Nobody's Watching : course éreintante dans "la ville qui ne dort jamais"

Nobody's Watching : course éreintante dans "la ville qui ne dort jamais"

CRITIQUE FILM - Dans "Nobody’s Watching", le personnage principal plaque tout pour tenter de se reconstruire à New York. Malheureusement, les choses ne se passent pas comme prévu et il est rapidement rattrapé par son passé.

Avec Nobody’s Watching, Julia Solomonoff raconte les aventures d’un comédien argentin venu tenter sa chance dans New York. Grinçant et amer, le film réussit à retranscrire le malaise d’un personnage qui, obsédé par son passé, ne parvient pas à se construire de nouveaux repères.

Après une rupture amoureuse, Nico décide de partir de Buenos Aires pour s’installer à New York. Là-bas, il enchaîne les petits boulots avant de trouver un rôle qui relancera sa carrière d’acteur. Malgré tous ses efforts pour s’adapter, Nico remet tout en question lorsque son ex refait surface.

Une course permanente dans les rues de New York

Une fois installé dans New York, Nico enchaîne les jobs à toute allure. Son vélo l’accompagne partout dans Manthattan et Brooklyn, où il fait des allers-retours entre ses boulots et sa collocation, à tel point qu’il pourrait presque être considéré comme son plus fidèle ami. Sans jamais dramatiser la situation de Nico, Julia Solomonoff retranscrit, en partie grâce à son montage dynamique, le sentiment de course permanente du comédien en quête de réussite. Ainsi, elle dévoile une facette de New York rarement explorée au cinéma.

Le personnage principal a peu d’attaches dans la ville, aussi bien matérielles que sociales. Si le spectateur ressent sa solitude, elle semble rarement pesante pour Nico. Il donne en effet l'impression d'avoir parfaitement assimilé le fonctionnement de New York. Le héros sait pertinemment que personne ne le regarde. Il en vient même à instaurer un petit jeu avec les caméras d’un supermarché, conscient que personne ne l’arrêtera.

Nobody's watching : Critique du film de Julia Solomonoff.

New York commence réellement à devenir pesante lorsque son ancien petit-ami lui rend visite. La perte de repères s'amorce pour Nico durant cette rencontre. Par la suite, il cesse de plus en plus à s’adapter à sa ville. Les rues perdent en effet l’éclat et l’énergie des premières scènes. Elles deviennent peu à peu aussi grises que la mine patibulaire du personnage. En errance totale, Nico montre beaucoup moins d’allégresse lors d'échanges avec des personnages secondaires. Il ne cessait pourtant de les séduire au début du film. En quelques scènes, Julia Solomonoff réussit à nous faire comprendre le mal du pays et l’amertume de Nico. La fatigue et le manque qu'il ressent rendent totalement pertinent son choix final, décisif pour son avenir.

Un acteur au chômage mais en représentation avec ses proches

Avant de revoir son ex, Nico s’adapte à chacun de ses interlocuteurs. Il veille à avoir le bon ton, à créer un lien de complicité avec la plupart d’entre eux. Il va jusqu’à mettre en scène son installation à New York lorsqu’un ancien partenaire de jeu argentin lui rend visite.

La seule personne qui voit Nico tel qu’il est le bébé d'amis qu’il accepte de garder régulièrement. C’est d’ailleurs avec l’enfant qu’il passe le plus de temps. Malheureusement, l’évolution de leur relation est à l’image des échecs de Nico. Son incapacité à s’en occuper marquera une rupture dans son quotidien jusque-là rythmé mais finalement assez maîtrisé.

Nobody's watching : Critique du film de Julia Solomonoff.

L’acteur au chômage arrête ensuite de jouer la comédie pour tenter de plaire, notamment avec une productrice grâce à laquelle il espérait pouvoir percer aux États-Unis. Cette dernière l’envoie d’ailleurs à une audition où il est reproché à Nico de ne pas avoir un visage « suffisamment latino-américain ».

Cette hypocrisie renforce la perte de patience de Nico, amenée progressivement par la réalisatrice. Julia Solomonoff réussit à tirer un humour grinçant de certaines situations, aidée par Guillermo Pfening, interprète principal qui monte en intensité au fil du film. Malgré l'histoire d’amour qui le tourmente, il est difficile de s’attacher pleinement à lui en raison des nombreux rôles entre lesquels il alterne dans son quotidien.

La distance entre le personnage et le spectateur n’altère pas le plaisir ressenti devant Nobody’s Watching. Drôle et touchant, le long-métrage est une course énergique et éreintante, même si elle n’a pas la folie de celles d’After Hours et Good Time. Julia Solomonoff dévoile le mal du pays d’un homme qui a fui son statut de célébrité pour une vie radicalement différente, qu’il n’apprécie guère plus. Héros sur lequel on ne s’apitoie jamais, Nico ne s’installe finalement jamais dans une ville bondée où il est extrêmement facile de s’égarer, ce que le film souligne à merveille.

Nobody’s Watching de Julia Solomonoff, en salle le 25 avril 2018. Ci-dessus la bande-annonce.

Conclusion

Note de la rédaction

"Nobody’s Watching" est une course effrénée d’un comédien étranger qui, s’il ne trouve pas de rôle à New York, joue en permanence pour tenter sa chance et réussir.

Sur la bonne voie

Note spectateur : Sois le premier