CRITIQUE FILM - Jeremiah Zagar signe un film indépendant puissant. "We the Animals" est une oeuvre esthétiquement recherchée qui traite de l'homosexualité avec énormément de finesse et de pertinence.
Réalisé par Jeremiah Zagar, We The Animals est un film américain indépendant qui retrace la jeunesse de Jonah, un gamin particulier, cadet d'une fratrie de trois garçons. Porté par le talent naissant de l'acteur Evan Rosado, We The Animals est une adaptation du roman autobiographique de Justin Torres, tandis que beaucoup ont comparé ce long métrage à Moonlight, la claque de 2016 réalisée par Barry Jenkins.
Un film à l'esthétique puissante
C'est sans doute un des films indépendants à ne pas rater en ce début d'année. We The Animals est un long métrage parfaitement réalisé qui alterne entre une approche caméra à la main pour donner un sentiment de proximité avec la famille, quelques courtes séquences d'animation illustrant le journal intime de Jonah, et des plans graphiques plus ambitieux. Une esthétique qui tente de se rapprocher d'un cinéma vérité avec une caméra à l'épaule et des objectifs larges proches du sujet. En plus de cette technique le cinéaste a utilisé une pellicule 16mm pour user du langage visuel des années 1990 et imposer une dimension mémorielle, comme un souvenir d'une jeunesse passée. L'ambiance du long métrage est sans doute l'attrait le plus réussi.
Ainsi, tandis que ses grands frères suivent le chemin de leur père : un homme passionnel, mais parfois violent, qui se laisse dicter par ses émotions et perd parfois le contrôle de son existence, Jonah lui prend une toute autre route. Plus sensible, il aborde la vie par un prisme différent, par la curiosité, par la découverte du corps et des sens. Jeremiah Zagar matérialise ces sentiments par des envolées visuelles superbes et musicales qui rappellent parfois Les Bêtes du Sud Sauvage.
Le long métrage manque parfois de rythme
Malheureusement, malgré toute cette bonne volonté, We the Animals manque parfois de rythme. Jeremiah Zagar veut évidemment présenter la jeunesse sous son jour le plus réaliste. Forcément, dans une petite ville perdue les activités sont relativement rares et finalement ses protagonistes ne font que tourner en rond. Jonah en tête. Et à force, le spectateur est pris dans le tournis de l'ennui devant des tribulations qui prennent peut être trop leur temps. Les situations se répètent, et le processus de transformation de Jonah est lent. Heureusement, la conclusion est d'une puissance étonnante. Terriblement belle, elle partage des sentiments de libération et d'acceptation de soi extrêmement forts, tandis que le choix visuel rappelle inévitablement le récent Birdman.
Le rapprochement évident qui peut-être fait avec Moonlight, c'est la capacité de We the Animals à traiter de l'homosexualité avec beaucoup de subtilité, avec un certain recul. Jeremiah Zagar évite en permanence de tomber dans le pathos ou les sentiments forcés. We the Animals est d'un naturel bien dosé, d'une parfaite délicatesse. Comme son grand frère Moonlight le long métrage traite de ce sujet avec finesse et perspicacité.
We the Animals de Jeremiah Zagar, en salle le 13 mars 2019. Ci-dessus la bande annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.