CRITIQUE / AVIS FILM - Jared Leto devient le visage de Morbius dans un film de super-héros terriblement banal et finalement moins passionnant que les nombreuses bandes-annonces.
Vampire, vous avez dit vampire ?
Tandis que le Marvel Cinematic Universe (MCU) continue de ravir les fans à chaque nouveau film, son « petit frère » qu’est en quelque sorte le Sony’s Spider-Man Universe continue de laisser perplexe. Pour rappel, si la grande majorité des personnages issus des comics Marvel appartient désormais à Disney, Sony continue de faire de la résistance avec les droits de Spider-Man. Un deal a tout de même permis au MCU d’utiliser l’homme-araignée sous les traits de Tom Holland.
A côté, Sony a voulu se concentrer sur des antagonistes issus de l’univers de Spider-Man. C’est ainsi qu’est né Venom en 2018, porté par Tom Hardy. Un succès impressionnant (plus de 850 millions de dollars au box-office mondial), malgré des critiques assassines, et qui donna lieu à un second opus (sorti en fin d’année 2021).
Pour continuer d’avancer avec cet univers, Sony propose cette fois Morbius. L’histoire de Michael Morbius (Jared Leto), un biochimiste atteint d’une maladie du sang. Pour tenter de se soigner, il s’injecte un produit qui le transforme en une sorte de vampire. Ainsi, bien qu’il ait désormais des capacités physiques hors normes, il est surtout obligé de se nourrir de sang.
Un sentiment de déjà vu
N'y allons pas par quatre chemins, Morbius est d’une banalité affligeante. Alors que Venom avait au moins pour lui une certaine dose d’humour, le nouveau film super-héroïque de Sony s’enfonce dans un sérieux malheureux. Non pas qu’on soit particulièrement friand du style « comédie d’action » proposé par le MCU. The Batman est par exemple loin de jouer la carte de la rigolade, et est pourtant probablement le meilleur film avec un super-héros depuis des années.
Mais le réel problème de Morbius est qu’il suit un chemin déjà tracé moult fois auparavant. Une origin story classique et sans surprise qui consiste à mettre en place la transformation du docteur suite à une expérience ratée, sa compréhension de ses pouvoirs, et un passage par un affrontement titanesque avant d’atteindre le statut de héros.
Si ce développement vous rappelle quelque chose, ce n'est pas tout. Pour accompagner le personnage, il y a évidemment un love interest : sa collègue Martine Bancroft (Adria Arjona, sympathique, mais limitée à un rôle anecdotique). Mais également une figure paternelle (Jared Harris) présente dès l’enfance du protagoniste. Et enfin, on retrouve face à Morbius un ennemi qu’on voit venir à des kilomètres. Un adversaire miroir de Michael, mais à la moralité plus clivante.
En cela, le long-métrage ne cherche à aucun moment la moindre originalité. Bien dommage étant donné le matériau de base. Comme Venom, Morbius est en premier lieu un anti-héros des comics Marvel. Un personnage qui, par sa condition de vampire, est amené à faire du mal - en se nourrissant de sang humain donc. Mais, encore une fois, Sony préfère alléger sa part sombre et ne fait rien de la thématique du vampire qui aurait pu permettre de titiller un peu les codes.
Morbius ne vole pas bien haut
Bien que l’ennui domine durant la majorité du film, on peut au moins compter sur la présence de Matt Smith. Si Jared Leto n'offre rien de mémorable, sans pour autant être agaçant, son collègue, lui, n’hésite pas à en faire des caisses pour réveiller l’audience. Car ce n’est certainement pas avec ses scènes d’action vieillottes et illisibles que Morbius parvient à capter notre attention.
Il est finalement presque fascinant de voir la capacité de Sony à engager des réalisateurs avec du potentiel et de n’en tirer aucune personnalité. Sans être un grand cinéaste, Daniel Espinosa avait tout de même offert l’efficace Life : Origine inconnue (2017). On était donc en droit d’attendre un film un brin tendu et inquiétant.
Comme Andy Serkis avec Venom 2, la présence du réalisateur ne se remarque finalement qu’au générique. Il faut dire que le montage proposé n’aide pas à laisser entrevoir la moindre patte du cinéaste. On assiste notamment dans le final à un brouhaha visuel pour amener les personnages d’un point A, à un point B, sans avoir à s’embarrasser d’une véritable cohérence. Mais malgré cet ensemble excessivement plat, le plus désolant réside dans le marketing mensonger du film. Un marketing qui a mis l’accent sur des éléments totalement absents du long-métrage. Finalement, c’est peut-être par cette manipulation de son public que Sony aura le plus osé avec Morbius.
Morbius de Daniel Espinosa, en salles le 30 mars 2022. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.