CRITIQUE FILM - Avec son 3ème long métrage "Mon Inconnue", Hugo Gélin interroge sur l’évolution des sentiments amoureux et amicaux dans le temps. Avec François Civil, Joséphine Japy et Benjamin Lavernhe.
Hugo Gélin est un réalisateur dont les sources d’inspiration sont habituellement l’amour et l’amitié, comme dans Demain tout commence ou Comme des frères. C’est sa matière première assumée de feel good movie ou de buddy movie. De ce fait, il flirte avec les bons sentiments qui, s’ils dégoulinent parfois un peu trop, ont néanmoins pour effet de rendre les spectateurs à la sortie de ses films heureux et pleins d’espoirs en la vie... comment pourrait-on l’en blâmer ? Son dernier film Mon Inconnue ne déroge pas à la règle.
La première partie de Mon inconnue est tout à fait à la hauteur de son intention coutumière. Sans temps mort et rythmée, elle donne à voir la rencontre amoureuse et joyeuse au lycée de deux êtres passionnés : Raphaël (François Civil), passionné par l’écriture de son roman de science-fiction. Et Olivia (Joséphine Japy) passionnée par le piano. L’un connaîtra le succès, trouvant l’inspiration dans sa vie de couple pour donner vie à son double littéraire Zoltan. Il entraînera son meilleur ami Félix (Benjamin Lavernhe) dans son aventure en faisant de lui son chauffeur pour le trimbaler de son domicile à sa maison d’édition, en passant par les plateaux télé.
L’autre sera heureuse par procuration du succès de son mari, impliquée dans la relecture des manuscrits de Raphaël, même si on connaît pas précisément les raisons de son propre retrait d’une possible carrière de pianiste : timidité ou succès fulgurant de son compagnon artiste ? Car Mon Inconnue interroge aussi subtilement sur la cohabitation de deux artistes, de leur relation au succès, voire de la jalousie ou des sacrifices de l’un pour l’autre.
Un film qui interroge sur l'essence des sentiments amoureux
Hugo Gélin résume donc en trente minutes leurs dix ans de vie commune qui se dégrade et s’essouffle, dans un quotidien qui les a engouffrés. Avec un déséquilibre de plus en plus flagrant entre Raphaël et Olivia. Car Raphaël est devenu imbu de lui-même, prétentieux et égocentré. Et, un peu comme dans les vases communiquant, Olivia est de moins en moins épanouie et amoureuse. D’aucuns y auraient rajouté un enfant ou deux, mais pas le réalisateur qui, avec son coscénariste Igor Gotesman, a décidé une fois pour toute que les seuls bébés du couple étaient les œuvres de Raphaël. Et qu’il fallait surtout une pirouette originale pour que Raphaël se rende compte qu’il est en train de perdre l’amour de sa vie.
Ce que les deux compères ont trouvé, c’est, rien de moins, un événement surnaturel. Il est déclenché par le choix de Raphaël de la destinée de l’un de ses personnages de roman, choix qui va avoir des conséquences extraordinaires sur son propre couple. Comme dans Jean-Philippe, ou La vie d’une autre, Raphaël se retrouve propulsé dans un monde parallèle. Dans cette uchronie, non seulement il est inconnu du grand public et est un simple professeur de français dans son ancien lycée, mais Olivia est devenue pianiste de renommée mondiale et ne le connaît pas.
Les malentendus de la présence de Raphaël au lycée ou dans la maison d’édition sont alors source de franche rigolade, car il lui faut un peu de temps pour comprendre et détester sa nouvelle vie. Heureusement, il va pouvoir compter sur son fidèle ami Félix, qui n’a pas changé et se montre compréhensif. Il va être d’une grande utilité pour aider Raphaël à (re)conquérir sa belle et revenir à sa vie d’avant. Là encore, Hugo Gélin offre au spectateur la possibilité de se questionner sur le sens, le pouvoir, la durée dans le temps et les limites de l’amitié.
Mais c’est dans la dernière partie de Mon Inconnue que le bât blesse. Poussive, elle pèche par sa longueur et son atonie. Les personnages, en roue libre, cabotinent avec des mimiques à n’en plus finir et des dialogues un peu lourds portent la pâte humoristique de Igor Gostesman, à qui on doit Five. Et même si on saisit bien la démonstration du réalisateur à prouver qu’un tel amour est éternel et peut avoir droit à une seconde chance dans une autre vie, on s’ennuie ferme à voir les tentatives de Raphaël à attirer à nouveau sur lui le regard d’Olivia. Mon Inconnue se révèle donc une comédie romantique inégale, touchante par endroits mais trop longue par d’autres, qui réjouira néanmoins tous les fans du genre et du réalisateur.
Mon inconnue de Hugo Gélin, en salle le 3 avril 2019 – Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.