The OA : une saison 2 encore plus dingue

The OA : une saison 2 encore plus dingue

CRITIQUE SÉRIE - Plus de deux ans d'attente. La série Netflix "The OA" aurait mis du temps pour revenir avec une seconde saison et devra confirmer tout le bien que l'on pensait d'elle. À condition de ne pas être hermétique à sa grande liberté narrative, formelle et thématique.

En 2016, la foudroyante série The Leftovers n'avait pas encore achevé ce qu'elle avait à faire. Avant sa conclusion, en été 2017, une nouvelle création dans la même veine débarque sur Netflix : The OA. S'il ne nous viendrait pas à l'idée de la hisser au niveau du chef d'œuvre de Damon Lindelof et Tom Perrotta, on y retrouvait des sensations similaires - nous y reviendrons plus tard. Créée par Brit Marling et Zal Batmanglij, The OA débutait sur un mystère des plus étranges. Prairie (Brit Marling) réapparaît quelques années après avoir été portée disparue. Anciennement aveugle, elle refait surface en s'étant débarrassé de son handicap. Comment un tel changement a-t-il pu avoir lieu? Et, surtout, que lui est-il arrivé durant son absence ? Ses parents adoptifs, les professionnels chargés d'élucider ce mystère, ou encore la presse, se posent des questions légitimes sur son cas. Prairie ne veut pas rependre sa vie d'avant et entreprend de trouver des partenaires pour une expérience qui va repousser les limites de l'existence humaine.

Suite aux événements de la première saison, Prairie se réveille à l'hôpital. Elle ne mettra qu'une poignée de minutes avant de saisir qu'elle est toujours en 2016, mais dans une autre dimension où Obama n'a jamais été président. Sa nouvelle identité est celle de Nina Azarova, descendante d'une riche famille russe. Grâce à la danse qu'elle a voulu inculquer à ses amis, Prairie a réussi encore une fois à voyager avec pour objectif de retrouver Homer. Un premier objectif atteint qui est le point de départ d'une aventure déconcertante. Prairie/Nina va croiser la route de Karim, un ancien policier reconverti en détective privé, lancé sur les traces d'une jeune fille disparue dans des conditions indéfinies. Ensemble, ils vont chercher la vérité, pendant que Hap, lui aussi réincarné dans cette dimension, prolonge ses expériences en toute impunité. BBA et les adolescents restent sans nouvelles de Prairie et veulent savoir ce qu'il est advenu d'elle.

Une double progression narrative qui ne va pas plaire aux détracteurs de la première saison. Pour eux, cette seconde partie ne va en rien modifier leur approche et risque même de les agacer ou les perdre davantage. Car The OA demande un véritable investissement, une volonté. On en revient à la comparaison avec The Leftovers, un autre show qui demandait que le spectateur questionne ses propres croyances pour ne pas rejeter ce qui se jouait sous ses yeux. Il fallait effectivement une certaine ouverture d'esprit pour ingurgiter puis digérer la première saison placée sous l'autel si clivant du mystique. Si simple, pourtant, était-il possible de se moquer en voyant un groupe d'inconnus exécuter une danse fantasque, car ils avaient choisi de croire en cette femme au visage angélique.

Zal Batmanglij et Brit Marling continuent dans la seconde saison à dresser les fondations de leur monde à la croisée des dimensions. Ils redéfinissent les limites entre la Vie et la Mort, créent des ponts entre plusieurs axes narratifs et font émerger d'un océan de questionnements, une voie parallèle. Dans la première partie diffusée en 2016, le téléspectateur était en droit de se méfier. Prairie mentait-elle ? Désormais, la complexe mythologie The OA ne peut être réfutée et devient un terrain de jeu en forme de casse-tête. Un Rubik's Cube que nous triturons dans tous les sens pour déchiffrer toutes les faces. C'est ce qui lui fait sans doute perdre un peu de l'émotion indestructible ressentie lors de la saison 1. La série a gardé néanmoins intacte cette capacité à nous fasciner par son agencement des pièces d'un puzzle plus colossal qu'on ne pouvait l'imaginer. Toujours rattachée à la SF et au fantastique, The OA se forge une singularité par son jusqu'au-boutisme - aussi difficile est-il à encaisser dans ses moments de pure loufoquerie formelle et symbolique.

La folie qui en émane en laissera plus d'un sur le carreau, désabusé ou captivé. Comme Twin Peaks ou The Leftovers, les différentes portions de ce grand manège mystico-métaphysique seront sujettes à des interprétations diverses et variées. C'est cette richesse qui rend si difficile l'exercice de la critique dans le cas de ce type d'objet. Mais Batmanglij et Marling ne nous servent pas un gloubi-boulga informe et savent dans quelle direction, aussi baroque soit-elle, ils désirent aller. Les deux auteurs ne craignent pas l'excès, ce qui confère à The OA une vraie amplitude dans son cheminement, nous conviant à pénétrer dans des contrées qui dépassent l'entendement. La série touche également du doigt un sentiment de malaise contemporain avec la quête de BBA et des adolescents. Ces âmes perdues poursuivent un ailleurs, dans une fuite en avant dont ils ne sont pas assurés de la finalité. Le show apporte deux réponses à cette errance. L'espoir d'une autre vie, en cassant les frontières d'une dimension que l'on croyait unique. Et par la communion, résultat d'une danse en 5 mouvements. Communion des corps, des cœurs, des émotions. Communion à laquelle le spectateur peut prendre part, s'il ne se cogne pas contre les parois de sa propre spiritualité.

The OA créée par Zal Batmanglij et Brit Marling, saison 2 disponible sur Netflix à partir du 22 mars 2019. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.

Conclusion

Note de la rédaction

The OA continue de parler aux convaincus mais ne va certainement pas aider les réticents à pénétrer dans cet univers fou.

Note spectateur : Sois le premier