CRITIQUE SÉRIE - Dans "Miracle Workers", Dieu en a marre et projette de faire sauter la Terre, pendant que des petits soldats s’agitent pour exaucer les (très) nombreux voeux émis par les hommes. Une comédie loufoque avec Steve Buscemi et Daniel Radcliffe au casting.
Vous êtes-vous déjà demandé, à condition d’y croire, si vos prières étaient réellement entendues par quelqu’un ? Sont-elles envoyées, telles des bouteilles à la mer, sans ne jamais trouver preneur ? La nouvelle série comique Miracle Workers apporte une drôle de réponses à ces interrogations. Là-haut, au Paradis, toutes nos requêtes sont effectivement entendues par des anges travailleurs qui agissent au nom de Dieu. Parce que, à notre grande surprise, le Tout-Puissant n’est personne d’autre que Steve Buscemi et il n'est pas optimiste sur l'avenir de l'Humanité. Affalé sur son canapé tel le Dude de The Big Lebowski, il guette aux informations le comportement plus que douteux des petits hommes. Le climat ne cesse de se dégrader à cause de nous, un drogué s'attaque à une femme et lui bouffe le visage. Plus généralement, la douleur se répand dans le monde. Et plutôt que de résoudre tous les problèmes, Dieu préfère fantasmer sur des projets irréalisables ou, pire, faire sauter la Terre. Nous croyant irrécupérables - et il y a de bonnes raisons de le croire -, il s'apprête à nous rayer de l'univers.
Dans Miracle Workers, le Paradis est présenté comme une entreprise, avec différents étages, des bureaux, une hiérarchie et des petites mains qui exécutent les ordres. Nous découvrons cet endroit en même temps qu'Eliza (Geraldine Viswanathan), une nouvelle employée affectée au service qui exauce les voeux. Elle va faire la rencontre de Craig, incarné par Daniel Radcliffe. Un geek barbu fasciné par ses machines et qui ne voit que guère la lumière du jour. Alors qu'elle s'imaginait pouvoir répondre à toutes les demandes, Eliza va se rendre compte que la tâche est plus complexe. Certains choix impliquent des dilemmes moraux et doivent suivre un vrai mode opératoire pour ne pas que l'action divine soit trop décelable.
Comme dans The Office (LA référence), cette comédie dépeint le quotidien d'un lieu de travail. Tout est fait pour que l'on découvre le fonctionnement de l'endroit. La direction artistique aide beaucoup à nous plonger dans l'univers. Les nombreux détails nichés dans les décors renforcent notre implication en nous amusant, tout en étant placé sous le signe de la cohérence. On pourrait se balader pendant des heures dans les couloirs pour découvrir les moindres recoins de cette entreprise. Mais toutes ces trouvailles ne seront que futiles si la série ne sait pas les mettre au service de quelque chose, et premièrement d'un scénario. C'est là qu'on se confronte aux limites de la série. Infiniment sympathique, elle n'est pas aussi convaincante lorsqu'elle doit passer outre son concept pour développer des personnages. L'évolution du tandem Craig/Eliza reste sur des rails sans dériver d'un chemin assez balisé que l'on prévoit. Dieu les met au défi de faire tomber amoureux un couple dans un laps de temps imparti, ou il réduira en cendres notre chère et tendre planète. En s'attelant à la tâche, comme dans tout bon développement de duo, ils vont apprendre à se connaître et faire évoluer leur relation.
On reste avec le sentiment que la série ne va pas aussi loin qu'elle le pourrait dans son délire mais ce petit bémol est compensé par un format condensé évitant de trop s'étirer pour ne rien dire - il y avait matière à faire traîner cette affaire pendant des heures en assemblant des situations décalées. Avec 7 épisodes d'une vingtaine de minutes chacun, on accepte sans peine de se laisser porter par le flux sans en attendre trop. Le premier épisode, très efficace, ne promet pas d'entrée des monts et merveilles ni une étude précise des comportements sociologico-politiques qui ont mené la Terre dans une sorte d'impasse. Cette modestie rend d'autant plus attachant Miracle Workers et provoque de la bienveillance à son encontre - son aspect réduit contraste pourtant avec la grandeur du sujet. Sans oublier le parfait Steve Buscemi qui trouve un rôle à sa taille. Excellent en Dieu au bout du rouleau, il rayonne de par son potentiel comique. Belle occasion pour rappeler qu'on aimerait tant le voir plus souvent exploité. Il n'y a donc pas de raison de ne pas se laisser tenter par cette excursion barrée qui vous fera forcément tomber sous son charme.
Miracle Workers créée par Simon Rich, saison disponible sur Warner TV à partir du 30 mars 2019. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.