CRITIQUE SÉRIE - La sixième et dernière saison d'House of Cards sera disponible sur Netflix le 2 novembre prochain. Après l'éviction de Kevin Spacey, la star du show, suite à des accusations d'agressions sexuelles, c'est Robin Wright aka Claire Underwood qui reprend les rennes, ainsi que le bureau ovale. Que vaut cette saison finale ? L'intérêt demeure-t-il intact malgré l'absence de Frank Underwood ? Nous avons vu les cinq premiers épisodes et nous vous donnons notre ressenti.
Soyons honnêtes, après l'éviction de Kevin Spacey d'House of Cards, nos attentes concernant la sixième et dernière saison n'étaient pas au beau fixe. Tout simplement car le personnage de Frank Underwood nous semblait allait de pair avec la qualité du show produit par David Fincher. Comment cette série, qui reposait en immense partie sur ce personnage si charismatique allait pouvoir se relever d'un tel coup dur ? La frustration était d'autant plus grande que le final de la cinquième saison nous laissait penser que la série se conclurait sur un affrontement final grandiose entre Frank et Claire Underwood, interprétée par Robin Wright. Confiant, Netflix a décidé de poursuivre l'aventure en mettant Claire au centre de l'action, n'en déplaise à de nombreux adeptes de la série.
Éloge funèbre
Après avoir été hissée au plus haut poste du pouvoir dans la saison précédente dans ce qui ressemblait à une énième manipulation de Frank Underwood, Claire Underwood est toujours à la tête des États-Unis quand nous la retrouvons dans cette saison six. Très vite, la mort de Frank est abordée (elle avait déjà été évoquée dans ce teaser) et cette saison semble se dérouler plusieurs semaines après sa disparition. Pourtant, son ombre plane toujours sur la Maison Blanche.
Comme après un enterrement, la famille plus ou moins proche se réunit autour de ceux qui restent pour évoquer les souvenirs passés avec le défunt. Dans le cas d'House of Cards, c'est autour de Claire que se retrouvent les vieilles connaissances pour se remémorer le regretté Frank Underwood. Mais tous ne sont pas là pour vanter les mérites de l'ancien Président. La plupart ont des comptes à régler avec lui, et c'est Claire qui va devoir en découdre. Première bonne nouvelle : cette saison repart sur les rails du thriller politique, avec son lot de coups bas et de manipulations propres à la série. L'arrivée de nouveaux adversaires brillamment interprétés par Diane Lane et Greg Kinnear permet d'apporter de nouveaux enjeux scénaristiques à une série qui, avouons-le, tournait un peu en rond depuis deux saisons. Vieilles connaissances de Frank et Claire Underwood, ces personnages nous permettent également d'accéder aux jeunes années du couple, période qui restait pour l'instant inconnue. En fait, on a le sentiment d'en apprendre plus sur les Underwood en deux épisodes que dans toutes les saisons précédentes.
À la manière d'un fantôme qui hanterait toujours sa demeure, Frank est de toutes les discussions, tant son empreinte a marqué au fer rouge tous les gens qui l'ont côtoyé. Dans le premier épisode, la série adopte même par instants une posture quasi horrifique en mettant en scène Claire dans une maison hantée par la présence de son défunt mari. Et comme dans tout film d'horreur, la demeure se doit d'être purgée de cette présence éthérée.
Claire prend le pouvoir
On lit souvent que la mort des parents peut avoir un effet libérateur sur l'enfant adulte qui, d'une certaine manière, s'affranchit totalement de l'influence de ses géniteurs. Dans le cas d'House of Cards, le décès de Frank Underwood a déclenché chez Claire une envie de s'émanciper de celui qui a modelé son existence et régi ses moindres faits et gestes. C'est désormais elle qui trône sur le fauteuil du bureau ovale ("my turn") et qui domine les États-Unis. Ses détracteurs sont tous des hommes blancs d'une cinquantaine d'années et lorsqu'elle annonce au cours du deuxième épisode que "le règne des hommes blancs prend fin" il est difficile de ne pas y voir de la part de Netflix une volonté de s'affranchir définitivement de Kevin Spacey, dont l'accusation d'agression sexuelle sur mineur est survenue en plein mouvement #MeToo. On peut évidemment y voir aussi une critique de la politique de Donald Trump, élu alors que tout le monde voyait Hilary Clinton devenir la première femme présidente des États-Unis. Mais Claire ne compte pas arriver à ses fins sans dommages collatéraux. Comme elle avait pu le démontrer lors de la saison 5, elle n'a pas peur de rayer de la carte quiconque se dressera sur son passage. Évidemment, nous ne sommes pas dupes de la combine mise en place par les scénaristes qui consiste à faire de Claire une nouvelle Frank Underwood, avec toutes les délicieuses manigances que cela implique et qui ont fait le succès de la série. Mais nous ne leur en voulons pas car ça fonctionne. Et alors que House of Cards aurait totalement pu s'écrouler sans la présence de Kevin Spacey, Robin Wright parvient à emporter notre adhésion lorsqu'elle s'adresse directement à nous face caméra. Elle nous a mis dans sa poche, et nous sommes désormais prêts à la suivre, pour un dernier tour de manège qui s'annonce palpitant.
Tous les épisodes de la saison 6 d'House of Cards seront disponibles sur Netflix le 2 novembre 2018.