouvoir qu'ont les familles sur les enfants, pensant toujours savoir mieux ce qui est bon pour eux, quitte à forcer les vocations. La colère d’Alexandra, qui se sent piégée, est compréhensible, mais elle accepte de rendre service à Nico pendant l’été, le temps pour lui de recruter un vrai remplaçant... mais aussi de lui apprendre son métier.
On regrette un peu que la scénariste n’ait pas fait dans la dentelle de la nuance avec la psychologie d’Alexandra, même si ses choix servent les propos du scénario. Elle l’affuble ainsi d’un caractère si fort, endurcie par les aléas de sa vie, qu’elle ne la fait jamais douter. Elle la montre même assez méprisante envers les gens du cru et ne faisant aucun effort pour s’adapter. Affublée d’un rat comme compagnon de sa solitude, elle est franchement imbuvable. Sauf aux yeux bienveillants de la secrétaire médicale Lila (Carole Franck), qui l’a connue petite, à ceux admiratifs de la fille du bistrotier, qui la suit partout ou à ceux séduits de l’assistant de la clinique. Ceux-là sauront percer l'armure du cœur d'Alexandra et lui faire retrouver son humanité.
La force du film provient, non seulement du casting, mais aussi de la grande authenticité qui s'en dégage, grâce notamment à la validation du scénario par la vétérinaire Laetitia Barlerin. Les scènes de vêlage des vaches sont émouvantes, celles des échanges avec les maîtres et leurs chiens plutôt bien vues et celles avec les escargots d’une originalité jubilatoire. Véritable ode aux vétérinaires ruraux, Les Vétos se révèle donc un feel good movie plein de tendresse, qui réjouira petits et grands.
Les Vétos de Julie Manoukian, en salles le 1er janvier 2020 – Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.