CRITIQUE / AVIS SÉRIE - Avec "Money Heist: Korea" Netflix propose un remake quasi à l'identique de "La casa de papel" qui en a donc les qualités mais fait office de redite pour les adeptes de la série espagnole.
Transposition en Corée pour La casa de papel
Il n'aura pas fallu longtemps pour que La casa de papel soit remise en avant sur Netflix. La série espagnole avait connu un grand succès grâce à son concept (des braqueurs s'enferment dans la Fabrique nationale de la monnaie et du timbre pour imprimer 2,4 milliards d'euros). Mais en 2021, après quatre ans de diffusion (deux saisons réparties en cinq parties), le programme s'est terminé. C'est donc à peine quelques mois après le final qu'on retrouve la même histoire avec Money Heist: Korea, le remake coréen de La casa de papel.
La même histoire, mais avec quelques variantes. Notamment sur le lieu. Car plutôt que de simplement utiliser la Banque de Corée comme lieu de braquage, le créateur Ryu Yong-jae a imaginé un futur très proche où la Corée du Sud et la Corée du Nord auraient décidé de se réunifier - et donc de créer une nouvelle monnaie commune. Dès lors, Money Heist: Korea utilise un contexte politique pertinent, logiquement absent de la version d'origine. On sait que les relations entre les deux pays ont toujours été compliquées, même si des rapprochements ont eu lieu au fil des ans.
Une part sociale et politique notable
Au cinéma, on se souvient de l'excellent JSA (2000) de Park Chan-wook qui pointait la problématique des rapports entre coréens du nord et du sud, en mettant en cause les gouvernants avant les militaires. On retrouve cela dans Money Heist: Korea, que ce soit au sein des braqueurs, des otages ou même de la police. De plus, derrière la fiction, la série questionne les écarts toujours plus importants entre les classes. La réunification et l'immigration entre le nord et le sud provoquant davantage d'inégalités sociales. Tokyo, qui mène toujours le récit, en sera la première victime. Elle suit ainsi un parcours différent de la version d'Úrsula Corberó, avant l'arrivée du Professeur.
Ce dernier va également avoir droit à quelques légers ajustements dans sa caractérisation (et ses rapports avec la négociatrice en charge de l'affaire), tout comme le si important Berlin, moins terrifiant que dans sa version espagnole. On notera également le format différent de la série, avec six épisodes d'une heure (voire plus) pour composer une première partie qui avait eu besoin d'une bonne dizaine d'épisodes entre quarante et cinquante-six minutes. Un format plus resserré et plus direct, laissant de côté bon nombre de flashbacks sur la préparation du casse.
Une reproduction trop identique
Cependant, en dépit de ces petites variantes, Money Heist: Korea reste trop proche de son objet d'origine. Même s'il s'agit d'un remake, d'autres avant la série ont été capables d'aller au-delà du copier/coller. Le Scarface (1983) de Brian de Palma transposé avec un réfugié cubain et un style drastiquement différent, le plus subtil Les Infiltrés (2006), sans parler du récent West Side Story (2021) de Steven Spielberg. Mais le meilleur exemple serait probablement Les Sept Samouraïs (1955) devenu quelques années plus tard le western Les Sept Mercenaires (1961).
Ici, Money Heist: Korea n'a pas l'ambition de proposer quelque chose de neuf. Si ce n'est le changement de masque (oubliez le visage de Dali), que ce soit les décors, les costumes, les mimiques de certains personnages (le Professeur et ses lunettes) ou la mise en scène générale, on retrouve le même cahier des charges sur tout l'aspect visuel.
Il en va de même du côté du récit. Plutôt que de ne reprendre que le concept de base, la série coréenne reproduit chaque situations plus ou moins marquantes de La casa de papel. On aurait justement aimé voir un peu d'audace à ce niveau, un peu de surprise. Il aurait même été bien malin de rejouer une séquence mais d'en changer la finalité pour véritablement étonner les spectateurs.
Ce n'est malheureusement pas le cas avec cette première saison qui se contente de modifier légèrement les rapports des protagonistes entre eux (comme la relation entre Tokyo et Rio). Dès lors, Money Heist: Korea fait office de redite pour un public ayant déjà suivi La casa de papel il y a à peine quelques années (peut-être que le remake arrive trop tôt). Pas sûr que ces derniers y trouvent un grand intérêt. Pour les autres (qui ne doivent pas être nombreux), c'est encore une fois l'efficacité du concept qui fera la différence. Et si le rythme plus soutenu, et l'ajout d'une part socio-politique (minime, mais tout de même) sont notables, le plus grand regret serait peut-être alors que Money Heist: Korea n'ait pas été l'œuvre à l'origine de La casa de papel.
Money Heist: Korea de Ryu Yong-jae, sur Netflix à partir du 24 juin 2022. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.