CRITIQUE / AVIS SÉRIE - Matt Groening est de retour avec la partie 2 de "Désenchantée", disponible sur Netflix depuis le 20 septembre dernier. Le créateur des "Simpson" est de retour dans son univers médiéval qui peine à totalement convaincre.
La première partie est sortie l'année dernière, laissant les fans de Matt Groening relativement dubitatifs. On était revenu sur cette première saison, mettant en lumière le manque d'efficacité du show, notamment à cause d'un humour trop plat et de personnages qui n'évoluent pas assez. Choisir un mode de récit narratif mérite forcément plus d'attention pour les personnages et les enjeux. Désenchantée manquait de tous ces attraits, mais gardait un certain potentiel.
Un potentiel qui est encore à exploiter
Cette deuxième partie est à l'image de la première. Matt Groening ne parvient pas à faire évoluer sa série, gardant les mêmes travers, sans parvenir à donner à Désenchantée l'ampleur qu'elle mérite, et surtout que le style heroic fantasy mérite. Tout reste trop sage, trop académique, trop mou pour réellement passionner un spectateur qui peut regarder d'un œil peu averti les dix épisodes de cette saison 2. Les chapitres manquent parfois de rythme, ennuyants gentiment, alors que le créateur tente d'engendrer certains ressorts dramatiques. Matt Groening essaye de développer l'histoire de sa protagoniste, en l'envoyant notamment dans la famille de sa mère. Mais les enjeux ne prennent jamais totalement, ne parviennent pas à impacter réellement le public. Les intrigues sont intéressantes, mais la série ne prend pas le temps de les développer convenablement, délaissant certains éléments.
L'univers est un puits à idées, mais à part quelques créatures sympathiques et une ville des elfes qui gagne en importance, le décor n'est qu'un meuble interchangeable qui ne sert pas forcément le récit. Comme dans la première saison, l'humour manque de panache, restant trop gentiment transgressif, trop platonique pour réellement atteindre le potentiel comique des précédentes créations de son auteur. On sourit souvent, on rit parfois, mais tout cela est assez anecdotique, et finalement vite oublié.
Encore une fois, comme pour la première partie, Matt Groening conserve son public grâce à un twist final diabolique. Une conclusion en grande pompe, qui sert à garder l'intérêt des spectateurs, relancer leur attente pour la suite. Matt Groening a en tout cas bien compris comment utiliser les retournements de situations, en balançant un final plutôt excitant, histoire de faire oublier l'ennui de la saison, pour se concentrer sur ce dénouement ouvert. Technique déjà utilisée, en mieux, dans la première partie.
Des personnages sous-exploités
Si Bean demeure intéressante, notamment dans le propos d'affranchissement féminin qu'elle partage, ses petits compagnons sont trop simplement décrits pour convaincre. La protagoniste est une femme forte qui fait du bien aux carcans hollywoodiens dans son discours d'émancipation sociale, féministe et patriarcale. Guerrière à la chevelure blanche elle met à genoux les diktats de son époque, et par extension les nôtres également, ce qui permet quelques ressorts comiques assez amusants par rapport aux mœurs arriérées du passé. Bean est une réussite plutôt agréable, mais ses acolytes sont terriblement mal utilisés.
Elfo perd toute complexité dans ce second acte, devenant simple déclencheur comique sans véritable énergie. Son passage au paradis est à peine dévoilé, de même que son entrée en enfer. Épisode au potentiel résolument passionnant, mais traité trop faiblement pour susciter intérêt et réjouissance. Mais le plus gros gâchis vient évidemment de Luci, protagoniste qui se veut irrévérencieux, voir choquant, mais qui a finalement la langue bien rangée dans sa poche. Le démon devait être le personnage secondaire corrosif, audacieux, et surtout charismatique. Un démon quoi ! Mais en plus de n'avoir aucun pouvoir un peu classe ou inquiétant, ses rares répliques font à peine sourire, ne permettant pas de faire entrer le personnage dans une dimension impertinente. L'écriture de Luci est d'une faiblesse hallucinante par rapport à son potentiel. Et c'est vraiment frustrant de voir une idée pareille délaissée.
Bref, Désenchantée ne convaincra pas non plus dans cette seconde partie, à peine divertissante. Mais encore une fois il ne s'agit que d'une première saison, et il serait sage de laisser un peu de temps à Matt Groening pour développer son univers et son récit, car certains éléments semblent s'aligner, que ce soit le complot contre Zog, la prophétie de Bean, Steamland ou quelques petits détails comme les amphores trouvées par Derek. En espérant que la deuxième saison arrivera enfin à décoller, et à développer la continuité du récit.
Désenchantée réalisé par Matt Groening sur Netflix dès le 20 septembre. Ci-dessus la bande annonce.