CRITIQUE / AVIS FILM - Pour la réouverture des salles de cinéma après la pandémie, vous pouvez retrouver à l'affiche "The Demon inside". Un nouveau film de possession d'enfant qui risque de ne pas marquer les esprits malgré quelques idées pas mauvaises.
Le film de possession a eu de nombreuses déclinaisons à travers les époques. Depuis le classique L'Exorciste (pas le premier a traiter du sujet mais son aura matricielle reste indéfectible) qui a posé des motifs repris encore aujourd'hui, le cinéma d'horreur ne s'est pas privé d'essayer d'aborder ces histoires d'esprits avec plus ou moins d'originalité. Des franches réussites ont parfois vu le jour, des honorables séries B aussi et un paquet de titres qu'on condamne à errer dans les limbes de l'oubli. En 2020, le constat reste identique : il faut être très fort pour arriver à s'immiscer dans ce sous-genre. Nouvelle réalisation du Singapourien Pearry Reginald Teo, The Demon Inside est un candidat qui veut tenter sa chance. Le CV de son réalisateur n'inspire pas une seule demi-seconde la confiance et on comprend rapidement l'étendu du traquenard dans lequel on s'est engagés.
Joel est un père de famille veuf, seul responsable de la garde de son fils. Malgré une schizophrénie diagnostiquée et un mal fou à subvenir à ses besoins financiers, il tente de faire de son mieux pour veiller sur son marmot. Quand ce dernier commence à avoir un comportement étrange, il accepte avec bienvenu l'aide du Père Lambert, un homme de Foi récemment sorti de prison après avoir été condamné pour homicide involontaire lors d'un exorcisme qui a mal tourné. Vous aurez compris qu'il va chercher à se rattraper avec un nouveau cas.
The Demon Inside empile les facilités
La mise en place de The Demon Inside puis son développement empilent tour à tour (ou en même temps) les clichés, les redites de ce qu'on a vu en mieux ailleurs et les carences. Pearry Reginald Teo mène sa barque en plongeant le film dans une obscurité sur-exploitée pour dissimuler un mal qu'il ne sait pas mettre en scène. The Demon Inside force souvent à froncer les yeux pour essayer de voir ce qui n'est jamais à l'écran et la mise en scène passe par tous les procédés éculés pour créer un semblant d'atmosphère. De la caméra subjective du point de vue de la menace aux visions surnaturelles, en passant par les jump scares et la musique assommante omniprésente pour tout surligner, le film compile l'intégralité de ce que le cinéma d'horreur a essoré pendant des années. Quand on a fait le deuil d'une originalité qui n'arrivera que trop tard (on en parlera plus loin), il reste à endurer un personnage principal tiré vers le bas par Robert Kazinsky franchement pas convaincant, et une gestion visuelle des troubles mentaux qui colle un mal de crâne.
Des bonnes idées à retenir mais une exécution ratée
Quand vient le moment de l'exorcisme, passage le plus important du récit, on n'espère pas de The Demon Inside qu'il surprenne. Tout ce qui est venu avant ne l'a pas fait, pourquoi serait-ce différent dans le dernier acte ? Et pourtant, il faut avouer qu'on rehausse notre intéressement à partir de là. La première bonne idée est d'évacuer l'acte en ne mettant pas la caméra à l'intérieur de la chambre. La mise en scène se place du côté du père, qui doit patienter en restant derrière une porte close. Une solution combinant facilité et malice, qui dénote par rapport à ce qu'auraient fait d'autres productions. The Demon Inside se prive de tout climax qu'aurait pu être l'exorcisme en restant en périphérie. Les deux prêtes ressortent éreintés des séances, le son joue énormément pour faire ressentir ce qu'il se passe dans la pièce. Un angle d'approche qui permet à Pearry Reginald Teo de ne pas faire pâle figure par rapport aux grandes scènes similaires dans les meilleurs titres du genre.
Il y a aussi ce twist, qui relève l'intérêt en optant pour un embryon de réflexion sur l'hérédité et la filiation au travers de la possession. Une réflexion hélas pas assez développée, qui demandait que la moitié du film y soit consacrée. Si ça avait été le cas, The Demon Inside aurait vraiment gagné en consistance, pour s'extraire de la masse. L'idée reste belle et surprend quand elle arrive, mais ce n'est qu'une petite détonation sans répercussion plus grande. Au rayon des trouvailles qui méritaient mieux, on notera aussi l'utilisation de l'appareil photo comme révélateur d'une réalité pas toujours claire aux yeux du protagoniste principal. Pour se convaincre que ses visions ne sont pas vraies, il prend en photo l'instant présent à l'aide d'un instantané. Une autre jolie idée, évacuée sans avoir eu LA grande scène qui allait la mettre en avant. S'il démarre très mal et se traîne sur la durée des défauts handicapants, The Demon Inside avait quelques arguments pour être mieux que cette oubliable série B.
The Demon Inside de Pearry Reginald Teo, en salle le 22 juin 2020. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.