CRITIQUE SÉRIE - Plus qu’une série super-héroïque, "Cloak and Dagger" met en scène l’adolescence de deux jeunes incompris et endeuillés.
Non-content d’avoir envahi les salles de cinéma, les super-héros se sont également imposés sur le petit écran. Au milieu d’une multitude d’adaptations de comics déjà bien en place, difficile pour les nouvelles séries de vraiment tirer leur épingle du jeu. Du coup, on imaginait bien Cloak and Dagger prendre le pas des très moyennes The Gifted et Runaways. Pourtant, s’il y a bien des liens entre les trois séries (rapport enfants/parents), la bonne surprise vient bel et bien de Cloak and Dagger, tout juste lancée par Freeform (et disponible sur Amazon Vidéo pour la France).
Des débuts intenses et un vrai fond
Cloak and Dagger use d’un procédé simple mais efficace : le montage parallèle. Celui-ci consistant à montrer deux actions se déroulant en même temps, mais à deux endroits différents. Ainsi, on découvre en premier lieu la jeunesse des deux héros séparément. Une scène d’exposition qui sert évidemment à montrer quel événement hasardeux va leur permettre d’acquérir leurs pouvoirs, mais également de donner le ton de ce que sera la série. À savoir, pas uniquement une série de super-héros, mais un moyen de porter un regard sur l’adolescence sous fond d’Amérique troublée.
Il suffit de prendre Tyrone (Aubrey Joseph), jeune afro-américain qui assistera à la mort de son grand frère après une bavure policière. Une scène qui fait encore et toujours écho avec ce qui se produit trop souvent aux Etats-Unis et que le cinéma ne cesse de dénoncer (de Fruitvale Station à Detroit). À l’opposé, Tandy (Olivia Holt), en plein cours de danse classique, représente la bourgeoisie blanche, mais qui ne sera pas pour autant épargnée – elle, perdant son père dans un accident de voiture. Ces premières minutes parviennent à se montrer prenantes, bénéficiant d’une réalisation efficace (caméra à l’épaule, toujours en mouvement) ni trop stylisée (les Marvel de chez Netflix), ni trop cheap (les DC de chez CW).
Une crainte tout de même, celle de tomber dans un certain cliché avec d’un côté l’héroïne blanche qui bénéficie des privilèges de sa classe sociale, et de l’autre le héros noir qui influencé par son milieu devient un délinquant. C’est en fait tout l’inverse ici. Des années plus tard, revoilà donc Tandy et Tyrone qui ont continué leur parcours après cet événement tragique qui les aura réunis une première fois – une belle scène par ailleurs. Cloak and Dagger déplace alors sa critique sur le rôle parental. Les parents de Tyrone étant toujours marqués par la mort de leur autre fils, feront preuve d’une sévérité et d’une incompréhension à son égard. Concernant Tandy, celle-ci devant s’en sortir seule, vivant avec une mère shootée à l’alcool et aux antidépresseurs.
De bonnes promesses pour la suite
Si du côté de Tyrone l’empathie se fait naturellement, bien aidée par la performance d’Aubrey Joseph, c’est moins le cas pour Tandy. Celle-ci gardant malgré tout en elle une image d’enfant privilégiée dont les vols renvoient davantage à une immaturité qu’à un vrai mal être. On laissera malgré tout au personnage (et à l’actrice) le bénéfice du doute. Le premier épisode la mettant déjà face à une dure réalité. Une scène d’agression sexuelle étant l’exemple le plus frappant de la violence qu’« ose » montrer Cloak and Dagger.
Ainsi, même si on voit déjà certaines facilités pour allonger la série (l’usage de flashback pas si nécessaires), Cloak and Dagger s’avère pour le moment très encourageante. En premier lieu car, bien qu’elle vise clairement un public jeune, elle n’adopte pas pour autant un ton trop naïf. Certes l’usage d’une bande sonore à base de musique pop n’est pas des plus subtiles. Et encore une fois, il reste difficile pour le moment de croire vraiment au personnage de Tandy. On trouve néanmoins à Cloak and Dagger un certain charme et une vraie intensité dans ses deux premiers épisodes. Espérons que la série se peaufine avec le temps et gagne en profondeur.
Cloak and Dagger créée par Joe Pokaski, disponible sur Amazon Vidéo à partir du 8 juin 2018. Ci-dessus la bande-annonce.