CRITIQUE/AVIS FILM - Le film d'animation "Mon ami robot" de Pablo Berger aborde avec intelligence et tendresse l'histoire d'une amitié contrariée, avec un très joli dessin et une exploration de sentiments à la subtilité croissante.
Mon ami robot, aussi simple que fort
Le réalisateur Pablo Berger propose avec Mon ami robot un film aux défis multiples. Au moins deux : réussir un récit muet, et convaincre un public jeune comme adulte. Faiseur d'images accompli, notamment avec le très beau Blancanieves, déjà muet, le cinéaste espagnol adapte ici la bande dessinée américaine Robot Dreams et l'histoire de Dog, un chien qui vit seul à Manhattan.
La solitude lui pèse, alors il achète un jour un robot en kit. Il le monte, et rapidement le chien et le robot deviennent les meilleurs amis du monde. La vie est belle. Mais un jour, après une sortie à la mer où le robot se retrouve immobilisé dans le sable et que la plage est fermée pour l'hiver, Dog doit retourner seul en ville...
Un bijou d'animation
Il n'y a pas d'âge pour apprécier de beaux dessins, et Pablo Berger propose avec Mon ami robot une animation simple et plus "ronde" que le dessin de la bande dessinée. Les couleurs en aplat sont vives et nettes, et avant même de savoir de quoi l'histoire retourne on y trouve une douceur et une lumière réjouissantes. Sans aucun dialogue, c'est aux expressions des animaux et différents robots qui peuplent un New York animé que Pablo Berger confie des sensations, ainsi qu'à une formidable bande originale composée de titres pop et jazz iconiques.
On pouvait craindre une distance au sujet ou un léger ennui induit par la forme muette, c'est tout l'inverse qui se produit, avec une histoire limpide : celle d'une poignante solitude puis d'une amitié touchante, qui parvient à étreindre tous les coeurs avec autant d'instants comiques que de moments plus dramatiques.
Une ode aux amitiés...
L'histoire de Mon ami robot aurait pu être adaptée plus librement, et on pourrait l'imaginer avec un humain et un robot. Mais un humain aurait un sexe, un profil unique, une réalité qui n'aurait sans doute pas l'universalité de Dog. Paradoxalement, débarrassé de ce qui lui ferait une humanité particulière, c'est dans l'expression de sentiments simples universels - la joie et la peine, la solitude et l'amitié, l'excitation et l'ennui - que Mon ami robot déploie une humanité universelle, à même de convaincre le plus endurci des adultes.
Ainsi, Mon ami robot en appelle à la simplicité sur la forme et le fond pour raconter une histoire qui prend à un moment un tournant tragique. Bloqué sur la plage, le robot se met à rêver, plusieurs fois de plusieurs événements différents. Le coeur s'allège lorsqu'on croit qu'il a retrouvé Dog, avant de percevoir que ce n'était qu'un rêve. Et puis, la réalité rattrape la rêverie. L'amitié de Dog et du robot ne dure pas, parce qu'il faut bien, devant son impossibilité, passer à autre chose. Revenir à sa solitude, un temps, puis connaître d'autres amitiés, nouvelles, sans jamais oublier la première, dans un va-et-vient de souvenirs doux-amers.
... présentes et passées
Dog et Robot se retrouveront, enfin ils se reverront, toujours riches de leur amitié, mais sans être à nouveau ensemble. À ce moment, c'est une appréciation pleine mais complexe du temps qui passe qui se fait ressentir. Cette sensation, adulte, qu'on peut se séparer, vivre autre chose, sans pour autant jamais cesser de se connaître et de s'aimer, sans jamais s'oublier.
Simple, touchant dans son histoire et brillant dans sa réalisation, Mon ami robot débute avec humilité pour finir en majesté, ayant fait habilement son chemin jusqu'à l'enfant que chaque adulte est resté dans son coeur. Une réussite, et un film qui renversera les petits comme les grands.
Mon ami robot de Pablo Berger, en salles le 27 décembre 2023. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.