Un film d'action coréen présenté en Séance de Minuit est presque devenu un rituel à Cannes. Cette année, c'est un long-métrage au nom évocateur auquel les festivaliers ont eu droit : "Le Gangster, le flic & l'assassin". Tout un programme donc !
De plus en plus de personnes meurent sous le couteau de qui semble être un tueur en série. Un chef de gang s'avère aussi violent qu'attachant. Un policier maladroit mène l'enquête. On a l'impression d'avoir déjà vu The Gangster, the Cop, the Devil, qui dès son titre nous évoque deux polars renommés de la péninsule coréenne : le décoiffant Le Bon, la Brute et le Cinglé d'un côté, le glauque J'ai rencontré le diable de l'autre. Autant vous prévenir, si vous cherchez un renouveau du film d'action coréen, une claque de mise en scène, ou une histoire surprenante, le film de Lee Won-tae n'est pas fait pour vous.
Ceci est mon sang
Cependant, si vous recherchez une série B violente qui s'assume, le long-métrage vaut peut-être le coup d’œil. Dès le début, on voit très bien où tout cela mène, on en vient à anticiper la scène suivante, ou la punchline soulignée par un effet de caméra qui vient au plan d'après. Pourtant, on l'avoue sans honte aucune, on passe un bon moment devant un polar d'une violence presque enfantine comparé à ce à quoi nous a habitué le cinéma coréen.
Les morts s'enchaînent, mais le spectateur averti ne s'en fait pas trop : on est là pour voir des archétypes. Un gangster au grand cœur, mais à la carrure beaucoup plus imposante, se lie à un frère-ennemi policier qui franchit le rubicon de la loi pour résoudre son enquête. Les personnages sont faussement complexes, mais au fond, The Gangster, the Cop, the Devil n'a même pas la prétention de pasticher le western spaghetti que son titre évoque, ni même sa version coréenne citée plus haut.
Sympathie pour Mr. Vengeance
Esthétiquement, on est aussi peu surpris. Globalement, les couleurs éclatent, la caméra fait des siennes, le montage essaie d'être d'un dynamisme à tout épreuve tout en restant lisible. Pourtant, le cinéma coréen, dans ses films d'action, nous a habitués à ce niveau minimum. On a même droit à l'amorçage d'un plan séquence (qui ne se risque pas bien loin), et à des mêlées générales. Ces dernières semblent être devenu un passage obligé, impulsé par la maestria apparemment indépassable du Old Boy de Park Chan-wook. Les combats de groupes, ici, sont bien loin de ce niveau, mais permettent au récit d'avoir des sursauts d'action, de conserver un rythme prenant.
Bien sûr, The Gangster, the Cop, the Devil est incomparable à l'autre production coréenne présente en sélection officielle (et en compétition) de ce Festival de Cannes, Parasite. Les deux longs-métrages ne boxent pas dans la même catégorie : le film de Lee Won-tae est imparfait en de nombreux points, là où celui de Bong Joon-ho est d'une maîtrise hallucinante. Soyons honnête, le film d'action reste tout à fait correct, bien qu'il sera sûrement oublié rapidement. Mais ce qu'il tente, il le réussit humblement : livrer un thriller nerveux à défaut d'être surprenant. Ne boudons donc pas notre plaisir !
The Gangster, the Cop, the Devil de Lee Won-tae, présenté à Cannes 2019, sortie courant 2019. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.