Mon inséparable : Laure Calamy en mère courage

Mon inséparable : Laure Calamy en mère courage

CRITIQUE / AVIS FILM – Avec son premier long métrage " Mon inséparable ", Anne-Sophie Bailly partage l’émotion des destinées attachantes d’une mère et de son fils porteur de handicap. Avec Laure Calamy.

Une relation fusionnelle

Dans Mon inséparable, la réalisatrice Anne-Sophie Bailly donne à voir la relation entre Mona (Laure Calamy) et son fils trentenaire Joël (Charles Peccia-Galetto). Unis par un amour profond, ils forment un couple indissociable, à l’image des perruches inséparables. Mère célibataire, Mona porte avec abnégation la lourde charge mentale d'organiser toute leur vie autour du handicap de Joël. Dès les premières scènes, le spectateur saisit la forme différente et subtile de leur communication et la complicité de leurs gestes. L’instinct et le corps occupent un espace qui ne laisse pas toujours la place à la parole.

Mon inséparable suit donc la vie en parallèle de Mona, esthéticienne, et de son fils, dans l’environnement protégé d’un Etablissement Social d’Aide par le Travail. Anne-Sophie Bailly, rencontrée à Bordeaux en avant-première, expliquait avoir porté son projet depuis son adolescence. Sa source d'inspiration remontant à une visite faite avec sa mère infirmière dans une maison de retraite.

Y vivait le couple improbable en ce lieu d’une dame octogénaire et de sa fille "en retard". Son âge mental supposé de sept ans ne l’empêchait pas d’avoir un amoureux dans le village voisin. La réalisatrice avait alors « trouvé leur rapport très fusionnel et conflictuel, comme un condensé très fort de ce qu’est l’amour filial et la tension accumulée avec les années ».

Des sujets encore tabous

L’équilibre du duo Mona-Joël se retrouve menacé par deux événements personnels qui le rendent vulnérable. La mère de Mona est en fin de vie à l’hôpital et Joël est amoureux d’Océane (Julie Froger), également en situation de handicap. Un premier miroir se crée alors entre les deux inséparables : celui du bord du gouffre de la relation maternelle. Pour Mona, c'est la fin de son histoire avec sa mère et pour Joël, c'est le début d’une histoire cachée avec une autre femme que sa mère.

D’autant qu’Océane est tombée enceinte. Consciente que ses « questions éthiques vertigineuses appellent dans une certaine mesure une réponse politique », la réalisatrice permet au spectateur de s’interroger avec beaucoup de pudeur. Car la contraception et la naissance ou la sécurité d’un enfant dont les parents sont porteurs de handicap sont peu abordés au cinéma.

Mon inséparable offre au spectateur la possibilité de se mettre à la place de chacun des personnages. Et d’entendre leurs arguments, tous convaincants, autour de la liberté et du consentement. Pour la réalisatrice, « il était plus important que les craintes existent chez les personnages sans qu’elles soient martelées institutionnellement ». Ainsi les inquiétudes de Nathalie (Rebecca Finet) et de Gabriel (Pasquale D’Inca), les parents d’Océane, résonnent avec justesse.

Les réponses institutionnelles sont factuelles, dans la parfaite distance émotionnelle. Elles ne sont ni didactiques, ni moralisatrices. Face à la force insoupçonnée de Joël, l’ambivalence des sentiments de Mona bouscule assurément. Son ressentiment, sa douleur, sa honte et ses réactions sont bouleversants.

Changer le regard avec Mon inséparable

Un second miroir naît alors entre les deux inséparables : celui de la vie intime. Joël la découvre avec Océane et Mona s’autorise à la redécouvrir avec Franck (Geert Van Rampelberg). Mon inséparable réussit très bien à montrer comment, peu à peu, les miroirs de vie entre Mona et Joël les éloignent. Car le film évoque l’affranchissement et le respect mutuels d’inséparables qui décident d’ouvrir leur cœur à d’autres.

Mon inséparable doit évidemment beaucoup au duo crédible « qui mêle rugosité et affrontement sans perdre la tendresse ». Laure Calamy met sa profonde sensibilité au service de son personnage. Et Charles Peccia-Galetto est remarquable dans son premier rôle. Anne-Sophie Bailly n’a jamais envisagé un acteur sans handicap, car « son film ne pouvait pas ne pas travailler à une représentation ». Pour autant, elle n’a pas choisi Charles « en fonction de son handicap. Mais bien en raison de sa faim de jeu absolu et sa ressemblance avec son personnage dans sa façon de vouloir s’affirmer ».

Le comédien est d’ailleurs le premier acteur en situation de handicap cité aux César, puisqu’il fait partie des 16 Révélations 2025. Mon inséparable se révèle donc un film très émouvant, qui aborde le sujet intime de l'amour absolu, de la confiance et de l’admiration des mères envers leurs enfants différents.

Mon inséparable d'Anne-Sophie Bailly, en salles le 25 décembre 2024. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.

Conclusion

Note de la Rédaction

"Mon inséparable" montre subtilement comment vacille une relation fusionnelle entre une mère (Laure Calamy, exceptionnelle) et son fils porteur de handicap (Charles Peccia-Galetto, Révélation des César 2025).

Note spectateur : Sois le premier