A l'approche de la sortie de "La forme de l'eau", retour sur "Blade II", l'une des nombreuses réussites du génial Guillermo Del Toro. Dans ce blockbuster qui annonce "Hellboy", on retrouve de nombreux éléments chers au réalisateur, à commencer par son amour pour les monstres.
Black Panther a enfin remis un super-héros noir sur le devant de la scène. Si cela est suffisamment rare pour être souligné, ce n'est en revanche pas la première fois, comme on a pu le lire ici et là. En 1998 sortait Blade, premier opus réussi de Stephen Norrington sur les aventures du Diurnambule tiré d'un comics Marvel créé en 1973.
Quatre ans plus tard, Guillermo Del Toro a surpassé son prédécesseur avec le deuxième épisode. Dans Blade II, l'être mi-humain mi-vampire repart en chasse mais doit cette fois-ci faire équipe avec les suceurs de sang. Face à eux se dresse Jared Nomak, le porteur d'une nouvelle espèce qui pourrait anéantir l'humanité mais aussi les vampires. Derrière la traque sans pitié du Reaper se dessine une histoire familiale complexe et tragique.
Sorti en juin 2002, Blade II représente le blockbuster estival dans tout ce qu'il a de meilleur. Si certains effets spéciaux ont vieilli depuis, il est difficile de ne pas se laisser entraîner par le rythme et les chorégraphies du film. Meilleur épisode de la trilogie, Blade II donne également un avant-goût de la suite de la filmographie de Del Toro, à commencer par Hellboy.
Un film qui préfigure Hellboy
Guillermo Del Toro n'a jamais caché qu'il aimait les monstres et cela se ressent parfaitement dans Blade II. Dans ce deuxième épisode, quatre espèces s'affrontent et s'avèrent toutes plus impitoyables les unes que les autres. Entre les traîtres humains et Nomak et ses Reapers, on se demande parfois lesquels sont les plus redoutables. Au milieu de la noirceur ambiante se dresse le super-héros qui tente tant bien que mal de rétablir l'équilibre.
Le film précède les deux épisodes de Hellboy et affiche avec eux de nombreux points communs. Tout d'abord, la présence de Ron Perlman aux côtés des excellents Wesley Snipes et Kris Kristofferson n'est pas anodine. Les scènes dans les égouts, qu'affectionne particulièrement Del Toro, sont également présentes. Les costumes des vampires lors d'une superbe attaque du hangar de Blade sont semblables à celui du redoutable Johann Kraus dans le premier Hellboy. Enfin, c'est surtout le personnage de Jared Nomak qui annonce l'excellent Prince Nuada d'Hellboy II, également interprété par Luke Goss. La récurrence des thèmes abordés dans ces trois longs-métrages ne les empêchent cependant jamais d'être singuliers.
Une multitude d'idées de réalisation qui s'enchaînent à un rythme effréné
Si Blade II comporte bien la patte de son auteur, il n'oublie jamais d'être cohérent avec le premier épisode. Néanmoins, le film se rapproche davantage du comics dans sa façon de présenter un super-héros plus drôle et plus loquace. Le réalisateur a donc parfaitement digéré ses modèles. Il a su apporter son identité à l'univers de Blade sans jamais le dénaturer.
Son film brille grâce à son équipe de guerriers badass, semblable à celle d'Aliens de James Cameron. L'attention portée aux détails et à l'univers des vampires impressionne, en particulier dans la scène de la boîte de nuit. Les scènes de combat sont chorégraphiées d'une main de maître par le cador Donnie Yen, qui a d'ailleurs un temps de présence bien trop court à l'écran. Mais surtout, le film n'oublie aucun de ses personnages, de son héros qui garde toujours sa part de noirceur à son antagoniste sorti tout droit d'une tragédie grecque.
Blade II : Un film visionnaire ?
De nombreuses séquences du film font penser à Matrix Reloaded, qui sortira un an plus tard. Dans l'une d'entre elles, Blade chasse des vampires à moto dans une sombre ruelle. Les similitudes avec l'introduction durant laquelle Trinity attaque un immeuble en deux roues sont largement perceptibles. Que ce soit dans l'ambiance gothique ou dans la manière de dynamiser les combats, Blade II se révèle tout aussi innovant que le long-métrage des soeurs Wachowski. Guillermo Del Toro n'a décidément pas voler son titre de réalisateur visionnaire.
Par ailleurs, la bande-originale, à l'instar de celle de Black Panther, bénéficie de la présence d'artistes en grande forme. Alors que Kendrick Lamar, Schoolboy Q ou Future viennent d'honorer le roi du Wakanda, Blade pouvait quant à lui compter sur le soutien de Mos Def, The Roots, Redman ou Gorillaz.
Blade II est sorti la même année que Le Seigneur des anneaux : Les deux tours, Minority Report, Spider-Man ou encore La mémoire dans la peau. Cette époque bénie du blockbuster a redéfini certains standards en termes de réalisation et Guillermo Del Toro y a brillamment apporté sa touche. Le film récolta 155 millions de dollars au box-office mondial pour un budget estimé à 54 millions. Par la suite, Guillermo Del Toro enchaîna les succès jusqu'à La Forme de l'eau, en salle dès le 21 février. Le 4 mars prochain, le film remportera peut-être l'Oscar du Meilleur film. Guillermo Del Toro n'aura quant à lui pas démérité s'il repart de la soirée avec la statuette du Meilleur réalisateur.