Avec "Revenge", Coralie Fargeat signe un premier film totalement décomplexé et jouissif. La cinéaste met brillamment en avant son héroïne badass dotée d’une force incroyable.
Série B jouissive, Revenge part d’un postulat extrêmement simple mais diablement efficace. Le long-métrage, centré sur une période très courte, met en avant une héroïne faisant face à trois chefs d’entreprise apparemment bons sous tous rapports. Maîtresse de l’un d’entre eux, Jen est violée par un deuxième associé. Elle est ensuite laissée pour morte par les trois hommes voulant effacer toutes les traces de leur week-end morbide. Malheureusement pour eux, Jen est toujours vivante. Sa vengeance sera bien évidemment terrible.
Pour son premier film, Coralie Fargeat réussit à conjuguer horreur et humour avec une maîtrise qui ne peut qu’être saluée. Si certains effets volontairement grossiers ne font pas toujours mouche, Revenge confirme que le cinéma de genre français se porte de mieux en mieux. L’audace de la cinéaste est perceptible en permanence et le spectateur ressort de la salle comblé.
Un rape and revenge jubilatoire
Revenge s’écarte d’une œuvre comme I spit on your grave grâce à son second degré omniprésent. Sans jamais minimiser la gravité de son sujet, Coralie Fargeat y apporte néanmoins un regard distancé afin d’offrir un pur film de genre à son spectateur.
Durant l’exposition, le malaise est bel et bien présent, notamment à travers certains gros plans qui rappellent ceux de David Lynch dans Blue Velvet. Les actes et regards des bourreaux répugnent mais Coralie Fargeat s’attarde finalement peu sur le supplice que vit Jen. Cette dernière est rapidement laissée pour morte. Le long-métrage prend alors une toute autre trajectoire.
Le spectateur comprend que la surprise ne viendra désormais plus des trois chefs d’entreprise. L’héroïne fait preuve d’une force surhumaine et ne cesse de repousser ses limites jusqu’à la fin du film. A chaque étape de sa vengeance, le plaisir ne fait qu’augmenter grâce à l’exagération grandissante. L’issue du film, assez prévisible, n’est finalement pas importante. C’est la stratégie de Jen, alliée à sa chance, qui captive et se révèle jubilatoire.
Le spectateur se délecte en effet de la peur commune des bourreaux et de leurs réactions pathétiques. La violence exacerbée du long-métrage rappelle l’excellent Boulevard de la mort. Comme dans le film de Quentin Tarantino, la vengeance donne lieu à des scènes à la fois éprouvantes et très drôles. C'est notamment le cas lorsque Jen traque l’un de ses bourreaux sur une route sinueuse. Durant cette séquence, chaque effet est dévoilé au bon moment pour accentuer la souffrance de l'homme en fuite. Cette sensation se renforcera lors de la conclusion où la réalisatrice pousse l’horreur à son paroxysme grâce une situation habilement répétée.
Une héroïne profondément badass
Dans la première partie du film, Jen est vue comme une femme-objet par les chefs d’entreprise qui minimisent ses capacités. La mise en scène d’abord laisse penser qu’elle n’a aucune ressource et le spectateur perçoit d’emblée le piège qui se referme sur elle.
Ses trois bourreaux la considèrent comme une victime facile à exterminer. Coralie Fargeat s’amusera à prouver le contraire dès qu’elle se relèvera de sa chute douloureuse. Le choix du désert comme cadre du film permet tout d’abord à la réalisatrice de proposer un grand nombre de plans iconiques sur son héroïne. Une longue séquence tournée dans une grotte, où Jen se soigne à la dure, finira de l’imposer en héroïne badass.
Après cette renaissance viendra le défouloir final. L’aspect caricatural des bourreaux est alors amplifié au point qu’ils en deviennent presque inoffensifs face à la guerrière qui les poursuit. Coralie Fargeat se fait plaisir avec une sauvagerie ambiante qui ravit également le spectateur. Que ce soit ses blessures, la chaleur écrasante ou le manque d’eau, rien ne semble pouvoir arrêter Jen.
Si elle n’a pas le charisme de la mariée du diptyque Kill Bill, l’héroïne interprétée Matilda Lutz se révèle féroce et inépuisable. Malgré le jeu excessif de certains comédiens, Revenge tient ses promesses sans difficulté. En un film, Coralie Fargeat s’est immédiatement imposée comme une cinéaste à suivre. Son long-métrage est une série B généreuse comme on en voit peu en France, de laquelle on ressort épuisé et totalement satisfait.
Revenge de Coralie Fargeat, en salle le 7 février 2018 et présenté au 25e Festival de Gérardmer. Ci-dessus la bande-annonce.