CRITIQUE / AVIS FILM - Avec « Mascarade », Nicolas Bedos signe son quatrième film. Porté par Isabelle Adjani, Pierre Niney, François Cluzet et Marine Vacth, cette nouvelle proposition se présente comme un thriller sophistiqué et classe, mais souvent complaisant.
Mascarade : la fausse dénonciation de Nicolas Bedos
L’histoire de Mascarade raconte comment Adrien (Pierre Niney), un jeune gigolo qui se laisse entretenir par une star du cinéma, Martha (Isabelle Adjani), rencontre la jeune Margot (Marine Vacth). Un croisement inattendu qui va pousser Adrien à remettre en cause son mode de vie pour plaire à la belle Margot. Sauf que cette dernière est une arnaqueuse intelligente et manipulatrice. Elle pousse alors Adrien à lui donner un coup de main pour escroquer Simon (François Cluzet), un riche agent immobilier.
L’idée de Nicolas Bedos est simple : il veut dénoncer l’opulence d’un milieu dominée par l’argent, la superficialité, les faux-semblants et les trahisons. Il cherche à mettre en exergue un mode de vie déconnecté de la réalité, une haute sphère qui ne manque de rien et qui fait l’étalage de sa richesse et de sa puissance.
Il choisit donc la Côte d’Azur comme terrain de jeu. Là où les riches veulent être encore plus riches, et où les super-riches « s’ennuient à crever ». Via le personnage de Margot, grain de sable dans un rouage bien huilé, Nicolas Bedos veut narrer la chute de ce milieu, aveuglé par l’avarice, l’envie et un appétit sans limite. Un monde privilégié, antipathique et humainement dégueulasse, aux relents archaïques et misogynes. Malheureusement, cette dénonciation se traduit parfois en un sentiment irritable et d’imposture à l'encontre du réalisateur.
Un polar assez bien mené
En effet, Bedos veut dénoncer une sphère qu’il connaît et côtoie beaucoup. Et ça sonne donc souvent faux. Avec son budget de 15 millions d’euros et son casting tape-à-l’œil, l’œuvre est inévitablement un étalage bling-bling. Un film ploutocratique, où des bourgeois aux bons mots surjouent dans des rôles miroirs de leur propre existence. La manière dont les personnages se comportent frise l’hypocrisie d’un réalisateur avec une cuillère en argent dans le popotin.
Heureusement, ce dégueulis de richesse pompeux est dilué dans un polar assez bien maîtrisé. Avec Mascarade, Nicolas Bedos met en scène une histoire de trahison plutôt efficace. En s’inspirant de ses aînés - que ce soit Roman Polanski (avec The Ghost Writer notamment), voir même Alfred Hitchcock (sans le même talent), le réalisateur propose un film paranoïaque assez contrôlé, où les faux-semblants et les fausses pistes sont un dominateur commun.
L'influence hollywoodienne
Mascarade touche ainsi du doigt le brio des films noirs hollywoodiens des années 50, avec une bonne dose de comédie noire de mœurs. Il articule tout ça dans une sorte de toile d’araignée complexe. Le spectateur se retrouve plongé dans un jeu d’échec face au réalisateur, où chaque coup fait partie d’un plan plus grand pour perdre la clairvoyance de l’assistance.
L’œuvre bénéficie de retournements de situation inattendus, et d’un twist bienvenu, qui offrent à Mascarade une identité de thriller malin parfois méritée. Nicolas Bedos distille également un style très hollywoodien, qui donne ainsi une nouvelle couleur au cinéma français. Le problème, c’est que Nicolas Bedos étire trop en longueur sa narration. Mascarade s’étiole dans une complaisance artistique et scénaristique poussive, laissant transparaître un rendu global finalement plutôt banal, dont la morale laisse parfois à désirer. Reste une mise en scène élégante qui permet à Mascarade de garder la tête hors de l’eau.
Mascarade de Nicolas Bedos, en salles le 1er novembre 2022. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos vidéos.