À l'occasion de la sortie des "Indestructibles 2" au cinéma le 4 juillet, retour sur le si génial premier volet.
Le 24 novembre 2004 débarque sur nos écrans Les Indestructibles. Il faut re-contextualiser cette date dans l’histoire récente des super-héros au cinéma pour comprendre le choc qu’a été le sixième film des studios Pixar. En 2004, le Marvel Cinematic Universe n’existe pas, les super-héros n’ont pas envahi les salles obscures. Nous sommes au début d’un cycle, à l’époque où Sam Raimi fait sa trilogie Spider-Man, où les X-Men commencent à se montrer et où quelques autres personnages de l’univers Marvel ont droit à leur film (Hulk, Daredevil).
Si maintenant nous avons l’habitude de les voir, le public de l’époque les désire. Parce que les progrès technologiques permettent désormais de donner vie aux personnages qu'ils ont aimé suivre au travers des pages de leurs comics favoris. Si on se montre volontairement schématique, rappelons que le cinéma de super-héros se résume, avant les années 2000, à des Batman par Tim Burton, le Superman incarné par Christopher Reeve puis pas grand-chose. Il y avait une place à prendre. Dans cette nouvelle ère qui s’ouvre, arrive la famille Parr pour mettre son grain de sel. Pixar va livrer là, ce qui reste encore à ce jour, comme l’un des meilleurs films de super-héros de tous les temps.
Du cinéma animé pour toute la famille
Les préjugés veulent que l'animation soit un genre perçu comme destiné qu'aux enfants. Ce qui est totalement faux. À chaque film, Pixar a prouvé qu'ils trouvaient le moyen d'atteindre autant les enfants que les adultes. Leur succès s'est construit là-dessus, sur des concepts géniaux pensés pour que n'importe quelle génération y trouve son compte. Les Indestructibles en est l'exemple le plus frappant. Parce qu'après cinq films dans lesquels les personnages principaux étaient des animaux, des jouets ou des monstres, le studio ose enfin mettre en scène des humains. L'intelligence de Brad Bird, scénariste et réalisateur, est alors de ne pas se concentrer sur un seul super-héros, mais sur une famille entière. Parfait pour parler aux hommes, aux femmes et aux enfants par le biais de différents niveaux de lecture.
Dès son ouverture, le film fait la part belle aux adultes en enchaînant des bouts d'interviews de M. Indestructible, sa femme Elastigirl, leur ami Frozone. On y parle de ménage, de shopping, de belles nanas, tout en évitant quelques grossiers stéréotypes. M. Indestructibles dit qu'il aimerait une vie simple, fonder une famille. Elastrigirl aime faire du shopping, mais elle invite surtout à ne pas laisser les hommes sauver le monde ("Les filles ! Laisser les hommes sauver le monde ? Pas question"). Frozone parle du célibat et de draguer des filles.
En deux minutes, Les Indestructibles attrapent le public adulte en leur parlant de choses qu'ils connaissent. 10 minutes après, lorsqu'on les retrouve avec 15 ans de plus, le film continue d'évoquer des situations qu'ils ont forcément connu : se rendre dans le bureau du directeur parce que son enfant a fait une bêtise, le boulot avec un patron insupportable, les repas en famille, gérer les conflits entre les progénitures, la prise de poids avec le temps et la routine. L'humour n'est jamais bien loin et la mayonnaise prend irrésistiblement parce que le discours se montre moderne.
Les enfants, eux, trouvent d'autres points d'accroches grâce aux personnages de leur âge. Des adolescents rebelles, parfois frimeurs, qui sont comme chien et chat mais qui, au fond, s'aiment. Quiconque visionne le film peut trouver un personnage auquel il arrivera à s'identifier. Là où, en général, un superhero movie met en lumière un seul héros solitaire comme centre névralgique, Les Indestructibles trouve un parfait équilibre narratif pour ne négliger aucun membre de la famille.
Voilà en grande partie pourquoi, 14 ans après, la suite est tant attendue par un grand public. En couvrant un large spectre générationnel allant du bébé aux parents quarantenaires, Les Indestructibles 2 se pose comme un objet qui peut toujours parler au public de l'époque ayant grandi de son côté. L'enfant qui avait 10 ans à l'époque comprendra en 2018 d'autres problématiques évoquées par le film.
De l'action spectaculaire
Qui dit super-héros, dit action. Les Indestructibles n'échappe pas à la règle et se montre tout aussi convaincant dans ses péripéties. Comme n'importe quel grand spectacle live, le film est redoutablement rythmé, alternant les pauses et les grands moments épiques, les emprunts aux films d'espionnage et les références au monde des comics. Tout ce qu'il entreprend, il le réussit. L'humour marche, les scènes d'action sont trépidantes.
L'affrontement final est particulièrement intéressant à analyser, parce qu'il prouve l'immense talent de Pixar pour mettre son savoir-faire technique au service d'un découpage fluide et dynamique. Chaque plan a l'air pensé avec précision pour rendre la scène jouissive sans jamais entraver la sacro-sainte lisibilité. Il ne nous reste plus qu'à savourer l'alliance entre les différents personnages et leurs pouvoirs. Ils sont tous des maillons essentiels pour vaincre l'Omnidroid. C'est Avengers avant l'heure, une ode à la coopération !
La réussite des Indestructibles est d'autant plus estimable qu'elle ne se base sur aucun comics existant ! 95% des films de super-héros sont tirés d’œuvres les ayant au préalable fait connaître. Le public retrouve sous une autre forme des personnages familiers. Le principal argument de vente est d'ailleurs basé là-dessus. On recense très peu de films ayant osé, dans le genre, proposer des personnages inédits. Que ce soit avant ou après. Pixar a prouvé avec Les Indestructibles que c'était possible, en récoltant un joli succès à hauteur de 633 millions de dollars à travers le monde. La famille Parr n'avait jamais existé. Et tout le monde l'a adopté.
14 ans après, c'est avec toujours autant de plaisir que l'on se replonge dans cette première aventure. Pixar n'a jamais été aussi fort qu'avant les années 2010. De cette période, on retiendra Toy Story, Monstres & Cie mais aussi deux grands films : Les Indestructibles et Là-Haut - ceux qui ont mis en scène des humains. Deux films qui nous paraissent à la fois si éloignés de la réalité, par le prisme de l'animation, et pourtant si proches de ce qui constitue fondamentalement la puissance de l'existence humaine. La famille et l'amour. La vie et la mort.
Les Indestructibles 2 sort au cinéma le 4 juillet 2017 et notre critique est déjà disponible ! Ci-dessous la bande-annonce :