CRITIQUE / AVIS SÉRIE - La série de Gideon Raff, interprétée et produite par Sacha Baron Cohen, retrace la vie d'espion d'Eli Cohen, infiltré au coeur du pouvoir syrien au début des années 60. Une surprise de taille, avec un acteur qui utilise son art expert du déguisement pour changer radicalement de registre.
À voir la bande-annonce, et aussi sérieux qu'on voudrait l'être, la vue de Sacha Baron Cohen moustachu, vêtu d'un costume et parlant anglais avec un accent, on ne peut s'empêcher de sourire. Les personnages qui l'ont rendu célèbre, comme Borat, Brunö, ou encore Ali G, reviennent en flashs hilarants. Si, dans The Spy, SBC revêt un nouveau costume, il est cette fois-ci très sérieux, puisqu'il s'agit des habits d'Eli Cohen, considéré comme le meilleur espion israélien de l'histoire, démasqué et exécuté à Damas en 1965. Une histoire vraie donc, et surtout une histoire plutôt sombre. On a pu voir en avant-première les deux premiers épisodes, et en tirer quelques enseignements.
Une autre dimension de Sacha Baron Cohen
On retrouve dès les premiers plans le style de Gideon Raff, à la manière de Homeland. L'introduction montre dans un montage complexe l'issue de l'intrigue, et les six épisodes de la mini-série vont s'appliquer à faire le récit des différents évènements qui ont mené Eli Cohen à ce terme. La reconstitution de l'époque, le début des années 60, est réussie, avec une forme d'économie qui se marie bien à la tension, omniprésente. Si la narration est patiente, Eli Cohen l'est moins, et il est constamment en mouvement. Génie du comédien, comme pour ses autres rôles, on oublie instantanément Sacha Baron Cohen pour ne plus reconnaître qu'Eli Cohen, et sa légende, Kamel Amin Thaabeth.
Il y a un vertige dans The Spy, qui vient de son évidence : quel meilleur rôle pour Sacha Baron Cohen que celui d'un agent secret ? Ou plutôt, quel meilleur comédien que Sacha Baron Cohen pour incarner un rôle de dissimulateur ? L'un dans l'autre, le comédien britannique réussit au-delà des attentes sa prestation, avec une aisance à jouer toutes les émotions. D'abord simple comptable dans un grand magasin de Tel Aviv, Eli Cohen est recruté par le Mossad pour infiltrer le gouvernement syrien, avec une formation accélérée. Son recruteur Dan Peleg (Noah Emmerich, excellent lui aussi), l'aura formé au bout du premier épisode, au terme duquel Eli Cohen endosse sa nouvelle identité, celle d'un riche homme d'affaires syrien.
Une série d'espionnage élégante et appliquée
Il y aura quelques moments d'action, mais l'intrigue évoluera essentiellement par les rencontres d'Eli-Kamel, par le charme qu'il met en oeuvre pour, en premier lieu, s'introduire dans la classe gouvernante syrienne par son ambassade en Argentine. Et pendant que Kamel progresse dans sa mission, Eli vit aussi des bouleversements dans sa vie personnelle, avec sa femme Nadia, à Tel Aviv qui le pense simplement acheteur pour le gouvernement.
Ces deux premiers épisodes montrent un Sacha Baron Cohen complètement investi dans son double rôle, avec un plaisir non-dissimulé. Ils montrent aussi une bonne maîtrise de la fiction d'espionnage, avec son lot d'ombres furtives, de rencontres nocturnes et de chuchotements. Évidemment, si The Spy est inspirée de la vie du véritable Eli Cohen, sa qualité d'espion fait qu'on ne sera jamais en mesure de distinguer la réalité de la légende...
Gideon Raff, dans une veine moins spectaculaire que son Homeland, livre a priori une production élégante, surprenante, qui tend à demander une certaine patience au spectateur pour apprécier toute la qualité de la série. Reste à voir la totalité des épisodes, qui seront disponibles sur OCS à partir du 7 septembre en France. Pour une coproduction Canal + - Netflix, c'est un autre brouillage de pistes. Mais c'est pour le moment plutôt réussi !
The Spy, de Gideon Raff, sur OCS à partir du 7 septembre 2019. Retrouvez ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.