Le cinéma a de tout temps parlé de politique. Qu’il s’agisse de l’exercice du pouvoir, de sa conquête ou de ses conséquences, les réalisateurs du monde entier ont su dépeindre ces grands combats du réel qui se jouent chaque jour. Parce qu’elle est présente dans nos vies, qu’on le veuille ou non, la politique convient à merveille à tous les genres allant de la comédie aux drames, en passant par les thrillers et même les films d’horreur…
« La politique est partout. On ne peut lui échapper en se réfugiant dans le royaume de l’art pour l’art et de la pensée pure. » Cette citation de l’intellectuel Edward W. Said en dit long sur l’impact de la politique sur le monde et les hommes. Un tel sujet ne pouvait évidemment pas laisser indifférent les cinéastes qui s’en donnent à cœur joie.
Les films politiques empruntent parfois au registre de la comédie, c’est notamment le cas de Vice, le biopic sur Dick Cheney ou de Quai d’Orsay, l’excellent long-métrage de Bertrand Tavernier consacré au passage de Dominique de Villepin au ministère des Affaires étrangères. Impossible également de ne pas citer les thrillers politiques comme l’oscarisé Argo de Ben Affleck ou encore Zero Dark Thirty qui relate la traque d’Oussama Ben Laden.
Plus étonnant encore, certains films d’horreurs ont bien une vocation politique, et l’on peut notamment penser à La Nuit des morts vivants de George Romero qui s’avère une critique féroce de la société de consommation. Plus récemment, la saga American Nightmare s’est attaquée à la question des inégalités sociales et de ses conséquences. On pourrait parler de nombreux autres films mais il faut bien trancher et c’est donc parti pour un tour d’horizon des meilleurs films politiques.
1) L’exercice de l’État
Le film de Pierre Schoeller donne à voir le quotidien de Bertrand Saint-Jean, ministre des transports français incarné à l’écran par Olivier Gourmet. Les dirigeants sont ici dépeints de manière assez cynique et semblent déconnectés du reste du monde. Vivant en vase clôt, ils n’épousent que leurs propres enjeux de carrière. Une scène du film immortalise à merveille le choc entre le monde réel et le politique. Lors d’un grave accident de bus scolaire, le ministre se rend sur place. Il observe depuis l’intérieur de son véhicule la scène d’horreur où les services publics tentent tant bien que mal d’agir. L'exercice de l’État est un film assez rare, parfois spectaculaire et drôle qui présente parfaitement la mécanique du pouvoir et ses logiques particulières.
2) Les Hommes du président
Le long-métrage d’Alan J. Pakula suit l’enquête de deux journalistes du Washington Post, Carl Bernstein et Bob Woodward. A force d’acharnement, ces derniers sont parvenus à remonter le fil de l’affaire dite du Watergate et à faire chuter le président Richard Nixon. Avec Dustin Hoffman et Robert Redford très impliqués et resplendissants de charisme, Les Hommes du président rend hommage au journalisme en tant que contre-pouvoir. Dans la veine de Spotlight, également basé sur une histoire vraie, on apprécie de voir ce qui semblait au départ impossible déboucher sur une conclusion triomphale.
3) Il Divo
Lorsqu’il est question d’hommes politiques italiens, il est courant de citer Silvio Berlusconi. Moins tonitruant, Giulio Andreotti a pourtant été au pouvoir bien plus longtemps qu'Il Cavaliere. Dans Il Divo, Paolo Sorrentino nous donne à voir le quotidien de cet homme froid et calculateur qui a su manœuvrer avec les forces sociales du pays (mafia incluse) pour tenir sur la durée. Ce long-métrage est par ailleurs mis en valeur par des lignes de dialogues bien ciselées et très drôles et une musique bien adaptée. Avec un Toni Servillo en très grande forme dans le rôle titre, ce film vaut assurément le détour.
4) Le dernier Roi d’Écosse
Le film de Kevin Macdonald a permis de révéler au grand public le talent de James McAvoy. Accompagné à l’écran par un excellent Forest Whitaker, l’acteur britannique incarne un jeune médecin qui fait la connaissance du dictateur ougandais Amin Dada. Rapidement, ce dernier apprécie la présence du jeune homme qu’il trouve brillant et attachant. Une complicité se noue qui sera vite déçue par les excès meurtriers, paranos, complotistes et antisémites du président. Ce qui est remarquable dans Le dernier Roi d’Écosse, c’est que l’on a en parallèle une belle histoire d’amitié et la mécanique qui pousse le dirigeant d’une junte à se comporter comme un véritable tyran.
5) Le Président
Dans ce documentaire, Yves Jeuland suit la campagne de Georges Frêche lors des élections régionales de 2010 en Languedoc-Roussillon. Il s’agit d’élections locales mais rarement voire jamais une campagne n’a été filmée d’aussi près. Le rapport à la presse et aux médias nationaux est passionnant. Les conseillers en communication apparaissent comme des personnages cyniques et calculateurs qui n’obtiennent pas toujours gain de cause. On observe aussi les mutations des campagnes politiques avec l’émergence d’Internet, les petites phrases et le buzz permanent avec lequel Georges Frêche, pourtant vieil animal politique, se joue parfaitement.
L’homme politique crève littéralement l’écran et semble bien souvent jouer un rôle. Tour à tour drôle, menteur, manipulateur, attachant, méchant, il est parfois totalement en roue libre. La palme revenant à ce passage où il évoque en meeting son pauvre père qui marchait avec des vieux sabots, avant de reconnaître en petit comité que son père était riche. Le Président a le mérite de présenter à merveille les arcanes de la conquête du pouvoir sans que l’histoire ne soit totalement réécrite par les services de communication du candidat.