CRITIQUE / AVIS CINÉMA - Le frère de James Franco, Dave, passe derrière la caméra pour sa première réalisation. C'est vers le cinéma de genre qu'il se tourne, pour "The Rental". Un home invasion très beau sur la forme mais décevant sur le reste.
Des vacances qui tournent au drame
The Rental débute sur un point de départ qui a tout d'anodin de nos jours. Deux frères (Dan Stevens et Jeremy Allen White) partent ensemble en vacances dans une maison somptueuse, avec leurs chéries respectives (Alison Brie et Sheila Vand). Ces quelques jours devaient être l'occasion de déconnecter de la pression du quotidien et de se mettre à l'écart du brouhaha de la ville. Sur place, effectivement, la demeure fait rêver. Trouvée sur un site de location entre particuliers à la Airbnb, elle correspond parfaitement aux photos. Pas de mauvaise surprise de ce côté. Entre la vue imprenable, le jacuzzi et la décoration magnifique, il y a tout pour se détendre. Mais la mauvaise surprise va arriver ensuite, quand une présence impossible à déceler semble rôder autour des lieux. Voilà le scénario de la première réalisation de Dave Franco, qui s'essaie à l'horreur moderne en partant sur un home invasion, sous-genre très bien connu dans lequel des gens subissent l'intrusion d'une menace dans leur espace privé. Le plus souvent des cambrioleurs, des tueurs ou quelqu'un de malintentionné. Se pourrait-il, qu'ici, ce soit l'homme mystérieux qui leur a remis les clés ?
Une longue installation... Pour pas grand chose
On ne s'attend aucunement à ce que Dave Franco nous inflige une claque avec son premier essai. La curiosité est là, mais une bonne série B bien troussée fera l'affaire. Évidemment, s'il se révèle un brillant narrateur, on ne dira jamais non à mieux. Les premières minutes, hélas, annoncent un film qui se refuse aux doutes. L'un des personnages principaux et sa belle-sœur sont très proches. Trop proches. Il y a anguille sous roche. Une relation camouflée, un désir perceptible. Une cartouche de grillée déjà. On voit arriver de très loin leur rapprochement fatal. The Rental continue sur ce rythme lors d'une longue exposition, où tout est rapidement donné au spectateur sans qu'il n'ait à forcer ou à douter. Au mieux, la cause de la disparition d'un chien va venir un peu secouer tout ce monde. Pendant 45 minutes, les quatre personnages font des choses insignifiantes, enrobées dans une ambiance fumeuse.
On se dit que Dave Franco prend volontairement son temps pour faire monter la tension, afin de déboucher sur un éclat de violence et un dernier segment survolté. Sauf que l'on se trompe. The Rental décolle à peine. Sur l'encéphalogramme, les pics sont présents mais ne montent pas haut. La frustration est là, car tout le travail préliminaire pour définir les personnages ne débouche pas sur un plaisir pour le spectateur - que ce soit en les voyant mourir ou survivre. Dave Franco a loupé quelque chose en chemin et convainc timidement. S'il sait composer des images (on y reviendra), il rame dans la gestion de son récit et n'affiche aucune régularité dans sa mise en scène. À titre de comparaison, le récent The Lodge fonctionnait mieux dans son glissement vers la violence, après une longue phase de développement.
L'ambiance réussie de The Rental
On ne retirera pas à Dave Franco qu'il a, au moins, quelque chose à donner en surface. The Rental contient quelques séquences - parfois uniquement des plans - qui ont la force pour poser une ambiance. Le néo-réalisateur sait au moins où il va avec sa direction artistique. Dans ses plans et sa lumière, il installe un sentiment d'inquiétude. À la lisière d'une sorte de fantastique éthéré, où des éléments réalistes se fondent dans des images qui ont une belle allure vaporeuse. Pas de doute, Dave Franco sait s'introduire dans le cinéma d'horreur avec une mise en scène très visible dans la lignée de ce qu'on peut voir dernièrement chez A24. Vu de loin, son The Rental est agréable à l’œil.
Mais ça ne fait pas tout de savoir composer un climat brumeux si ce qui se niche derrière n'est jamais à la hauteur. Quand la menace sourde, devient palpable, le film n'est rien d'autre qu'un petit home invasion assez banal et se positionne avec son dénouement sur un réalisme terre-à-terre n'ayant plus rien à voir avec l'ambiance lourdement posée précédemment. Dave Franco va au bout de son explication en insistant sur le modus operandi de son tueur. Un prologue inutile, qui surligne tout ce qu'on avait déjà compris avant. Au lieu d'expliquer, montrer, expliciter, le metteur en scène avait l'occasion de justement jouer avec les zones d'ombre, de tirer un peu sur la corde du fantastique pour rendre plus opaque son argument horrifique. Quand le masque de fumée se dissipe, c'est bien le visage de la déception qui apparaît.
The Rental de Dave Franco, en salle le 19 août 2020. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.