CRITIQUE / AVIS SÉRIE - L'auteur du film "Dernier train pour Busan" adapte son propre webtoon "Hellbound" en série, sur Netflix. Une oeuvre qui se sert d'un argument surnaturel pour dénicher le pire de ce qui peut se trouver chez les humains.
Hellbound : des démons débarquent sur Terre
Le réalisateur Yeon Sang-ho s'est révélé aux yeux du monde avec sa tuerie Dernier train pour Busan. Un film de zombies dans un train qui a su créer un consensus en raison de ses grandes qualités. Son géniteur n'a pas su confirmer forcément les espoirs placés en lui avec le moyen Psychokinesis et surtout avec le ratage Peninsula que l'on aurait voulu aimer. Mais Yeon Sang-ho est de retour, sur Netflix, avec une série plutôt prometteuse : Hellbound.
Une adaptation de son propre webtoon, dont le postulat est alléchant. Les humains assistent à des phénomènes étranges qui dépassent l'entendement. En effet, des monstres apparaissent sur Terre pour envoyer en Enfer des gens qui ont pêché. De plus, le mystérieux Jeong Jin-soo explique à qui veut bien l'entendre que ces événements sont voulus par Dieu. À la suite de la mort d'un homme en pleine rue, la police décide d'enquêter sur ce dossier mais personne n'est réellement prêt à encaisser ce qu'il va se passer.
Hellbound débute sur une ouverture stupéfiante de violence. Un homme, à qui une prophétie a annoncé la mort à venir, est pourchassé par trois démons en plein centre ville, à une heure où l'affluence est grande. Sous les yeux ébahis de témoins qui ne comprennent pas grand chose, il est violenté sans concession et tué par combustion. La scène est évidemment captée par des passants qui dégainent sans tarder leur téléphone portable. Tout le monde - téléspectateurs compris - assistent à une mise à mort sans concession, assez déstabilisante car frontale. Une fois cette mise en bouche passée, on découvre qu'Hellbound est une série qui résonne avec notre époque sur plus d’un point et c’est précisément ce qui la rend intéressante à suivre.
Une série surnaturelle sur la nature humaine
Dans les trois premiers épisodes que l’on a pu voir, les interventions des démons sont rares. C’est davantage en périphérie que se trouve la sève de l’histoire. Il y est question de croyance, à plusieurs échelles. La divine, forcément, mais aussi de celle d’une justice humaine, où les victimes voient les coupables ne pas récolter les peines qu’ils méritent. Enfin, et c’est là où l’horreur se développe finalement de manière plus importante, Hellbound évoque le fanatisme qui découle des croyances religieuses. Quand ce ne sont pas les démons qui débarquent pour répandre un châtiment divin, ce sont des hommes, petits moutons d’une secte, qui se permettent de punir les gens et d’user d’une violence excessive. Difficile de ne pas voir un rappel aux mouvements terroristes et qui affirment leurs idéaux par la terreur.
La brutalité des hommes est douloureuse lorsqu’elle intervient dans Hellbound, peut-être même plus que lorsque ce sont des monstres - des créatures irréelles, donc - qui en usent. La série se montre assez radine sur le temps à l'écran des démons parce que son propos est ailleurs. Leur apparition très tôt dans le pilote n’est pas étonnante. Le scénario ne cherche même pas à jouer la carte du suspense sur leur véracité, leur design ou leur puissance. Tout est lâché d’entrée de jeu, pour statuer sur le fait qu’ils existent.
Cela n'empêche pas que leurs apparitions fonctionnent, parce qu'elles émergent à des moments stratégiques. On passera cependant sur les effets visuels des démons, qui auraient pu être plus convaincants, même si leur apparence est fidèle à ce qu'on trouve dans le webtoon original.
De l'originalité, justement, c'est ce que déploie l'univers d'Hellbound. Le concept est intelligemment pensé avec une mythologie qui sort de l'ordinaire. L'exécution est, en revanche, pas toujours à la hauteur des belles promesses de l'univers. Du moins, dans les trois premiers épisodes, le rythme affiche des creux. On a également du mal à s'attacher aux personnages, d'autant plus que le casting n'est pas une franche réussite. Néanmoins, Yoo Ah-in sort de la masse, grâce à son interprétation magnétique du Président Jin-soo. En dépit de ces défauts qui gâchent ce qui aurait pu être une réussite, l'univers dégage assez de singularité pour donner envie de s'accrocher jusqu'au bout.
Hellbound créée par Yeon Sang-ho, sur Netflix le 19 novembre 2021. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.