CRITIQUE / AVIS SÉRIE - Octavia Spencer ressort une affaire judiciaire enfouie pour faire éclater la vérité dans "Truth Be Told". Nous avons pu voir les premiers épisodes de cette nouvelle création pour la plateforme Apple TV+. Et notre verdict sera quelque peu mitigé.
Pour ses premières semaines d'existence, Apple TV+ propose une gamme de programmes variée afin de toucher à tout et, donc, par extension, plus de monde. Les débuts timides de la plateforme ne sont pas encore alarmants mais on attend qu'elle sorte l'artillerie lourde afin de faire du bruit dans le milieu. On a eu un drama prestigieux avec The Morning Show, le blockbuster See, Dickinson et Ghostwriter pour un public plus jeune, puis Servant, la série fantastique produite par M. Night Shyamalan. Il manquait un peu de judiciaire dans le panier et ce trou vient d'être comblé avec le début de Truth Be Told. On sait que le genre passionne les foules. Netflix, de son côté, s'en est rendu compte depuis longtemps en multipliant les séries ou les docuséries.
Truth Be Told présente le personnage de Poppy, une podcasteuse qui ressort le dossier Warren Cave des archives. L'homme a été condamnée à perpétuité pour le meurtre d'un père de famille. Mais notre héroïne sent que le procès n'a pas été correct et que des choses sont à découvrir pour prouver son innocence. Elle va se replonger dans l'affaire et entrer en contact avec Warren, ainsi que son entourage. Ses doutes vont petit à petit se confirmer. La vérité doit éclater, même si elle n'est pas bonne à entendre pour tout le monde.
Les podcasts criminels sont à la mode depuis des années, surtout chez nos amis américains. D'ailleurs, plusieurs séries s'inspirent des histoires réelles racontées par ce médium. Poppy n'est pas flic mais elle a de la témérité et compte bien remuer les gens qui gravitent autour de l'accusé. Ce point de départ est résolument moderne pour s'inscrire dans notre époque où le podcast s'empare de nos appareils mobiles. Il permet de passer outre le traditionnel décorum des polars, avec les bureaux, les flics dans le doute, une hiérarchie à affronter.
Un personnage principal réussi
Poppy, elle, est libre. Son personnage est assez intéressant sur le papier parce qu'on est loin des standards que la télé ou le cinéma ont voulu mettre en place pendant des années. Le présence d'Octavia Spencer en tête d'affiche permet d'avoir une héroïne avec un profil "différent" - si on peut se permettre le terme. De couleur, ronde, pas identifiée comme actrice de polars, elle ne remplit par les cases souhaitées de prime abord dans le genre. Comme ça a été le cas, d'une autre manière, avec Sandra Oh, dans Killing Eve. Pas étonnant que ces deux séries arrivent après la remise en question de l'industrie suite au scandale #Metoo. Et Truth Be Told traite Poppy comme quelqu'un de normal, avec ses histoires de cœur, son passé, ses amis, sa vie active. Sans appuyer sur ce qui pourrait être des marqueurs de différence. La série compose un beau personnage mais ce n'est hélas pas suffisant pour se hisser au niveau de la création de Phoebe Waller-Bridge.
Une narration trop disparate
Comme dans les plus passionnants podcasts criminels, on aurait aimé que Truth Be Told se concentre plus sur le personnage de Warren dans une sorte de ligne droite. Ce dernier, incarné par un excellent Aaron Paul, est trop mis en retrait. Du moins dans les premiers épisodes qui ont été à notre disposition. La série aurait pu s'agencer autour d'échanges tendus en prison, avec en arrière-plan les personnages qui gravitent autour du condamné. C'est malheureusement l'inverse qui se passe et on s'en serait passé. En particulier de cette axe secondaire sur les deux jumelles séparées. À force de s'éparpiller dans sa recherche de vérité, Truth Be Told ne parvient pas à créer une atmosphère qui fait émerger un début de tension. La série opte d'ailleurs pour quelques étranges incartades stylistiques assez incompréhensibles pour soutenir une tonalité plus pop/légère. Chose qu'on a un mal fou à comprendre tant l'ensemble est déjà en difficulté pour susciter de la gravité. Comme par hasard, ce problème se règle dès qu'Aaron Paul entre en scène. Signe qu'il y avait une meilleure route à prendre.
Truth Be Told en devient un crime drama un peu pataud, trop lent dans le déballement de ses éléments (au bout de deux épisodes, on a l'impression que rien n'a avancé). Le programme est sauvé par une partie de sa distribution mais certainement pas par sa construction. Alors qu'il aurait pu avoir un quelque chose d'original en exploitant l'univers des podcasts, il ressemble à un feuilleton du samedi soir, légèrement haut de gamme, mais guère de trop. Quand on a déjà avalé les principaux titres de Netflix dans le genre, on ne peut qu'afficher un ennui poli devant Truth Be Told.
Truth Be Told créée par Nichelle Tramble Spellman, saison 1 sur Apple TV+ à partir du 6 décembre 2019. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.