CRITIQUE / AVIS SÉRIE : Après le succès de sa première saison, "Validé" est de retour avec de nouveaux épisodes et une nouvelle héroïne. Toujours avec William, Brahim, Mastar et Inès, Franck Gastambide réussit parfaitement sa deuxième saison, plus mature et pas moins spectaculaire.
Validé : au sommet du TV game
En son temps, pas si lointain, Mathieu Kassovitz disait du Bureau des légendes, célèbre création originale de Canal +, qu'elle pourrait durer longtemps parce qu'elle avait "des jambes". Une expression qui désigne une série à l'univers et à la narration assez solides pour continuer à exister au plus haut niveau. C'est exactement ce qu'on peut dire de Validé et de sa saison 2, qui reprend ce qu'elle avait sorti de meilleur pour sa première saison et propose dans le même temps de nouveaux visages avec de nouvelles histoires.
La première saison, qui racontait le destin fulgurant du jeune rappeur Apash - aka Clément, avait déjà été un carton. Une surprise alors "validée" par le public sur l'envers méconnu d'un univers musical qui fait rêver et interroge : le rap français. À la fin de cette première saison, Apash disparaissait dans des circonstances tragiques, laissant les spectateurs embarrassés. Que faire et qui suivre maintenant ?
Faites place à Sara aka "L'Alpha"
On le savait, le premier rôle de cette nouvelle saison serait dévolu une jeune rappeuse. Mais on avait beau le savoir, la surprise reste belle et entière. Sara, interprétée par Laetitia Kerfa, est une jeune femme originaire de Marseille où elle faisait partie d'un groupe de rap. Du temps et de mystérieux déboires passés, elle vit maintenant en région parisienne et travaille dans un magasin de sport. Le rap est de l'histoire ancienne, jusqu'à ce que William et Brahim entreprennent de la signer dans le label qu'ils viennent de créer : Apash Music. Entre sourire désarmant, passé trouble et punchlines assassines, Laetitia Kerfa prend la lumière dès sa première apparition et ne la lâche plus !
Le premier épisode de la nouvelle saison est formidable. On retrouve d'emblée l'humour et le rythme enlevé de la série de Franck Gastambide, les anciens personnages et les nouveaux. À la manière de la première saison, qui introduisait Apash avec un freestyle d'anthologie sur Planète Rap, cette fois-ci c'est au tour de Sara de montrer son talent à la soirée de lancement d'Apash Music. Un freestyle lui aussi d'anthologie qui enflamme les invités de la soirée autant que les spectateurs. Cerise sur le gâteau, on retrouve dans ce premier épisode Nabil (Youssef Hajdi). Le personnage, passé des voitures de luxe à la vente de meubles, est toujours aussi hilarant.
À l'épreuve du grand monde
William (Saïdou Camara) et Brahim (Brahim Bouhlel) ont créé Apash Music pour s'installer dans le milieu du rap et rendre hommage à leur pote Clément. Évidemment, jeunes, naïfs et encore sans expérience, ils vont essayer de s'en sortir tant bien que mal dans ce monde de requins. L'idée est simple et elle fonctionne parfaitement. En effet Franck Gastambide et ses auteurs réussissent à montrer les difficultés du milieu au travers de William, qui lutte pour réussir à signer Sara et lancer son album, et avec Sara elle-même, qui en tant que jeune femme doit travailler deux fois plus et accepter des compromis pour exister dans l'univers du rap, hyper masculin.
Sans lourdeur, sans faire la leçon mais avec une jolie perspicacité, les personnages passent par des épreuves qui disent quelque chose de notre temps. Il y a le sexisme, il y a la loi inflexible du marché, les violences conjugales aussi, et Validé s'en saisit et réussit un beau portrait d'une jeunesse qui hésite, tâtonne, mais lutte avec enthousiasme.
C'est tout à l'honneur des auteurs de la série d'avoir naturellement mis au centre de cette saison l'ascension compliquée d'une jeune artiste, avec pour soutenir le rôle de Sara celui d'Inès (Sabrina Ouazani) et celui de sa meilleure amie Fatou (Fatoumata Kaba). Si cette dernière est surtout concernée par un flirt naissant avec Brahim, elles ont cependant toutes les trois une allure de grande force tranquille. Elle sont parfaitement là où elles sont, et face à la maladresse du jeune manager William ou les attitudes ultra-virilistes de Karnage et Mastar, entre autres, leurs partitions sont idéalement menées. Avec ses guests prestigieux comme, entre autres, Alonzo, Naps et Soolking, Validé emprunte maintenant à la fois autant à Dix pour cent qu'à Engrenages, bien équilibrée entre le spectacle du rap game et le drame réaliste.
Une nouvelle saison plus mature
Il y a face à eux les "vieux". On retrouve ainsi les grands noms du game comme Mastar (Moussa Mansaly), DJ SNO (Franck Gastambide), Karnage (Bosh), le producteur Cichemann (Dimitri Storoge). Ceux-là accompagnent la jeune génération autant qu'ils la contrôlent. Mastar, dont le rôle prend de l'importance et que Moussa Mansaly incarne à la perfection, a du mal à garder son rang et repart en embrouille avec Karnage. Cichemann n'entend pas d'une bonne oreille la création du label Apash Music et DJ SNO essaye tant bien que mal de se tenir à distance des embrouilles qui concernent Sara...
On note dans cette nouvelle saison de Validé les présences légères mais réussies de Rohff et Saïd Taghmaoui. Ils y incarnent des figures ambiguës, et parfois effrayantes, qui viennent peupler et animer violemment le quotidien de Sara et de William. Avec eux, la série prend définitivement un tournant policier, rajoutant à l'affaire de la mort d'Apash une menace inquiétante. En couplant à ça une réduction harmonieuse de la part de l'humour - on ne revoit pas Nabil et Brahim réduit progressivement son aspect "bouffon" - la série s'autorise à montrer des pures séquences de polar, armes à feu et guet-apens à la clé. Si cette dimension existait déjà dans la première saison, elle est ici intensifiée et les quelques cliffhangers qui ponctuent la saison sont du plus bel effet.
Ça valide très fort
Globalement, Validé saison 2 est une très franche réussite et un bel étendard de la création originale Canal +. Elle réussit même, au-delà du seul milieu du rap game, à traiter au premier degré et avec justesse de problématiques de représentation sociale et culturelle. Des problématiques sur lesquelles beaucoup de films et de séries se cassent les dents. Loin devant Caïd, Mortel ou Narvalo, la série Validé se prend en effet tout simplement au sérieux et le fait avec brio. On en veut encore.
Validé de Franck Gastambide, à partir du 11 octobre sur Canal+. Ci-dessus la bande-annonce. Retrouvez ici toutes nos bandes-annonces.