CRITIQUE SÉRIE - "Au service de la France" revient pour une deuxième saison avec ses agents pas du tout spéciaux mais très sûrs d'eux-mêmes. Cette fois, Merlaux et ses acolytes vont devoir se plonger dans les années 60, sa Guerre Froide et ses révolutions.
« Y’a pot ? » Bienvenue au service du renseignement français ! Nous sommes en 1961 et le monde entier est plongé dans la Guerre froide. Dans les bureaux du Service, la vieille France tente de résister aux changements. Mais des jeux de pouvoir vont s'organiser et bouleverser le quotidien. L'Algérie, la crise de Cuba, les ruptures et les trahisons, les nouvelles alliances... Le Service est plus que jamais sur tous les fronts.
Partout où l'humour fait loi
Il s'agit d'un petit événement dans le monde des séries. En effet, jeudi 5 juillet sur Arte, la deuxième saison d’Au service de la France commence sa diffusion. La série comique créée par Jean-François Halin, entre parodie et satire, a acquis dès sa première saison un statut culte. Cette nouvelle saison était donc très attendue et va proposer de l'aventure et de l'exotisme, avec une focalisation sur les trajectoires des personnages.
Parce qu'elle est très drôle, intelligente et documentée avec précision, Au service de la France est LA série à ne pas manquer. Car source intarissable de fous rires, elle permet aussi de briller dans les dîners. Indispensable donc.
Le comique français à son meilleur
Parmi les réussites de la série, il y a la volonté de provoquer un rire franc sur des sujets exigeants. Et après être passé par Les Guignols et Groland, le créateur sait y faire et connaît ses sujets. En effet, il faut connaître un peu l’histoire pour bien saisir l’univers et les propos des personnages. Une grande audace est assumée, et la série évoque des sujets sensibles, comme la guerre d’Algérie, les débuts du féminisme, le racisme, la misogynie, l’homophobie... Arte, qui produit Au service de la France, a laissé les mains entièrement libres à l'équipe. La série est si bien écrite que son cynisme et son humour très corrosif font, sur ces sujets, des miracles.
Logiquement, le spectateur ne sait parfois plus où se mettre face aux inepties du Service. Et c’est bien là l'idée des scénaristes, de jouer avec le malaise et l'absurdité tout au long des douze épisodes de 52mn. Alors, cette ambiance fait penser à The Office. Surtout la version Ricky Gervais, référence d'un humour que les auteurs de la série partagent.
Dans la première saison, on riait beaucoup de la paresse des personnages, de leur goût infini pour la paperasse administrative, de leur propension à trouver n'importe quel prétexte pour organiser un pot. Dans cette saison, le cadre s'élargit dans une réalisation plus rythmée (Alexis Charrier a remplacé Alexandre Courtès), avec plus d'extérieurs et d'aventures.
Ainsi plus romanesque, aussi avec l'évolution du personnage d'André Merlaux (Hugo Becker), cette saison 2 se donne de l'ampleur, s'accorde des "moments" de mise en scène, et ça fonctionne à merveille.
Grandes aventures pour une galerie de personnages fascinants
On sent dans l’écriture jouissive de ses auteurs la volonté d'animer des personnages absurdes, burlesques, dans une veine qui convoque Tintin et OSS 117. Comme une évidence, Jean-François Halin est aussi le scénariste des deux OSS 117. Lors d’une rencontre avec la presse, il expliquait ainsi cette parenté.
Je suis attiré par les gens qui ne doutent jamais, c’est un spectacle qui m’ébahit toujours. Et nous avons tous dans notre entourage quelqu’un comme ça. Voir ces trois agents qui n’ont pas de doutes, ce genre de personnes qui se donnent une assurance, une sorte de présence, je trouve ça extrêmement amusant !
À propos de ces personnages, on retrouve tout le casting connu. Hugo Becker reprend donc son rôle d’André Merlaux, seul agent compétent du Service. Karim Barras, Bruno Paviot et l’exceptionnel Jean-Edouard Bodziak dans les rôles de Jacquard, Moulinier et Calot. Par rapport à la première saison, une des nouveautés est la montée au front de plusieurs personnages féminins. Au Service, Marie-Jo (Marie-Julie Baup) va ainsi prendre du galon. À la maison, Mercaillon (Wilfred Benaïche) va voir sa femme Irène (Stéphanie Fatout) se transformer. Et il y a encore leur fille Sophie (Mathilde Warnier), en relation compliquée avec André...
Avec intelligence et finesse Au Service de la France aborde avec réussite des sujets plus intimes et actuels, sans perdre de son incroyable drôlerie. Le sarcasme est de haut niveau, l’aventure d’espionnage est trépidante : Au service de la France est un bijou de télévision. Et sa peinture d’idiots très drôles la hisse très, très haut dans l’univers des fictions françaises.
Au service de la France créée par Jean-François Halin, diffusée sur Arte à partir du 5 juillet 2018. Ci-dessus la bande-annonce.