CRITIQUE / AVIS SÉRIE - Petite bombe britannique débarquée sur Netflix en début d'année 2018, "The End of the F***ing World" revient pour une seconde saison qui n'a rien perdu de son ton très décalé et de son ambiance désespérée. Mais est-ce suffisant pour nous satisfaire encore une fois ?
Un coup de feu, un écran noir. C'est là-dessus que se terminait la folle échappée d'Alyssa et James dans The End of the F***ing World. Deux adolescents au bord de l'implosion avant leur rencontre. Ces freaks, bourrés de défauts, inadaptés au monde dans lequel ils vivaient, se supportaient mutuellement. Comme on se raccroche à une branche sur le point de céder, dans l'espoir qu'elle tienne encore un peu. Tels des Bonnie et Clyde, ils traversent une Grande-Bretagne inhospitalière, que la direction artistique se chargeait de rendre lourde, sombre et dépressive. Mais toute cette noirceur était magnifiquement compensée par un humour anglais au cordeau, décalé. Et également par une vraie sensibilité, lorsque la mise en scène très marquée s'employait à décrire les sentiments des deux jeunes héros.
Si rien n'avait été confirmé par l'image, l'effroyable détonation finale laissait fortement penser que James avait été abattu par la police. Alors qu'Alyssa, elle, venait de perdre le dernier repaire qu'elle avait sur cette terre. Une fin tragique pour une histoire d'amour atypique. Tel aurait pu être le point final de The End of the F***ing World si cette seconde saison n'avait pas vu le jour. Un dernier acte que l'on trouvait assez cohérent par rapport au reste de la série. Alors, on en vient forcément à se demander ce que ces nouveaux épisodes peuvent raconter et où se situera l'originalité.
Le duo devient un trio
Le petit plus de cette saison s'illustre dès le premier épisode. Ce n'est pas avec Alyssa et James que l'on reprend la route mais avec une certaine Bonnie, interprétée par Naomi Ackie (prochainement à l'affiche de Star Wars : L'Ascension de Skywalker). La série emploie les mêmes procédés pour introduire ce personnage, à savoir une voix-off qui nous plonge directement dans le cerveau de la concernée. On la découvre dans son enfance puis en train de nouer une relation étrange avec un professeur. Ce dernier s'avère être l'homme tué par James dans la saison 1.
Après une grosse vingtaine de minutes à comprendre qui est Bonnie et quelle sera sa place dans l'histoire, on peut enfin reprendre là où tout s'est arrêté. Notre couple n'est plus ensemble à la suite des événements que l'on connaît. On ne vous cache pas qu'ils ne vont pas mettre longtemps à se retrouver, rejoint sur la route par Bonnie, pour former un improbable trio. Car la jeune femme veut se venger d'eux pour lui avoir retiré l'homme qu'elle aimait. La présence d'un élément perturbateur au milieu de deux personnages déjà imprévisibles apporte un peu de peps mais ne révolutionne pas dans l'esprit de la série. Bonnie est autant paumée qu'eux, ce qui ne révolutionne en rien la recette The End of the F***ing World. Elle apparaît plus comme un prétexte pour que la série continue, sans que son utilisation ne soit assez pertinente pour justifier l'existence de cette seconde saison.
Ambiance intacte et intérêt moindre ?
Sur la forme, il n'y a pas grand chose à redire. The End of the F***ing World a préservé son imagerie sombre, terne. L'avenir ne s'annonce pas plus radieux qu'avant et la mise en scène continue d'employer une vraie force picturale pour illustrer les tourments des personnages. Les différents réalisateurs qui emballent les épisodes ont une facilité déconcertante pour créer de l'image qui frappe la rétine. Quand bien même si les symboles sont multiples et que la musique surligne tout, on ne peut que retomber sous le charme de cet univers dépressif. On pense un peu au cinéma de Xavier Dolan, toutes proportions gardées, qui sait employer les grands moyens pour parler de sentiments forts. The End of the F***ing World en fait de même, arrivant dans ses instants les plus gracieux à nous serrer la gorge. Comme lorsque James tombe en larmes dans la chambre d'hôtel, face à Alyssa, et qu'elle l'embrasse.
Ce nouveau voyage plaira forcément aux fans de la première heure, qui retrouveront des sensations qui font tout le charme de la série. La durée toujours très courte des épisodes (aux alentours des 20 minutes) permet d'enchaîner sans qu'on ne soit pris par la lassitude mais on se rend compte, en fin de course, que tout ça n'a pas été d'un très grand intérêt. Probablement parce qu'il ne pouvait en être autrement avec ces jeunes qui ne savent quoi faire de leur tristesse. Si ce n'est tourner en rond, comme des fantômes, coincés dans une maison à l'abandon, bien trop grande pour eux.
The End of the F***ing World créée par Jonathan Entwistle, saison 2 disponible à partir du 5 novembre 2019 sur Netflix. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.