CRITIQUE SÉRIE - Avant les diffusions de "Sabrina" et "Charmed", "A Discovery of Witches" offre à découvrir Teresa Palmer en sorcière passive et refusant sa vraie nature.
Les sorcières auraient-elles le vent en poupe ces derniers temps sur le petit écran ? On peut aisément l'affirmer en observant les nouveautés sérielles de cette fin de mois de septembre, et du mois d'octobre à venir. Alors que Netflix s'apprête à dévoiler prochainement son adaptation de Sabrina (26 octobre), tirée des comics Archie, et que Charmed va avoir droit à son reboot (14 octobre), Sky lance les hostilités avec A Discovery of Witches, créée par Kate Brooke. Adaptée du premier tome de la trilogie All Souls de Deborah Harkness, la série se déroule dans un univers moderne, réaliste et très british. Après la diffusion de deux premiers épisodes (sur les huit), on a déjà pu se faire un premier avis sur la série.
L'unique atout : Teresa Palmer
S'il fallait trouver un premier argument pour se lancer dans A Discovery of Witches (et c'est justement la raison pour laquelle on s'est montré curieux à son sujet), ce serait probablement la présence de Teresa Palmer. Elle est de ces actrices (comme acteurs) qui ont développé, consciemment ou non, une certaine personnalité au travers des films auxquels elles participent et des rôles qu'elles incarnent. Dans le cas de Teresa Palmer, si on met de côté la partie romance de sa filmographie (Wish you were here, Amour et honneur, The Choice), et à l'exception d'une œuvre d'auteur indéfinissable comme Knight of Cups, c'est dans le cinéma de genre qu'elle semble avoir vraiment trouvé sa place.
Avec Dans le noir principalement, où une créature cauchemardesque s'en prenait à elle et son petit frère, son naturel et la crainte visible dans son regard offraient une totale empathie. Elle récidiva avec Berlin Syndrome, qui la voyait se faire kidnapper par un maniac. Elle partagea enfin l'écran avec Chadwick Boseman dans le Message from the King de Fabrice Du Wetz. En clair, s'il fallait la résumer, Teresa Palmer n'est pas qu'un beau visage, ce à quoi certaines productions voudraient la réduire. Il aura fallu pour elle se battre contre le cliché de la "jolie fille en détresse", et prouver qu'elle excelle lorsqu'elle s'en prend plein la gueule et qu'elle ne peut compter que sur elle pour s'en sortir.
Ces "bons" rôles, c'est donc bien dans le cinéma de genre (épouvante, fantastique ou thriller) qu'elle les a trouvé - au même titre qu'une certaine Jane Levy (Evil Dead, Don't Breathe, Twin Peaks, Castle Rock). L'idée de la voir évoluer dans la série A Discovery of Witches, dans le rôle d'une sorcière, était alors prometteuse. Dès les premières minutes, Teresa Palmer aborde une attitude qu'on connaît bien, mais qui fonctionne à chaque coup. Simple, le regard intrigué par ce qui se déroule devant elle, méfiante, mais malgré tout curieuse de ce qui l'entoure. Elle y interprète Diana Bishop, une historienne qui étudie de vieux manuscrits à la bibliothèque Bodleian d'Oxford. De plus, Diana est une sorcière, cachée parmi les humains. Bien que refusant d'utiliser ses pouvoirs, voulant adopter un mode de vie "normal", Diana se voit confrontée à la magie lorsqu'elle fait la découverte d'un livre disparu depuis des siècles. Celui-ci renfermant le secret derrière la création des vampires, la jeune femme est rapidement la cible de plusieurs camps.
Vampire ténébreux et clichés en perspective
Rien de bien original dans cette histoire, où l'héroïne est malgré elle confrontée à quelque chose qui la dépasse. Et c'est bien là le problème. Même si la production britannique se montre efficace dans sa mise en scène (avec tout de même quelques fautes de goût, on y reviendra), elle pèche avant tout par son manque flagrant d’ambition. Très premier degré, A Discovery of Witches reste en surface et ne semble pas vouloir raconter autre chose qu'une opposition vue et revue entre deux clans : vampires et sorciers (des démons pointant aussi le bout de leur nez). On pourrait toujours voir dans le conflit sorciers/vampires une sorte de métaphore de la crainte des humains envers ce qui est différent d'eux (par la religion, la couleur de peau, l'origine...). Mais ce serait, honnêtement, faire de la sur-interprétation et chercher à intellectualiser une œuvre qui n'en mérite pas tant. De même que le fait que Diana, d'une passivité déconcertante, refuse d'user de ses pouvoirs et donc tente d'aller contre sa vraie nature, n'est au final qu'effleuré.
De plus, on ne peut pas dire que l'alchimie qui devrait se construire entre Diana et le vampire ténébreux, Matthew Clairmont, également généticien, soit des plus captivantes. On vous disait que les romances étaient loin de convenir vraiment à Teresa Palmer, cela se confirme à chaque fois que la série tend vers le romantisme et délaisse le mystérieux et l'étrange. Surtout, car A Discovery of Witches se contente de cocher des cases devenues des clichés du genre. Il y a ainsi le fameux vampire fascinant, tantôt attirant, tantôt dangereux. Un style qui va à merveille à Matthew Goode (Stoker), mais qui, dans une production inégale et peu subtile, frôle plus souvent le grotesque. Au moins, des séries comme Buffy ou Vampire Diaries (pouvant mêler l'univers des vampires et des sorcières) s'assumaient dans le côté divertissement pour jeune (du moins visuellement, le fond de Buffy étant d'une grande richesse), là où A Discovery of Witches se veut trop "propre". Dès lors, à chaque fois qu'elle opte pour une représentation du surnaturel, la série tombe dans le risible - faute de moyens.
Après deux épisodes, A Discovery of Witches peine donc à convaincre. Difficile d'imaginer la suite faire un revirement à 360° (pourtant nécessaire). Peut-être que les adeptes des romans y trouveront une fidélité suffisante - nous ne les avons pas lu. Reste qu'on pourrait attendre, dans ce cas, autre chose qu'une simple transposition d'un medium à un autre - posant alors la question de l'utilité d'une adaptation. Ceux qui espéraient par contre y trouver un minimum de fond n'auront que Teresa Palmer pour se consoler.
A Discovery of Witches créée par Kate Brooke, diffusée sur Sky One à partir du 14 septembre 2018. Ci-dessus la bande-annonce.