CRITIQUE / AVIS FILM - M. Night Shyamalan enchaîne les rebondissements avec "Trap", son nouveau thriller qui voit un tueur tenter d'échapper à la police lors d'un concert.
Trap : un tueur traqué en plein concert
Durant toute sa carrière, M. Night Shyamalan s'est imposé comme un maître dans l'art du twist. Même si l'important dans ses œuvres est souvent ailleurs - à l'image de l'impact émotionnelle qui ressort de Sixième sens au-delà de son célèbre rebondissement -, le public attend désormais de lui d'être surpris par un scénario capable de le manipuler. Dès lors, on se demandait bien comment le cinéaste allait s'en tirer avec Trap, qui, dès sa bande-annonce, semblait avoir révélé le plus important. À savoir que le tueur que la police espère piéger lors du concert d'une star de la pop n'est autre que Cooper (Josh Hartnett), ce père attentionné qui accompagne sa fille Riley (Ariel Donoghue) voir son idole, Lady Raven (Saleka).
Sauf que pour son dix-septième long-métrage, et après avoir proposé des œuvres assumant des intrigues surréalistes (Knock at the Cabin, Old, Glass et Split), le cinéaste continue de se renouveler et de jouer avec son audience avec un pur thriller. Ainsi, plutôt que de miser sur un unique rebondissement majeur, le réalisateur opte pour une succession de retournements de situation durant la tentative de fuite de Cooper. Bien qu'il s'agisse d'un tueur en série sanguinaire, surnommé le Boucher, la magie de M. Night Shyamalan fait que l'audience n'a qu'une envie, voir comment il parviendra à tromper les forces de l'ordre et à trouver une issue sans pour autant alarmer sa fille. Le cinéaste maintient ainsi son suspens tout au long de Trap, tout en y ajoutant des touches d'humour comme il en a le secret.
M. Night Shyamalan joue avec le genre et les attentes
Bien sûr, entre les mains d'un autre réalisateur, Trap paraîtrait assez classique. Mais avec M. Night Shyamalan, il faut aller au-delà du simple thriller pour y voir un questionnement plus profond sur son propre art, celui de la manipulation. Ici, le réalisateur fait de Cooper un maître en la matière. L'homme est capable du pire (provoquer un incident avec une friteuse ou pousser une jeune fille dans les escaliers), mais aussi d'arriver à ses fins en se montrant bon et attentionné, en parfait père de famille. Sa facilité à manipuler ceux qu'il croise est alors à la fois jouissif et effrayant. Et l'interprétation de Josh Hartnett est excellente tant l'acteur parvient à afficher différents visages.
De son côté, M. Night Shyamalan mise sur la surenchère avec un Cooper inarrêtable et plein de ressources. Le dernier plan de Trap apparaît d'ailleurs comme un clin d'œil amusé du réalisateur, indiquant que ce jeu de traque et de fuite pourrait s'avérer interminable. Une manière aussi de jouer avec les codes du genre horrifique où l'antagoniste parvient toujours à revenir - on pense aussi bien au Silence des agneaux qu'à Halloween.
Un monde d'écrans
Enfin, M. Night Shyamalan a avec Trap une volonté de s'interroger sur le rapport à l'image, aux écrans (omniprésents au concert et à l'extérieur) et aux réseaux sociaux. Même s'il reste en surface, il a au moins l'intelligence de ne pas tomber dans la critique facile. C'est davantage un constat de la situation qu'il fait, en seulement une poignée de scènes.
D'abord par le biais de Riley, en conflit avec un groupe de filles de son école qui ont décidé de l'exclure, mais qui s'affichent sur les réseaux sociaux. Puis en insistant juste ce qu'il faut sur les innombrables téléphones pointés sur Lady Raven dès son entrée sur scène devant un Cooper interloqué. Avant d'en révéler une certaine utilité dans le dernier acte. L'outil devenant un moyen de connecter et de rassembler des masses pour agir contre Cooper.
Trap de M. Night Shyamalan, en salles le 7 août 2024. Ci-dessus la bande-annonce.