Didier Bourdon et Anne Consigny essaient de se créer un petit coin de paradis en Corse dans "Permis de construire", ce qui n’est pas une mince affaire. Une comédie de et avec Éric Fraticelli, qui se termine mieux qu’elle ne commence…
Permis de construire : départ manqué pour la Corse
Le premier film de l’humoriste Éric Fraticelli, également connu sous le pseudonyme de Pido, ne débute pas de façon rassurante. Dans un cabinet dentaire, cadre on ne peut moins cinégénique, Romain (Didier Bourdon) est convoqué chez le notaire. Il apprend le décès de son père, avec lequel il était en froid depuis des années, et découvre qu’il hérite d’un immense terrain en Corse.
Sa compagne Cécile (Anne Consigny) y voit l’occasion de se faire construire une maison de vacances et de fuir le tumulte de la vie parisienne. Un point de départ classique, qui promet de somptueux étés à deux sur l’Île de Beauté. Les choses se compliquent pour le long-métrage lorsque Romain se voit proposer par son collègue et ami Victor (Laurent Gamelon) de faire appel à l’architecte Müller.
Incarné par Simon Abkarian, en roue libre, cet ersatz de Karl Lagerfeld à l’accent allemand particulièrement appuyé est sans conteste l’un des éléments les plus gentiment embarrassants de Permis de construire. Quelques minutes plus tard, l’apparition de Philippe Corti dans le rôle d’un maçon portugais affublé de t-shirts capables de rendre nostalgique de l’époque "Vodka Connecting People" vient talonner le cabotinage de l’excellent acteur de Kaboul Kitchen. Avant cela, pour annoncer l’arrivée en Corse des deux continentaux, les plans de cartes postales au drone sur fond de musique traditionnelle venaient déjà de finir de semer le trouble dans l’esprit du spectateur.
Des personnages traités avec tendresse
Après cette exposition compliquée, Éric Fraticelli semble enfin pouvoir se faire plaisir en filmant ses personnages en train de s’adonner à la macagna, l’art de faire des blagues typiquement corses. En guise de réponses à ces traits d’humour, il profite des réactions parfaitement circonspectes de Didier Bourdon, qui excelle dans l’art de déjouer les malaises en susurrant des commentaires assassins dont il a le secret.
Une fois passé le choc des cultures entre les habitants du petit village de Balagne et le couple parisien, le réalisateur et comédien développe des amitiés, s’orientant davantage vers la tendresse plutôt que le comique. Il prête d’ailleurs ses traits à Santu, tenant d’un bar/épicerie qui aide Romain dans son projet par amitié pour son père, et qui finit évidemment par s’attacher au fils.
Des péripéties anecdotiques
Quelques confrontations entre Didier Bourdon et des personnages secondaires offrent des séquences parfois réussies, à commencer par celles impliquant un maître d’hôtel interprété par Jean-François Perrone. Mais le duo avec Éric Fraticelli prend rapidement le dessus pour faire avancer un scénario anecdotique qui n’a pas l’air de les captiver plus que ça, au même titre que le cadre sublime du long-métrage, très vite éclipsé par des trognes bougonnes et rigolardes.
L’issue de cette histoire importe peu puisque le spectateur la connaît depuis le départ. Et les quelques scénettes qui fonctionnent ne suffisent pas à la faire passer au second plan. Quant aux gags immobiliers, ils sont loin d’être au niveau de ceux d’Une baraque à tout casser, ne s’embarrassant d’aucune cohérence, à l’image de la maison pivotant en fonction de la rotation du soleil pensée par l’inénarrable Müller. Des idées inoffensives au service d’une comédie largement dispensable qui l’est tout autant.
Permis de construire d'Éric Fraticelli, en salles le 9 mars 2022. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.