CRITIQUE / AVIS SÉRIE - Quelques mois après un oubliable film américain "The Grudge", la franchise revient pour ausculter la naissance de la malédiction avec la série "Ju-On : Origins" sur Netflix. La plateforme délivre ainsi sa première série d'horreur japonaise et les fans devraient trouver dedans des choses à piocher.
Ju-On : la série pour remonter le niveau de la saga
Initiée par Takashi Shimizu, la série de films Ju-On (ou The Grudge à l'international) se positionne en tête de liste si vous souhaitez vous familiariser avec les grands titres du cinéma horrifique japonais. C'est la première pierre, sortie en 2000, qui est considérée à ce jour comme un classique du genre. D'autres films sont sortis depuis, avec quelques bonnes choses à sauver (même dans le remake américain, toujours réalisé Takashi Shimizu), et énormément de déchets. Alors que le public se remet du terrible ratage de 2020 signé Nicolas Pesce, Netflix s'empare aussi de la malédiction pour une série qui veut explorer les racines du mal.
Le programme a beau signaler ses intentions dans son titre, il ne prend pas un chemin balisé. Ju-On : Origins nous place dans un vrai inconfort lors des premiers épisodes. Les timelines se croisent, les personnages aussi et les événements étranges ne trouvent pas un début clair d'explication avant le quatrième segment. La série débute avec Haruka, une actrice qui prétend vivre des événements étranges chez elle. Yasuo, intéressé par le sujet, veut enquêter sur le sujet. Par ailleurs, on découvre également la jeune Kiyomi, une adolescente qui rejoint un autre établissement scolaire en milieu d'année par des raisons troubles. Ces trois figures seront les piliers d'une narration qui ne veut pas dévoiler ses intentions trop précipitamment.
Une série pour les connaisseurs avant tout
Les initiés qui sont déjà entrés en contact avec Ju-On vont vite reconnaître les marqueurs de l'univers. Une maison hantée, des fantômes, une malédiction qui concerne plusieurs personnages à travers le temps... Pour eux, le plaisir est quasiment assuré, s'ils acceptent que Ju-On : Origins ne soit pas une répétition sans personnalité de ce qu'ils savent mais une réelle réinterprétation de la mythologie dont l'inspiration ne provient pas que du tout premier film, mais de l'ensemble de ce qui a été inventé par la suite. La série se fait alors une place assez étrange, en étant autant un préquel que quasiment un reboot, avec des variations qui vont faire référence à ce qu'on a vu dans les différents films. Toute la substance de Ju-On : Origins réside dans cette rencontre entre l'attendue (les origines de la malédiction ne sont pas chamboulées, par exemple) et le surprenant. Cette nouvelle monture n'a pas peur de bousculer nos connaissances et de reformuler tout un pan de la mythologie Ju-On. Au point de se hisser davantage en refonte qu'en véritable complément.
En détournant des éléments inévitables ou secondaires, la série permet aux amateurs d'avoir une lecture plus complète de Ju-On : Origins, alors les nouveaux venus vont suivre ça sans la dimension référentielle. Là se présente un petit souci : pour savourer comme il se doit toute réinterprétation, on doit connaître la base qui sert de détonateur. Il faut alors comprendre que Ju-On : Origins n'est pas forcément adressée au très grand public. Ou que celui-ci va se forger un autre rapport à la franchise en se privant d'une seconde lecture plus complexe. Une approche sous le signe de la réinvention qui s'impose comme le (seul ?) bon angle pour sortir la mythologie d'une impasse dans laquelle elle est depuis longtemps. Le dernier film a essayé de le faire en transposant le contexte aux USA mais ça n'a pas marché. En restant en terres japonaises, la série préserve l'atmosphère sourdement inquiétante de l'original, à défaut de faire véritablement peur.
De l'horreur qui manque de panache
En se désintéressant du tissage permanent avec l'univers préexistant, il reste malheureusement un show qui manque de panache. Moins des cinq doigts de la main sont suffisants pour compter les scènes qui provoquent de la terreur. La saison de seulement six épisodes de moins de 30 minutes chacun se consomme vite et on n'a que rarement le temps d'avoir peur. Les choses se gâtent à partir du quatrième épisode, avec plus de gore, d'effets graphiques et de remue-ménage.
Le plus répugnant, en dehors de quelques passages tendus, est le comportement des humains. Ju-On : Origins se concentre dans des interstices sur des écrans de télévision, avec toujours des mauvaises nouvelles aux informations. Ce n'est pas la malédiction qui est derrière tout ça mais bien des hommes et des femmes - un mal plus rationnel. Le portrait de cette société japonaise ne se veut pas gentil et la série insiste de par sa galerie de personnages : mère irresponsable, mari violent, femme infidèle, violeur, tueur d'enfants, professeur qui couche avec la mère d'une élève... Une piste à explorer plus amplement pour la probable saison suivante, quasiment annoncée par le final.
Ju-On : Origins créée par Takashige Ichise, saison 1 disponible sur Netflix le 3 juillet 2020. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.