Après une petite liste de petit classique des années 80, voici la suite avec quelques très bons films des années 90 à ne pas oublier.
Tout comme les années 1980, les vidéoclubs durant les années 1990 régnaient en maître et renferment de petits chefs-d’œuvre. Votre aimable serviteur, alors en pleine puberté, continuait à explorer le septième art. Voici une petite sélection de films à voir ou à revoir.
Cyrano de Bergerac (1990) : ce n’est pas un nez, c’est une péninsule !
En 1990, Jean Paul Rappeneau sublime cette œuvre lyrique au cinéma. Gerard Depardieu interprète, toute en éloquence, mais sans jamais que cela soit excessif, le fameux cadet de Gascogne, Cyrano de Bergerac. Ce dernier est éperdument amoureux de sa cousine Roxane. Mais un visage qu’il juge trop laid au milieu duquel s’étend un nez très gros… Que dis-je péninsulaire, l’interdis de dévoiler tout sentiment à la femme qu’il aime. Mais il demeure un poète à l’éloquence aussi aiguisée que son épée. Roxane lui avoue son amour pour le jeune et beau Christian de Neuvillette (Vincent Perez). Secrètement brisé, Cyrano se laisse emporter par son humeur romantique et prête ses mots au vainqueur.
Jean-Paul Rappeneau et Jean-Claude Carrière ont réussi un pari fou. Tout comme Cyrano, ils ont donné avec cette œuvre la leçon à tous les sceptiques.
Danse avec les loups (1991) : tu seras toujours mon ami !
Ce film est la lettre d’amour que j’adresse aux Indiens. On les a exterminés, on a détruit leur culture pour posséder leur terre. J’ai aussi voulu montrer qu’ils ont toujours su vivre en harmonie avec la nature.
Ces propos sont tirés de la bouche de l’acteur-réalisateur Kevin Costner, nommé citoyen d’honneur de la nation sioux.
Danse avec les loups représente un tournant dans l’histoire du western américain. Ainsi, l’énorme nouveauté est la vision donnée aux Indiens. Dans ce film, ils ne sont pas dépeints comme de vulgaires sauvages qui s’en prennent au blanc. Kevin Costner a voulu les montrer comme ils étaient. En effet, l’effort de mis en scène s’est avéré colossal, Kevin Costner à fait appel à 150 comédiens et 250 figurants, tous Indiens. Durant trois semaines intensives, ils prennent des courts de Lakota. Car autre petite révolution, le réalisateur américain veut faire jouer les Indiens dans la langue sioux et sous-titrée en anglais. C’est Doris Leader Charge, Pretty Shield dans le film, qui se charge d’enseigner ce dialecte que sa grand-mère lui a appris en cachette.
Danse avec les loups suit le lieutenant John Dunbar (Kevin Costner), parti s’installer dans un camp isolé à la frontière après s’être distingué lors de la guerre de Sécession. Alors qu’il est seul dans ce camp, il va à la rencontre de la tribu sioux et se prend profondément d’amitié avec eux.
Danse avec les loups se révélera un magnifique succès et un chef-d’œuvre intemporel.
Reservoir Dogs (1992) : la naissance d’un auteur surdoué
En 1992, un certain Quentin Tarantino, un vendeur en vidéoclub, ultra cinéphile sort Reservoir Dogs. L’histoire raconte les périples de cinq malfrats, désignés par des couleurs et commandités par un gangster du nom de Joe Cabot pour commettre un hold-up dans une bijouterie. Mais le casse tourne mal, Mr White sauve Mr Orange grièvement blessé et l’emmène dans l’entrepôt où ils devaient se partager le butin. Lorsque les autres arrivent, tous sont persuadés qu’un traître se trouve parmi eux et les règlements de comptes vont fuser comme des balles dans un huit clos à l’atmosphère et au suspens insoutenable.
Dans Reservoir Dogs, Quentin Tarantino raconte le cinéma à travers le cinéma. Son œuvre est composée de références qui vont de John Woo aux films indépendants américains, jusqu’à David Lynch et les frères Cohen. Il les sublime dans sa mise en scène, dans son esthétisme, dans ses montages et ses dialogues. Un grand auteur est né et il marquera des générations entières, encore aujourd’hui.
Un jour sans fin (1993), et si vous viviez éternellement la même journée
Pour ceux qui ont vu ce film, la chanson de Sonny and Cher « I got you bab » a une signification particulière, encore plus s’ils l’écoutent au réveil. En effet, tout comme Bill Murray, ils peuvent se dire que quelque chose cloche.
Ainsi, dans Un jour sans fin, le concept se révèle extraordinaire. Phil Connors (Bill Murray), qui présente la météo sur une chaîne de télévision de Pittsburgh, doit se rendre dans la petite ville de Punxsutawney, pour le jour de la marmotte. Comme chaque année, il ne cache pas sa joie de rejoindre les « bouseux ». Malheureusement, une tempête de neige l’oblige avec son cameraman et sa productrice à passer une nuit supplémentaire sur place. Et… « I got you bab », chaque matin, le pauvre Phil Connors se retrouve à vivre la même journée en boucle, et rien ne semble pouvoir briser ce sort, il est bloqué éternellement.
Ainsi Un jour sans fin jouit d’un concept très fort, mais cette œuvre ne s’arrête pas là. Elle bénéficie d’un modèle de scénario et d’un personnage central parfaitement pensé. Bill Murray interprète merveilleusement bien un homme sarcastique qui n’aime pas grand monde. Et quoi de mieux pour ce personnage de se retrouver dans une mise à l’épreuve invraisemblable. L’ironie ne peut pas être meilleure et elle colle parfaitement au personnage de Phil Connors. Cet œuvre s’avère une véritable fable philosophique.
Les visiteurs (1993) « Louis VI le gros ? Godefroy ? Tout le monde s’en fou ! »
Aucun livre d’histoire ne fait référence d’un événement survenu en l’an de grâce 1112, où dans un acte de bravoure, le chevalier Godefroy de Montmirail tranche la tête d’un anglois et sauve son bon roi Louis VI le gros. Pour le récompenser, ce dernier lui offre la main de dame Frénégonde. Malheureusement, Godefroy, sous l’emprise d’une sorcière, confond le père de son aimée avec un ours, sort son arbalète et le tue d’une flèche en pleine tête.
Une histoire tragique que l’histoire de France a oubliée, et c’est peut-être parce que Godefroy et son fidèle écuyer Jacquouille la Fripouille, avec l’aide d’un enchanteur, ont pu emprunter les couloirs du temps pour effacer cet événement fâcheux. Hélas, l’enchanteur est sénile et il les a envoyés en… 1992.
L’idée de retrouver un chevalier et un roturier bien moyenâgeux propulsé dans notre époque s’avère très alléchante. Quand en plus le film est accompagné d’un casting délicieusement drôle, de situations plus cocasses les unes que les autres et parsemées de répliques cultes. Le tout fait une comédie populaire magnifiquement réussie et fait entrer le personnage de Jacquouille (Christian Clavier) au panthéon de personnage comique français inoubliable.
Philadelphia (1994) un film bien
Andrew Beckett (Tom Hanks) est un jeune avocat brillant au sein d’un grand cabinet. Il se voit confier une affaire de tout premier ordre. Mais immédiatement après cela, il est brutalement licencié pour faute professionnelle. Andrew Beckett ne se fait aucune illusion, il sait qu’il a été viré parce qu’il est atteint du sida. Mais loin d’être désespéré, il décide d’intenter un procès contre son ancien employeur pour discrimination. Un dernier combat contre l’exclusion et les préjugés a commencé par celle de son propre avocat Joe Miller (Denzel Washington).
Philadelphia a eu le mérite de mettre le débat de l’exclusion des victimes du sida sur la place publique. Ne serait-ce que par la manière dont ce film est mis en scène. Un combat entre avocat et où le lieu de l’action est l’enceinte des débats, le tribunal. Cet œuvre montre brillamment l’injustice et l’ignorance dont est victime Andrew Beckett et les homosexuelles à cette époque aux États unis.
Philadelphia est un film bien, un film humaniste.
Usual suspects (1995) « C’est lui ! C’est Keyser Soze ! »
Usual suspects est un polar au scénario brillant. Roger « Verbal » Kint (Kevin Spacey) mène délicieusement l’inspecteur Dave Kujan (Chazz Palminteri) en bateau, et le spectateur par la même occasion.
En effet, à la suite d’une explosion d’un cargo, deux hommes ont survécu, un marin hongrois brûlé et un petit escroc du nom de Roger « Verbal » Kint. Ce dernier est interrogé par l’agent des douanes Dave Kujan. L’inspecteur le cuisine et finit par amener Verbal Kint à délier sa langue. Mais celui qui mène le jeu est bien le talentueux Verbal Kint. Ce dernier lui compte une histoire fascinante de cinq malfrats d’envergures réunis dans une salle d’interrogatoire, à la suite d’une affaire de vol d’armes. Parmi eux, se trouve Dean Keaton (Gabriel Byrne), un ancien flic corrompu qui cherche à marcher droit. Les cinq malfrats se retrouvent embarqués dans une nouvelle affaire. Pour Keaton, les choses devaient en rester là, mais la bande de malfaiteurs se retrouve pris dans un engrenage infernal dont la main est guidée par un truand mystique « Keyser Soze ».
Mais ce dernier existe-t-il vraiment ? Ne serait-il pas le fruit de l’imagination débordante du talentueux Verbal Kint ? Ce dernier, ne serait-il pas avant tout… Un scénariste de brio ?
Chungking express (1995) l’éclosion d’un grand
Depuis quelques films, les cinéphiles découvrent un cinéaste venu de Hong Kong. Un réalisateur inclassable, au style unique, un certain Wong Kar Wai.
Difficile de donner un résumé de l’histoire de Chungking express. En effet, dans ses films, Wong Kar Wai n’explore pas forcément une histoire structurée classiquement, il a d’ailleurs la réputation de travailler sans scénario, mais il examine un sentiment. Dans Chunking express, le réalisateur hongkongais observe attentivement la rupture amoureuse ainsi que la reconstruction.
Un style poétique marié à une esthétique à couper le souffle dévoile un cinéaste atypique, que la suite de la filmographie ne fera que confirmer l'immense talent.
Un réalisateur inclassable, la qualité des plus grands.
Les trois frères (1995) pas si inconnus que cela
En 1995, Didier Bourdon, Pascal Legitimus et Bernard Campan ne sont plus vraiment des inconnus. En effet, la plupart des adolescents, et parmi eux votre serviteur, ressassent à longueur de journée les meilleures répliques de leurs comiques préférés. Pour preuve, tous savent où se trouve la forêt du Bouchonois (c’est près de Corville). Ainsi, lorsque les inconnus sortent sur les écrans leur premier long métrage Les trois frères, le succès est assuré, tellement ils ont marqué des générations avec leurs sketchs. En effet, les trois comiques de talent passent en revue toutes les composantes de la société française, et tout le monde mange bien (avec ou sans patate). Pas de langue de bois ou de politiquement correct avec eux, c’est ce qui fait leur force et aussi ce qui fait plaisir. Ils ont le talent pour aller chercher le petit détail qui fait rire tout le monde.
Les trois frères suit les mésaventures de Bernard, petit gars qui vit de petit boulot et qui fait occasionnellement des scènes de porno, Didier, qui vit aux crochets de la famille de sa fiancée godiche, et Pascal, bon bobo parisien qui travaille dans une boite branchée qui vend du vent. Lorsque les trois individus se retrouvent convoqués chez le notaire, ils apprennent qu’ils sont demi-frères et par la même occasion qu’ils héritent d’une fortune colossale, trois cents patates. Très vite, ils prennent la folie des grandeurs et commencent, soit à dépenser l’argent qu’ils n’ont pas encore, soit a ébruité imprudemment la bonne nouvelle. Malheureusement, la semaine suivante, ils apprennent qu’il n’y a plus d’héritage, car l’usufruit de leur code-barre entiradivisé… bref c’est la m…
Ce film n’est pas seulement le sommet de leur carrière, c’est aussi et surtout une comédie parfaitement réussie. En plus des inconnus, le film rassemble d’autres excellents talents de l’époque comme Les Deschiens, Chevallier et Laspalès et Élie Semoun.
Un grand film comique français tout simplement.
La vie est belle (1997), un film à pleurer de rire
En 1997 Roberto Benigni sort son film La vie est belle, et celui-ci ne laisse personne indifférent. Le réalisateur italien a l’immense mérite de faire un choix artistique incroyable pour évoquer la Shoah, par le tragi-comique.
Obligatoirement, il s’éloigne du réalisme des camps de concertation, mais son film rit à la face de la barbarie.
La vie est belle relate l’histoire de Guido qui est déporté avec sa femme et son fils lors de la Seconde Guerre mondiale. Pour protéger son fils, Guido lui fait croire que tout ceci n’est qu’un jeu à l’issue duquel le vainqueur remportera un char. Il est près à toutes les pitreries pour cacher la vérité au petit garçon. La vie est belle s’avère une fable tragi-comique bouleversante.
Cette œuvre suscitera aussi la polémique, mais pour beaucoup elle est avant tout une œuvre cinématographique aux choix artistiques forts et avec un véritable parti prix. C’est ce qui fait le mérite de Roberto Benigni.